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Le jeûne : mille et un régimes

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Image La période qui précède Pâques est précédée du temps de carême. Il se caractérise par un temps de jeûne. La privation volontaire de nourriture est une pratique bien répandue dans l’humanité.

Le jeûne : mille et un régimes 
 
Les diététiciens semblent à l’origine du boum du jeûne dans les sociétés d’abondance. Les régimes alimentaires font bon ménage avec les jeûnes religieux qui continuent de nos jours à susciter l’intérêt. Dans ce domaine les religions (re)découvrent qu’ils s’adressent à des humains, des êtres fait de chair autant que de pensée.
 
Une modification de l’alimentation peut procurer un mieux être physique, permettant à la pratique religieuse qui le prône, d’avoir un effet immédiat sur le croyant. Ainsi la religion propose un « salut  physique » dans ce monde, sorte de parabole du salut éternel.

Certaines pratiques alimentaires communes aident également à la communion dans le groupe. Elles fournissent alors un mieux être relationnel. Ici la religion procure un « salut social », sorte d’anticipation du salut éternel.

Le jeûne permet aussi au corps de participer à l’effort de prière ou de méditation, sortant ainsi le religieux du ghetto cérébral. Il permet à la spiritualité d’avoir un aspect concret et immédiat. La religion prend alors un visage tangible et propose un « salut palpable », sorte d’image du salut éternel.

Ces trois aspects relèvent toutes d’une tendance actuelle : les gens cherchent à se réconcilier avec la Vie avant la mort, bien plus qu’avec Dieu après la mort. Le salut doit avoir des effets dans notre existence et ne plus être rejeté dans l’au-delà. La théologie de la grâce , si chère aux protestants, n’en demeure pas moins pertinente. La Vie avant la mort vient de Dieu autant que le vie après la mort. Il s’agit simplement de donner à la grâce des contours pour ce monde.

 
Le jeûne de nos jours
 
Le jeûne délibéré peut avoir de nos jours plusieurs motivations : esthétique, politique, thérapeutique, religieuse.
La popularité des jeûnes esthétiques à notre époque n’est plus à prouver. Chacun y va de son régime.
La grève de la faim est une forme de jeûne, sa motivation est politique , au sens large de « défendre une cause ».
Le jeûne thérapeutique , lors de fièvre ou pour laisser l’appareil digestif au repos est prisé dans les sociétés opulentes de notre temps.
Notre époque a vu également une évolution du jeûne religieux qui revêt trois formes :
  • il accompagne des activités mystiques (prières…) ;
  • il peut faire partie du mode de vie d’une communauté (groupes végétariens…) ;
  • il impulse pour un temps un mode de vie différent (abstinence temporaire de tabac…).
Le jeûne esthétique
 
Le jeûne « esthétique » est sans doute la forme de diète la plus répandue à l’aube du troisième millénaire. Il suffit de regarder la « une » des magazines féminins pour s’en rendre compte. En général il s’agit d’un jeûne sélectif consistant à se priver de certaines nourritures. Sa motivation est souvent subjective : bon nombre de personnes décrètent être trop lourdes sans pour autant l’être davantage que la moyenne de la population. Il arrive que des gens se privent par peur d’avoir du poids plus tard, d’autres ne s’arrêtent pas de fumer par peur de prendre des kilos etc. Il s’agit d’un véritable phénomène de société puisque dans d’autres civilisations, en particulier chez nous, dans les siècles passés, les formes féminines généreuses étaient davantage prisées. Il suffit de regarder un tableau de Rubens pour s’en apercevoir.
 
Le jeûne politique
 
Le phénomène du jeûne politique débute au 20ème siècle. Gandhi a popularisé cette pratique. Pour être efficace, elle a besoin d’une médiatisation importante d’où son apparition au cours du siècle qui vit naître les médias de masse. Il s’agit également d’un fait de société. Il ne peut fonctionner que grâce à la sympathie d’une partie importante de la population. Le jeûne politique, appelé en général « grève de la faim, » consiste à se priver totalement de nourriture pour une durée illimitée, en courant le risque d’un décès par malnutrition. Il se différencie ainsi du jeûne esthétique qui se manifeste par une alimentation certes réduite, mais surtout sélective. Il se différencie également du jeûne religieux dont la durée est, en principe, limitée. Il constitue une des formes non violente de protestation et permet parfois d’attirer l’attention du public, puis des autorités, sur une situation jugée inhumaine.
 
Le jeûne thérapeutique
 
La diète thérapeutique a pour modèle la nature. Les animaux qui hibernent ne se nourrissent pratiquement pas durant cette période. Les oiseaux migrateurs ne mangent que très peu durant leur voyage. Un animal malade se couche dans sa tanière et attend, sans manger, une amélioration. Les humains font tous cette expérience : lorsqu’ils ont de la fièvre, ils n’ont pas faim. Les vertus médicales du jeûne sont connues depuis des siècles. Au cours du 20ème siècle s’est développé un jeûne thérapeutique préventif, destiné aux biens portants ayant pour objectif, à long terme, de leur éviter des maladies futures. Il s’agit de s’abstenir de certains aliments réputés mauvais pour le cœur, la tension etc. Au-delà de la projection dans l’avenir, l’intérêt pour le jeûne comme moyen de purification de l’organisme s’est développé dans les sociétés d’abondances. Il est possible de parler d’un mouvement dynamique de renaissance du jeûne diététique.
 
Le jeûne religieux
 
La première forme de jeune religieux renforce, dans le psychisme de la personne l’impact d’activités de type liturgiques, individuelles ou collectives.
La seconde forme se vit dans des communautés proposant une approche du religieux par le biais de tout l’individu : de sa pensée mais également de son corps.
La troisième forme, plus récente, propose un engagement personnel, limité dans le  temps (période de carême). Il dépend du mode de vie  de chacun et a pour but de le changer, au moins pour un temps.
 
