Point KT

Naaman le grand général !

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D’après II Rois 5/1 à 19a – Deuxième partie (II Rois 5/4-12)  – Première partie de cette narration : Une petite esclave se souvient cliquer ici

Avec Naaman, nous nous trouvons en présence d’un vrai général, d’un grand général, pas un général d’apparat, un général qui  fait peur à l’ennemi, oui ! Naaman a fait plusieurs fois la guerre et l’a gagnée. Notre petite fille en a fait l’expérience… Naaman est le bras droit du roi de Syrie, un héros qui possède la gloire, la richesse, les honneurs.

Mais,… car dans la vie, il y a souvent un mais… même dans celle des grands de ce monde, des gens importants ; ils ne sont pas à l’abri de l’épreuve et de la maladie… Cet homme vaillant est en effet marqué par la contradiction du pouvoir et de l’impuissance : talentueux chef de guerre, Naaman est lépreux.
La lèpre est une horrible maladie. Peut-être ne le savez-vous pas, mais elle ronge le corps, enlève toute beauté. Progressivement, elle ampute le malade, lui enlève son identité, détruit son humanité et précipite sa mort. Dans l’antiquité, à quelques exceptions près, elle équivalait à une condamnation à mort.

Considérée comme une malédiction de Dieu, elle excluait celui qui en était atteint de la communauté humaine (voir Lévitique 13, 45-46). Toute personne lépreuse était impure, n’était plus apte aux relations avec Dieu et avec les autres. Les lépreux étaient mis au ban de la société, ils devaient se tenir à l’écart ; ils étaient même chassés de leur famille, ils quittaient leur maison et se terraient à l’écart de tout et de tous souvent dans des grottes et dans le désert. S’ils se déplaçaient, ils devaient se signaler de loin en agitant une clochette et en criant : « impur !…impur ! » Pour avertir les passants de ne pas s’approcher trop prêt car ils risquaient d’être contaminés.
Aujourd’hui encore, cette maladie existe et je vous rassure, si les soins sont donnés assez vite, les malades ne sont pas défigurés…

Mais au temps de Naaman : pas de médicament ! Faucheuse d’espérance, la lèpre allait conduire Naaman, le grand, le beau général en grand uniforme avec son casque rutilant, sa grande cape rouge… à n’être plus qu’une ombre, un spectre, un fantôme….Un mort vivant !
Ah ! Quand on est mal dans sa peau ou que la mort menace, on est prêt à tout. Y aurait-il par miracle une toute petite chance de guérison ? Naaman et sa femme la guettent. Dès qu’il apprend que le prophète qui est à Samarie pourrait le guérir de sa lèpre, Naaman se dit : « Vite, vite, s’il y a la moindre chance que je puisse être guéri, avant que je sois défiguré et que tout le monde me fuit, il faut que j’essaie ! »
Sa situation exceptionnelle – n’oublions pas que Naaman est le bras droit du roi de Syrie – va l’aider à mettre toutes les chances de son côté. Tout d’abord, il ne peut pas se promener comme un simple citoyen surtout pas à l’étranger, encore moins dans le pays qu’il a vaincu.
Naaman sort, il va trouver son roi pour lui rapporter les paroles de la petite captive et lui demander l’autorisation de se rendre en Israël.
Le roi d’Aram n’hésite pas :  » Si ce que t’a dit cette petite fille d’Israël est vrai, va, rends-toi à Samarie la capitale d’Israël. Je vais te donner une lettre de recommandation pour le roi d’Israël. Je suis sûr qu’ainsi tu seras reçu comme un personnage officiel avec les honneurs dûs à ton rang.  »

Chez ces gens là, on aime communiquer par lettres, par missives  et pas dans le genre petits mots doux, mais plutôt dans le genre comminatoire : des lettres qui prennent la forme d’ordre que donne un suzerain à son vassal !

Naaman se fait introduire dans le palais, chez le roi d’Israël et lui tend la brève lettre de recommandation du roi de Syrie :  » Maintenant, quand cette lettre te sera parvenue, tu sauras que je t’envoie mon général Naaman, que j’aime beaucoup, afin que tu le guérisses de sa lèpre. » Point !
Après deux longues journées, lorsque le cortège entre dans Samarie, il offre un spectacle impressionnant… Le petit peuple de Samarie n’en croit pas ses yeux ; les gens d’Israël sont surpris et inquiets…
La fillette les regarde s’éloigner… Comme elle aurait envie de les suivre… de revoir sa famille, de revoir son pays  !
Quand au petit matin, la caravane imposante se met lentement en route, et quitte la Syrie pour rejoindre les lointaines collines de Galilée… ce n’est pas cette fois, une horde de soldats avides de combattre qui s’avance mais les serviteurs, les gardes du corps, les amis de Naaman.Le roi de Syrie écrit donc une lettre sur le ton d’un chef à son sous-fifre.
Puis, il roule la lettre, la scelle de son sceau avec la bague qu’il porte à son doigt et la tend à son fidèle général.
Naaman reconnaissant se retire il va préparer ses bagages avec soin.
Il faut mettre toutes les chances de son côté et même payer cher : l’argent sera son meilleur allié pense-t-il ! C’est le nerf de la guerre dit-on. Il emporte avec lui une fortune : dix talents d’argent (342 kg) et six mille sicles d’or (68 kg).
Il s’équipe de dix riches tenues de rechange : un général, même malade doit toujours tenir son rang et avoir une présentation impeccable.
Pour le protéger lui et tout ce qu’il transporte, une escorte de soldats l’accompagnera.
Naaman imagine facilement ce qui va se passer lorsqu’il sera en présence du prophète de Dieu. Dans son pays, pour guérir les malades, les prêtres exorcistes invoquent les dieux du ciel et de la terre, récitent des incantations, utilisent les eaux guérisseuses, frottent la partie malade ! Naaman (v.17) s’attend à une cérémonie de guérison « classique ».
Étant donné son rang social, il sera bien soigné… Le prestige de l’uniforme…l’argent et l’or sont vraiment pour lui SA CHANCE ?

En lisant cela, le roi d’Israël, est bouleversé, effondré. Quelle demande !
Pour montrer à quel point il est troublé le roi déchire ses vêtements et crie :
« Suis-je Dieu, moi, ai-je le pouvoir de faire mourir et de faire vivre ? Le roi de Syrie cherche une occasion de dispute avec moi. » Autrement dit : Je suis roi moi et non médecin ou guérisseur.

Ô roi d’Israël, tu as oublié ce qu’