La forme traditionnelle
 
La première reprend la forme traditionnelle du jeûne religieux : se priver de nourriture provoque des modifications psychiques. Accompagnée de prières ou d’autres exercices mystiques, cette pratique se développe dans des groupes parfois sectaires, parfois intégrés dans les Eglises multitudinistes. Ils basent leur spiritualité sur les traditions des trois grands monothéismes, mais peuvent également se référer à des ascétismes issus du bouddhisme ou l’hindouisme. Le jeûne demande pour la plupart des gens une certaine volonté que la fréquentation d’un groupe permet de soutenir.
 
Un mode de vie différent
 
Dans un ordre d’idée semblable, des mouvements religieux prônent des formes de jeûnes sélectifs sur certains aliments, le plus souvent la viande. Ils s’inspirent de religiosités extrême-orientales (bouddhisme, hindouisme…) Cette tendance associe de fait, jeûne religieux et jeûne thérapeutique. Elle propose une hygiène de vie permettant au croyant de sentir concrètement et immédiatement, dans son corps, les bienfaits de sa nouvelle vie religieuse. Elle correspond également à l’évolution des mentalités n’acceptant plus de repousser dans l’au-delà, après la mort, le bien être apporté par la foi. Il peut s’apparenter au jeûne diététique, la foi donnant une motivation supplémentaire au jeûneur.
 
Un engagement à durée déterminée
 
Certaines Eglises protestantes proposent une troisième évolution. Il s’agit d’utiliser la période de carême, pour tenter de se libérer d’une dépendance. Ne pas fumer ou ne pas boire d’alcool (ou ne pas manger de chocolat !), pendant quarante jours, permet de se prouver à soi-même que cela est possible. Cela revient en fait, à changer une habitude de vie et peut dépasser les questions alimentaires. Il est possible également de passer moins de temps devant son écran ! Cette pratique vient en complément d’autres activités proposées par les Eglises durant cette période (conférences…). Elle confirme la tendance générale consistant à vivre la foi dans tout son être, donc également avec son corps. Elle relève à la foi du jeûne thérapeutique, du jeûne religieux traditionnel, et peut, selon les cas, rejoindre également le jeûne esthétique ! Associé à des dons pour des œuvres humanistes, elle ressemble même aux jeûnes politiques.
 
Le jeûne dans les trois monothéismes
 
L’origine de la pratique du jeûne religieux remonte à la nuit des temps.

Le jeûne religieux peut être collectif, lors de certaines fêtes, ou individuel pour des raisons personnelles. Il fait partie de la série de rites des mystères d’Eleusis (près d’Athènes) qui se déroulent durant le premier millénaire avant l’ère chrétienne. Le manichéisme, qui connut une assez grande expansion durant le premier millénaire de l’ère chrétienne, développera une pratique du jeûne relativement importante. Le jeûne individuel concerne certaines personnes, les chamans par exemple qui jeûnent lors de leur initiation. Les individus peuvent également être amenés à jeûner sans pour autant devenir des personnes à part. Leur jeûne peut constituer une des pratiques de repentance, de deuil, de demande de guérison…

Le jeûne fait partie des rites des deux testaments , mais Jésus et le christianisme naissant, relativisent son importance.
Le jeûne chrétien se pratique essentiellement pendant la période de carême, 40 jours avant Pâques.
Le judaïsme se caractérise par des prescriptions alimentaires strictes qui renforcent la vie communautaire.
L’Islam prescrit un jeûne annuel, occasion pour changer le rythme de vie habituel.

 
Dans la Bible
 
Dans la bible, le jeûne semble avoir d’abord été individuel en cas de deuil, de demande de pardon ou à la veille d’une tâche difficile. Le jeûne fait partie des manifestations de repentir du roi Akab (1 Roi 21.27). Dès le 6ème siècle avant l’ère chrétienne plusieurs jeûnes annuels sont institués. Le jeûne du jour du grand pardon date sans doute de la période d’Esdras (5ème siècle avant l’ère chrétienne). Le jeûne a une valeur symbolique et permet de manifester l’importance d’un événement. Moïse jeûne 40 jours dans la montagne avant de recevoir les dix commandements (Exode 34.27). Deux évangiles (Matthieu et Luc) montrent Jésus jeûnant pendant 40 jours dans le désert au début de son ministère. Matthieu surtout, présente Jésus comme un nouveau Moïse, le parallèle entre le jeûne de Moïse et celui de Jésus fait partie du projet littéraire de notre évangéliste. Le Jésus historique par contre, ne semble pas avoir jeûné (Luc 7.33 et 34). Il se distingue ainsi de Jean-Baptiste dont les évangiles mettent l’ascétisme en avant.

Les restrictions sur certains aliments, le porc par exemple, constituent la seconde forme de jeûne dans le premier testament. Il s’impose à tous et permet au judaïsme de se distinguer des autres peuples, mais surtout de la société ambiante, lorsqu’il se retrouve en situation de diaspora. Le second livre des Maccabées (chapitres 6 et 7) raconte comment des juifs pieux allèrent jusqu’au martyre pour ne pas manger de viande de porc. Dans le Nouveau Testament, Paul prendra des distances avec les restrictions alimentaires du judaïsme de son temps. Le jeûne sélectif, par interdit total sur certains aliments, disparaît dans le christianisme dès le 1er siècle.

 
Dans le christianisme
 
Le jeûne dans la tradition chrétienne se pratique essentiellement durant la période dite du carême. A l’origine, un jeune strict est observé dans bon nombre de communautés le samedi précédent pâques. Elles accompagnent ainsi les catéchumènes qui jeûnent avant leur baptême, le dimanche de Pâques. Petit à petit un jeûne plus long mais moins rigoureux s’est mis en place. Il s’agit de ne prendre qu’un repas par jour, en général des légumes. Il dure quarante jours et commence le mercredi des cendres car il est interrompu le dimanche. Le poisson, symbole chrétien, est toléré ce qui permet d’adoucir le jeûne et développe le commerce de cet aliment. En religion « la partie vaut pour le tout », une phalange de saint par exemple, symbolise le saint « tout entier ». Ainsi une souffrance partielle (la faim volontaire) permet de vivre symboliquement les souffrances du Christ, d’être en quelque sorte davantage en communion avec lui. A cet aspect psychologique, s’ajoute la dimension théologique : le jeûne se fonde sur ceux de Moïse au Sinaï et de Jésus dans le désert. Enfin, la faim volontaire peut favoriser la méditation ou induire une meilleure hygiène de vie pendant quelque temps. Ce dernier aspect, motive bon nombre de jeûneurs contemporains.
 
Dans le judaïsme
 
Le judaïsme connaît deux types de jeûnes :

  • sélectif et permanant avec l’interdit pesant sur certaines nourritures (le porc etc.),
  • cyclique et total (en principe) lors des grandes fêtes.
Le jeûne cyclique le plus connu est celui du jour du Kippour (le Grand Pardon). Le jeûne dure 25 heures et il s’agit de la fête la plus largement observée chez les juifs. Le judaïsme connaît plusieurs autres jours de fêtes comprenant une pratique de jeûne mais avec un moindre rayonnement.
Plus caractéristique, les interdits alimentaires permanents : la nourriture doit être « kacher ». Ces prescriptions concernent les aliments eux-mêmes mais également la liturgie président à leur utilisation. Une bouteille de vin, par exemple ne sera plus « cacher » si elle est ouverte par une personne non agréée. Dans la pratique, ces interdits obligent à une vie sociale tournée vers la communauté. Les repas ne peuvent se faire qu’entre membre de la communauté, ce qui favorise en particulier les mariages endogamiques. De ce fait les interdits alimentaires aident au développement interne de la communauté.
Dans l’islam
 
L’islam connaît, comme le judaïsme, les deux types de jeûnes :

  • sélectif et permanant avec l’interdit de certaines nourritures (le porc) ou boissons (l’alcool) ;
  • cyclique durant la période du ramadan.
Le jeûne sélectif peut s’apparenter aux habitudes alimentaires. Certaines personnes ou sociétés s’abstiennent d’alcool sans fonder cette abstinence sur des motifs religieux. La répulsion pour certains aliments est chose partagée par bon nombres d’humains. Le jeûne annuel du ramadan s’inscrit quant à lui dans le cycle de vie des familles. Il s’agit en effet d’une privation de nourriture et de boissons au cours de la journée (entre le lever et le coucher du soleil), donc d’un jeûne total mais limité dans le temps. Cette abstinence entraîne un mode de vie plus sain et facilite la réflexion éthique. L’abstention d’aliments va de pair avec l’abstention des actions ou pensées mauvaises, des efforts plus grands pour fréquenter les prières à la mosquée etc. Cette période favorise également la vie familiale et sociale. Il s’agit en fait d’une rupture du rythme de vie. A la tombée de la nuit des activités conviviales, font du ramadan une période de relations plus intense avec Dieu mais également avec les autres.

Les œufs de Pâques d’Allenwiller

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Décoration d’oeufs de Pâques 

Dans ce petit village alsacien on se transmet, de génération en génération, une technique de décoration tout à fait particulière et qui n’est usité que le vendredi saint !

 La technique est simple : il s’agit du procédé de réserve à la cire ou batik. Plus sophistiqué et plus largement répandu en Roumanie et en Ukraine, cette technique est ici dans son expression simplifiée. Ainsi de la cire d’abeille ,maintenue liquide mais sans ébullition grâce à un petit réchaud de type « lampe de berger «  ou chauffe-plat, est ponctionnée grâce à une aiguille à tête d’épingle en verre montée sur un petit bâton (traditionnellement un sarment de vigne qui plus est a l’avantage d’être léger) Image 
Image  Les mouvements de l’artiste doivent être aussi rapides que précis, effectuant un continuel va et vient entre l’oeuf posé au creux de la main et le récipient de cire fondue, un mouvement nécessaire pour chaque trait, chaque point, chaque virgule.
En effet, l’outil simple, la tête de verre de l’épingle utilisée comme traceur, ne permet ni un trait fin, ni un trait régulier. Il induit par contre le point et la virgule, parfaitement arrondie à son point d’impact, avec une queue qui, étirée, s’affine vers son extrémité. Image 
Image  C’est en associant harmonieusement les virgules et les points qu’on obtient des décorations tel le soleil, des marguerites, des hirondelles, des roues solaires (svastika), et, pourquoi pas, des croix huguenotes, lorsque les quatre hirondelles convergent vers un même point central.
L’œuf ainsi décoré de cire sera ensuite plongé dans une décoction de pelure d’oignons préalablement refroidie (afin que le dessin à la cire ne s’efface pas malencontreusement comme une bavure) Le réchauffement lent de cette décoction fera fondre le motif appliqué à la cire. Celui-ci, gardant la surface vierge de couleur va apparaître en blanc (couleur coquille) contrastant avec la couleur brun orangé qu’aura pris le restant (non décoré) de la coquille d’œuf. Image
 

 

 

MATERIEL POUR LA REALISATION DE CES ŒUFS PEINTS

  • des œufs crus, placés préalablement à la chaleur ambiante
  • de la décoction de pelure d’oignons en quantité suffisante et refroidie, tout au plus tiède
  • des bâtons, crayons, au mieux des sarments de vigne coupés comme des stylets, portant à l’un de leur bout un épingle à tête de verre
  • un petit réchaud à bougie chauffe-plat, avec une petite coupe supportant la chaleur
  • de la cire d’abeille (seule utilisable)

À savoir : à chaque application de la cire fondue on ne peut que dessiner un point ou un trait droit ou en virgule.

La tradition de l’oeuf de Pâques

Image Intégré au rite chrétien, il demeure de nos jours un objet décoratif très prisé à Pâques. La tradition alsacienne des œufs peints d’Allenwiller pourrait constituer une activité pour nos groupes de jeunes. Confectionnées par dizaines, ils sont parfois vendus au profit de projets d’Église, paroissiaux ou humanitaires. Une coutume à tester !

L’ŒUF : il attire la vue, il invite au toucher et au goût ; tant sa forme que sa fragilité annonce quelque mystère. Son volume ne présente aucune limite, ni début ni fin, ni entrée, ni sortie. Dans la main qui le saisit, il se love comme une promesse et annonce quelque chose qui jusque là avait dû rester caché.

Par ailleurs, à la surprise de l’observation s’ajoute celle de la réflexion car l’œuf est dualité, il est cette réalité tangible qui unit l’objet et le vivant.

Preuve en est la profusion des récits mythologiques qui se rapportent à ce monde clos sur lui-même, et qui a, dès les temps anciens, suscité de nombreuses vénérations. Il a été œuf primordial, à caractère cosmogonique, incarnant la renaissance et la résurrection.

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ET DE LA, L’ŒUF DE PÂQUES. Intégré dans le rite chrétien pendant la période pascale, l’œuf représente la résurrection du Christ d’une part, et, en cette saison printanière il accompagne le renouveau de la nature.

Dans la lointaine antiquité il était déjà placé dans les tombes des défunts, annonçant, par un tel geste, l’espérance d’une renaissance ou d’une nouvelle incarnation.

La coutume de l’œuf de Pâques existe principalement dans les pays européen qui sont à l’est, les pays slaves et méditerranéens. Ainsi l’œuf teint en rouge appartient au rituel pascal dans l’Église orthodoxe, quant aux œufs polychromes, ils sont plus répandus, en Pologne, en Slovénie, en Tchéquie et en Roumanie, en Bulgarie et dans la région ukrainienne.

Dans plusieurs régions d’Allemagne on pratique aussi la décoration d’œufs et celle-ci semble moins présente en France. En Alsace, quelques villages détiennent une tradition particulière qui provient probablement de ses frontières avec l’Allemagne et la Suisse.

Bénédiction d’œufs au douzième siècle, dons et collectes d’œufs pour Pâques aux autorités ecclésiastiques, quête d’œufs par les enfants au son des crécelles le samedi précédant Pâques, nids de Pâques le dimanche et parfois, support d’un message amoureux, support et matériel de jeu (le « taper » de l’œuf, « la roulée des œufs », la course aux œufs) nombreux sont les rites et les coutumes auxquels l’œuf est associé.

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EN ALSACE, DES PROCEDES PARTICULIERS DE DECORATION D’ŒUF DE PÂQUES !

Le procédé de décoration par coloration unie est le plus simple. Les teintures les plus utilisées sont les décoctions de pelures d’oignons (brun clair orangé, terre de Sienne), la décoction de café (brun sombre, terre de Sienne brûlée), la décoction de boutons d’or des marais (jaune), de mousse et de lichen (vert), de betterave et de chou rouge (rouge violacée).

Les œufs teints sont parfois grattés à l’aide d’une épingle ou d’une lame de rasoir, ce qui aboutit à un dessin très méticuleux et très fin. Plus répandue est la technique de l’impression en négatif : à cet effet, des feuilles ou des fleurs séchées sont collées avec du blanc d’œuf  sur la coquille ; après un bain dans la décoction choisie, l’oeuf portera les empreintes blanches, marques du feuillage, se détachant sur le fond coloré.

 

UNE PARTICULARITE DECORATIVE : l’œuf peint d’Allenwiller… à découvrir dans la section Bricolage ou en cliquant directement ici

Des attentes dans l’histoire de Jacob en lien avec l’avent

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Image Pourquoi parler de Jacob alors qu’on est dans l’attente de Noël, l’attente de fêter l’anniversaire de la venue de Jésus-Christ dans le monde ?

Parce que l’attente fait partie de notre vie de tous les jours. 

Attendre le bus, attendre un collègue pour travailler, attendre un enfant qui rentre de l’école, attendre le résultat d’un examen scolaire, ou d’un examen médical. Attendre un ami, attendre un parent. Attendre un entretien d’embauche, attendre une réponse. Attendre un jugement, attendre un papier. Attendre les vacances, attendre la rentrée.

Qu’est-ce que je suis en train d’attendre ? 

Vous pouvez déjà remarquer dans ces exemples que toutes ces attentes vont être vécues très différemment, selon l’objet de l’attente. Notre état d’esprit est conditionné par ce que nous allons trouver au bout. En soi, le temps passe et rien ne change fondamentalement dans le temps d’attente, uniquement la façon dont nous pensons à l’objet de l’attente.

Pour réfléchir à notre façon de vivre cette période de l’avent, tournons-nous vers une personne centrale de l’ancien testament : Jacob, celui qui deviendra « Israël » (Gn 25, 19-34 ; Gn 27 à 33 ; Gn 35).
Comment vit-il les attentes différentes de sa vie mouvementée ?

1er temps d’attente de Jacob : le sentiment amoureux l’aide à attendre 7 ans

L’attente la plus connue de son histoire concerne sa vie affective. Il arrive chez son oncle pour trouver une femme et tombe amoureux de la cadette, Rachel. Mais l’oncle lui demande de travailler sept ans pour lui avant de l’épouser. Le texte biblique nous dit : Jacob servit sept ans pour Rachel, et ils lui parurent quelques jours tant il l’aimait. ( Genèse (Gn) 29/ 20)

Le sentiment amoureux lui permet de vivre, de faire son travail parce qu’il est dans l’espoir de se marier avec celle qu’il aime. L’attente n’est pas douloureuse car c’est une attente pleine de promesses. Promesse d’un amour qui n’aspire qu’à s’épanouir, promesse d’une vie future à deux pour fonder une famille, avoir une descendance. Cette descendance fait partie de la promesse que Dieu lui fait à travers un songe (Gn28).

Quand les sept années sont terminées, Jacob se fait tromper par son oncle. Il lui donne comme épouse l’aînée de ses filles, Léa. Ce n’est pas la coutume de donner la cadette avant l’aîné.(Gn 29 / 26) Combien de temps cet homme, Laban, a-t-il attendu pour marier ses filles ?
La négociation reprend et Jacob recommence à servir son beau-père sept ans, mais avec l’avantage d’être marié avec ses deux filles.

2ème temps d’attente de Jacob : l’arrivée des enfants habite les sept années suivantes.

Pendant cette deuxième période, Jacob est lié à Laban et ne travaille pas pour lui. Mais on nous parle surtout de l’attente des deux femmes pour avoir des enfants et de la compétition qui se joue entre elles.

Attente douloureuse de la femme stérile
 
Rachel attend vainement de pouvoir donner un enfant à celui qu’elle aime. Mais c’est Léa qui est féconde et espère ainsi se faire aimer de Jacob. Attente angoissée de Rachel pour féconder la vie. Donne moi des fils ou je meurs ! ( Gn30 / 1) Attente de combler son désir de devenir mère. Attente angoissante devant celle qui enfante sans problème.

On pourrait croire cette attente dépassée aujourd’hui, car notre époque offre aux femmes d’autres façons de s’épanouir, notamment un statut de travail souvent comparable aux hommes. Pourtant, pour ces femmes, se sont développées avec succès les recherches sur la fécondation in vitro. L’humain recule les limites de son impuissance.

L’attente d’une femme stérile révèle l’impuissance de l’être humain à tout maîtriser.
L’attente en général révèle notre état limité d’agir sur le monde, sur des éléments qui peuvent être décisifs pour nos vies. Bien souvent l’attente devient insupportable quand une situation est dramatique et qu’on ne peut rien faire.

Les femmes continue leur course à l’enfant avec un nouveau moyen : les mères porteuses que deviennent leurs servantes : Bilha et Zilpa.
Néanmoins, à la fin des sept ans, Rachel enfante enfin un fils : ce sera Joseph, celui qui amènera sa famille jusqu’en Egypte.
Dans le texte biblique cette naissance déclenche chez Jacob le désir de repartir dans son pays d’origine.

3ème temps d’attente de Jacob : un temps d’enrichissement pour partir

Par ruse, Jacob trouve un moyen efficace de se constituer un beau troupeau de moutons et de chèvres. Il utilise son temps pour lui-même et s’enrichit petit à petit durant environ six ans. Ce n’est pas un temps d’attente qu’il doit utiliser mais c’est un temps d’enrichissement qui diffère son départ. Pour la première fois depuis le début, il devient acteur de son histoire, et maître de son temps. Il en profite même au dépend de Laban qui a abusé de sa patience.

4ème temps d’attente de Jacob : angoisse de retrouver son frère Esaü

Repartir dans son pays, c’est se souvenir de la situation qu’il a laissé là-bas, et qui a simplement été mise entre parenthèse pendant 20 ans. Il est parti car son frère voulait le tuer. Comment envisager alors un retour serein ?
L’attente de cette rencontre va se vivre dans une terrible angoisse pour Jacob. Car il ne connaît pas l’issue joyeuse de l’histoire.

Que va faire Jacob pour supporter cette attente ?

  • Il prie Dieu en reconnaissant son impuissance : je suis trop petit pour toutes tes faveurs et ta fidélité. Mais il remet aussi sa vie dans les mains de Dieu : de grâce, délivre-moi de la main de mon frère.
  • Il prépare des cadeaux pour amadouer son frère.
  • Il doit faire face à une dernière épreuve qui lui est donné de vivre pendant la nuit : il doit lutter avec un personnage mystérieux qui se révèle être un ange de Dieu. (Gn32/ 23-32).

Jacob est mis à l’épreuve dans cette attente. Mais Dieu ne le laisse pas seul. Il répond à sa demande. Même si cette lutte laisse boiteux Jacob, ce qu’il y a gagné c’est la fierté d’être béni par Dieu. La fierté de recevoir une nouvelle identité : celle de tout un peuple. Il se met alors en route vers son frère. IL se met en route vers la réconciliation.

Comment attendre ?

En regardant l’histoire de Jacob, nous pouvons dire que toute attente nous apprend quelque chose sur notre impuissance humaine à agir sur les choses ou sur les personnes. On ne peut pas tirer sur la tige d’une fleur pour la faire pousser plus vite, on ne peut pas obliger quelqu’un à se réconcilier s’il n’y est pas prêt. On ne peut pas faire venir le bus plus vite, on ne peut pas obliger un employeur de nous embaucher.

Par contre, nous pouvons agir sur nous-mêmes. Et en particulier sur notre façon de voir les choses. Jacob ne pouvait voir qu’une issue tragique à sa rencontre avec Esaü. Il ne pouvait pas imaginer les embrassades marquant la paix des retrouvailles. 
Pourtant, c’est la réconciliation qui lui est donnée. Quand nous attendons quelque chose, pouvons nous imaginer tous les cas de figures qui seraient possibles ? Souvent non. Nous sommes surpris.

Changer notre regard, c’est le tourner vers Dieu. Car il nous promet sa présence quand nous le lui demandons. Inviter Dieu dans notre attente, quelle qu’elle soit. C’est peut-être un des sens de la période de l’avent : dans toute attente, Dieu peut être présent. Et il est bien souvent meilleur pédagogue que notre impatience ou notre angoisse. Il nous aide à accepter notre petitesse humaine car il s’est fait lui-même tout petit pour nous rejoindre dans notre monde.

Attendre Noël, c’est attendre quelqu’un
C’est être devant notre impuissance humaine, et découvrir quelqu’un qui nous rejoint dans cette impuissance. Jésus nous y rejoint, mais en nous faisant découvrir de quelle façon nous sommes accompagnés par Dieu. Jésus s’est laissé traverser par la puissance de Dieu pendant sa vie pour faire avancer la venue du royaume : il restaurera la vie dans toutes ses rencontres, jusqu’à la nôtre aujourd’hui.

Attendre Noël, c’est se réjouir ensemble de cette présence parmi nous. C’est recevoir cette force donnée par Dieu pour agir et faire exister l’essentiel, c’est à dire ce qui est indispensable à notre vie humaine : la paix, la joie, l’amour, l’espérance.

Noël, origine historique

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Image  De l’’Orient à l’’Occident, du sud au nord, des rites et des légendes jusqu’’au Noël d’aujourd’’hui !

La fête de la lumière

A l’’origine les chrétiens fêtent la mort et la résurrection du Christ, mais pas sa naissance dont la date précise est inconnue. Le solstice d’’hiver est fixé le 25 décembre par Jules César et les romains fêtent la naissance du soleil le 24 au soir. Ils allument des feux pour l’’aider à monter plus haut au-dessus de l’’horizon. Or le Christ incarne le soleil de justice annoncé par le prophète Malachie (3.20), la lumière des nations reconnue par le sage Siméon (Luc 3.2). Des pères de l’’Eglise poussent l’’empereur chrétien Constantin à substituer à la fête païenne une fête chrétienne de la lumière. « Christ est notre nouveau soleil », écrit Amboise de Milan (337-397). La nouvelle fête prit le nom de « Noël » dérivé du latin «natale» signifiant « naissance ».

Un folklore relativement récent

Le descriptif des mages date du moyen âge et la coutume de la galette, au plus tôt, de la fin de la période médiévale. Les premières crèches apparaissent également au moyen-âge et le sapin au XVI e siècle. Il symbolise l’’arbre avec le fruit défendu, alors identifié à la pomme, ancêtre des boules. Le sapin, au fil des ans se pare ensuite d’’autres décorations, par exemple une bougie par jour entre Noël et l’’Epiphanie, soit douze au total. Il se diffuse au-delà de l’’espace rhénan à partir du XIX e siècle. L’’imaginaire collectif a toujours été peuplé de divers personnages légendaires apparaissant vers cette période. Le culte de Saint Nicolas se développe à partir du XI e siècle en Lorraine. Ce Saint se transformera en Père Noël aux Etats Unis au XIX e siècle et en Europe au XX e. La couronne de l’’avent, venue de l’’Allemagne du Nord, ne se répand qu’’au XX e siècle.

 

Bibliographie :

Oscar Cullmann, La nativité et l’’arbre de Noël, Les origines historiques, Les Editions du Cerf, Paris, 1993, 92 pages.

Les aliens remplacent les anges

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Au XXI ème siècle la raison triomphe. Même les Eglises, gardiennes des mystères, ont purgé leur théologie des éléments « trop fantastiques pour êtres  vrais ». Les anges n’apparaissent plus que dans certains albums d’enfants. Le domaine de l’extravagant abandonné par les Eglises n’a pas disparu pour autant. Il déferle sur les écrans en provenance des Etats Unis d’Amérique. Les créatures surnaturelles de ce type de cinéma, les « aliens » et les « zombies », n’ont cependant rien d’angéliques. Les « aliens » dérivent des « martiens », ils viennent du ciel en quelque sorte et les « zombies » sont des « morts vivants », venus de la terre. Tous deux répandent la terreur.

Cet univers chimérique se démarque du merveilleux biblique où le fabuleux relève surtout du genre positif. Il est possible de considérer les anges comme des personnages imaginaires au même titre que les « aliens » et autres « zombies ». Mais les anges n’ont aucun pouvoir. C’est Jésus qui chasse les démons, pas l’ange Gabriel. Les anges sont des messagers de Dieu communiquant un futur positif. Contrairement aux » aliens », ils n’agissent pas sur les humains, ils leur rappellent simplement qu’aucune situation n’est totalement désespérée. L’imaginaire, dans la bible est au service de ce message.

Les Eglises occidentales ont cru que la montée en puissance de la raison avait réduit petit à petit le domaine d’intervention des « forces divines ». Elles ont donc cantonné l’inconnaissable dans les sommes théologiques. Or, nos contemporains cherchent à retrouver la magie de l’existence.

Faire rêver constitue une tâche noble.

Le légendaire n’empêche pas de penser et d’annoncer un contenu d’un niveau élevé. Il rappelle que l’humain aspire à dépasser sa condition, et qu’il s’agit là d’un désir légitime. Qu’une catéchèse «  de la terre et du ciel »via ces canaux mystérieux d’internet nous offre une telle aspiration « céleste » !

Fêtons Noël: Le jeu symbolique de Noël

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 » Il est impossible de reconnaître Dieu sans dommage, ni par ton imagination et par tes spéculations, sinon en te tenant à sa crèche.

Si tu suis le chemin inverse, si tu commences à réfléchir sur sa divinité, à la manière dont elle gouverne le monde, à la façon dont elle a détruit Sodome et Gomorrhe, si tu cherches à savoir si elle a prédestiné ou non tel ou tel homme, tu te casseras aussitôt le cou et tu tomberas du ciel comme l’esprit malin.

Mon cher n’’escalade pas le ciel ! Va d’abord à Bethléem ! « 

Martin Luther

LE JEU SYMBOLIQUE DE NOËL

La fête de Noël, telle qu’elle apparaît dans les pratiques sociales, représente une étroite combinaison du mystère, de la légende et du merveilleux. Nulle autre fête ne donne lieu à un imaginaire aussi développé. Nulle ne témoigne d’une imbrication aussi subtile des plans et des thèmes. Le souvenir, la fiction, la féerie y semblent inextricablement mêlés. C’est cet enchevêtrement qui fait question pour la communauté chrétienne et l’interroge sur la rectitude de sa célébration.

Une réflexion sur la célébration de Noël ne saurait négliger l’apport de l’analyse sociologique. En ce domaine, l’intérêt de l’enquête que F.A. Isambert  a consacrée aux fêtes de fin d’année mérite d’être souligné : cette brève note n’a d’autre but que de marquer la richesse de cette interprétation du Noël vécu, en reprenant quelques-uns des thèmes majeurs de cette recherche.

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Noël et Nouvel An : deux fêtes complémentaires ?

Le calendrier rapproche Noël et le jour de l’an, « fêtes à la fois antithétiques et jumelles ». Le Nouvel An ne serait-il qu’un doublet profane de Noël, un écho appauvri, parce que privé de toute l’enveloppe mythique qui auréole la fête religieuse ? Au plan des comportements, les deux fêtes paraissent en écho (même importance de la veillée, du repas, parallélisme des cadeaux et des étrennes, etc.) mais, au plan des représentations, elles s’opposent comme un jeu de miroirs : à l’intériorité toute familiale de Noël, centrée sur l’enfant, répond l’exubérance extravertie du Nouvel An, fête d’adultes vécue entre amis, scellant un renouvellement des relations sociales. Plus encore que cette symétrie inversée, ce qui articule les deux fêtes, c’est une certaine manière de rythmer un passage en un cérémonial de transition. Tout se passe en effet dans le calendrier français, et la culture qu’il traduit, comme si à chaque fête religieuse devait correspondre une fête profane, et comme si la profusion de la fête ne pouvait se vivre que dans ce fractionnement de la festivité. Au resserrement domestique et à l’intériorisation de Noël fait pendant l’extériorisation bruyante du Nouvel An, qui n’est pas sans rapport avec une certaine conjuration de l’angoisse, liée à la fuite du temps et à l’inconnu de l’avenir. Les deux fêtes scandent ainsi la continuité/discontinuité du temps au travers du schéma fin/recommencement. Ce n’est pas seulement que face à la rupture du calendrier, la continuité de la vie familiale et des liens sociaux est réaffirmée symboliquement. C’est aussi que le contraste de Noël – suspension du quotidien, retour sur soi-même -et du Nouvel An – sortie vers les autres, renforcement des liens sociaux – dessine en lui-même un schéma dynamique homologue à la succession fin/ recommencement.

Tous impliqués

L’un des paradoxes qui caractérise ces fêtes, c’est qu’elles s’affichent publiquement pour se passer en privée . « Chacun » est le sujet de la fête : ni l’individu, ni la collectivité dans son ensemble, mais chacun qui, dans l’intimité de la fête familiale, se sait participant d’une fête commune à toute société, voire de toute l’humanité. C’est la famille qui est le lieu privilégié, le « sujet médullaire » de la célébration. L’enfant va, pour la fête de Noël, y tenir une place singulière. La symbolique de la Nativité y incline ; le rituel de la fête domestique se déroulera, de manière privilégiée, au travers d’un rapport adultes/enfants.

Noël, « fête de l’enfant » ? ou « fête de l’enfance » ? Deux tendances peuvent être ici repérées :

– l’une va faire de l’enfant l’objet à proprement parler de la fête. C’est particulièrement sensible lorsque disparaît toute adhésion à un sens religieux de la fête, ou dans les classes économiquement inférieures. « On peut alors parler d’une autocélébration du foyer en la personne de l’enfant »  à la fois fêtant et fêté ;

– beaucoup plus fréquemment, l’enfant apparaît non l’objet mais « le médiateur » de la fête : occasion pour l’adulte de s’identifier à lui, de rejoindre ainsi quelque part sa propre enfance et ses Noëls d’enfance, en regardant la cérémonie avec les yeux émerveillés de l’enfant. L’identification à l’enfant revêt, pour F.A. Isambert, un rôle essentiel dans la structure de la fête. « En ce sens, Noël est fête de l’enfance, autant et peut-être plus que de l’enfant » .

Au centre, le cadeau

La ritualité de Noël peut s’interpréter comme la mise en scène du don du ciel. Le thème de la dépense, et d’une dépense sans calcul, sans mesure, n’y est pas étranger. Au coeur de la dépense, le cadeau, qui est l’acte « central de la fête » . Mais un cadeau marqué d’un certain anonymat – il n’est pas donné, mais déposé et trouvé -qui masque l’identité réelle du donateur, et renvoie à une origine mystérieuse, fictivement surnaturelle. « Le cadeau est alors plus que le cadeau, il est cette merveilleuse abondance gratuite exceptionnellement offerte » . Au travers de cette mise en scène du cadeau se donne en représentation une Générosité protectrice, qui étend ses largesses à chacun, « divinité d’une classe d’âge », à laquelle, certes, les adultes ne croient plus, mais feignent encore de croire en s’identifiant au regard émerveillé des enfants. Le Père Noël apparaît, dans cette perspective, comme le donateur légendaire, qui préserve cette origine céleste du cadeau et lui confère une « apparence féerique ». F.A. Isambert développe l’hypothèse de variations autour du thème du don, où la crèche joue un rôle majeur. La crèche est mise en relation du ciel et de la terre, équivalence du don et du contre don ; l’Enfant y apparaît à la fois donné et donnant. À partir de cette mise en scène initiale, et par toute une série de transformations successives, l’enfant de la famille va être substitué à l’Enfant Jésus, celui-ci devenant le Donateur, bientôt relayé dans ce rôle par le Père Noël ; enfin l’arbre, symbole d’abondance et lui-même figure des liens entre le ciel (l’étoile !) et la terre, peut prendre la place du Père Noël. Le symbolisme de l’arbre n’est donc pas sans lien avec celui de la crèche : la figuration a changé, mais la thématique centrale du don, et de sa source céleste, demeure.
Ainsi, dans cette théâtralité de Noël se combinent étroitement le jeu, le rêve et la croyance. « Tout est théâtral dans Noël, depuis le petit théâtre de la crèche jusqu’à l’apparition de l’arbre, toutes autres lumières éteintes… Le ciel étoilé pénètre dans la pièce où le sapin s’illumine ; l’intimité se concentre au pied de l’arbre de lumière, cependant que le plafond et les murs oubliés laissent s’échapper l’imagination aux extrémités du monde pacifié. Alors l’enfant prête ses yeux et le cadeau devient merveille, profusion inépuisable. Le rêve s’est fait chair » .

Noël, synthèse des contraires

A ce rituel domestique, orienté sur l’enfant, s’oppose la célébration liturgique, centrée sur l’incarnation, dévoilement de Dieu dans la faiblesse de l’homme Jésus. Deux systèmes de signification entrent ainsi en tension :

– l’un tourné vers le symbolisme familial, et le repli de chacun sur sa propre enfance ; intériorisation et intimisation de la fête;

– l’autre, enraciné dans la théologie de l’incarnation, critique à l’égard de tout le « folklore », porteur d’une dimension d’universalité, de présence aux hommes, d’une promesse de recréation des rapports humains en Christ. Les deux systèmes s’opposent, mais dans la pratique ils se combinent plus qu’ils ne s’excluent ; Le Noël vécu se situe dans cette bipolarité : entre l’intime et l’universel, entre le resserrement des liens du foyer et la transgression des barrières entre les hommes, entre le « redevenir comme un enfant » et la vision d’une humanité réconciliée. Noël, synthèse des contraires. Aux « rapports d’une société concurrentielle » se substitue, l’espace d’une nuit, l’image d’une pleine réconciliation, tant avec les autres qu’avec soi-même, qui atteint à l’universel. Noël se donne ainsi, dans l’imaginaire de la fête, comme une « eschatologie rêvée ».

Car cette synthèse des extrêmes ne peut se vivre que dans le cadre de la religion ou sur le mode du merveilleux. C’est pourquoi, surtout en l’absence d’un dépassement d’ordre religieux, l’assimilation à l’enfant joue un rôle si important, l’enfant étant la figure idéale qui médiatise les divers plans de la fête et qui autorise ce « faire comme si », ce jeu de la fiction.

Ainsi se comprend cette combinaison du mystère, de la légende et du merveilleux, propre à la fête de Noël. La tonalité mystique, liée à la référence religieuse, se conjugue avec la coloration esthétique qu’exhale l’enchantement de Noël. « Tout nous porte à penser, conclut de son enquête F.A. Isambert, que c’est par la voie du merveilleux que s’actualisent à Noël les autres degrés de la croyance qui, par là même, s’imprègnent de merveilleux » .

En dévoilant ce jeu subtil de la croyance, de la fiction et du rêve dans la représentation de Noël, l’apport du sociologue – auquel cette brève note voudrait renvoyer – ne manque pas de nous interroger dans notre souci d’interpréter aujourd’hui l’évangile.

Comment la célébration de Noël va-t-elle rencontrer et déjouer à la fois une religiosité aussi complexe ? Si la fête de Noël représente cet « univers onirique » , qu’est-ce que rendre compte dans ce contexte de l’événement « Emmanuel » ? À quelles conditions la prédication peut-elle éviter le piège de l’enchantement, d’une modulation religieuse de la fiction, pour attester non le rêve, mais la Parole faite chair ?

Source: Point KT 1987/4 – Gérard DELTEIL – Le jeu symbolique de Noël – Études Théologiques et Religieuses

Noël se fait attendre !

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Et si Noël se faisait attendre ?

Bien trop souvent nous squizzons le temps. Adeptes du zapping, d’internet, le monde et le temps ont d’autres limites. On apprécie, on en profite et on apprend d’autres normes, d’autres facteurs espace/temps . Sans aucun doute nos mentalités vont évoluer, changer, s’adapter.

Mais les vielles traditions sont souvent pétries d’une sagesse nécessaire autant à notre équilibre qu’à celui de notre évolution.

Sans trop savoir pourquoi, nous les choyons, nous les préservons de toute expulsion trop hâtive et régulièrement nous les dépoussiérons.

Avec « Noël qui se fait attendre » c’est aussi le cas !

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J’ai compulsé un bon nombre de matériel, autant pédagogique  que liturgie et bien sûr biblique : Noël se prépare ! On ne peut arriver dans cet événement comme cela, simplement, en y sautant les deux pieds joints.

Sinon Noël en perdrait, et toute sa saveur, et surtout toute sa théologie.

Dans les matériels feuilletés de ci, de là, j’ai trouvé les termes suivants : préparer, se mettre en chemin,  voir joindre la lumière, préparer la route, avancer pas à pas…

Les thématiques bibliques du Temps de l’avent ont ce même et nécessaire souci : l’attente de l’événement est aussi importante que l’événement en soi, elle est la gestation, elle nourrit l’événement elle le prépare et lui donne son sens.

Quelques rites habitent cet espace de l’attente. Pour Noël, la plus croustillante de ces coutumes est la préparation des gâteaux de Noël, préparations dont bon nombre de nos régions culinaires excellent.
Ensuite, le calendrier habituel se déclinera en calendrier de l’avent, et déjà pour l’enfant qui découvre ce chemin journalier imagé c’est toute une progression théologique et pédagogique qui émerge.

La couronne de l’Avent est une autre déclinaison du temps de l’attente. Les quatre dimanches d’avant-Noël sont représentés par les quatre bougies. La forme circulaire de la couronne de feuillage (de préférence du sapin, signe de l’immortalité) caractérise le cycle perpétuel du temps et informe de l’alliance à venir.

Pour que Noël se fasse attendre, n’hésitez pas à utiliser l’un ou l’autre de ces outils, inventez en d’autres mais surtout laissez « le temps au temps »puisqu’il s’agit bien de gestation, de promesse, d’espérance, en somme les ingrédients de la Vie.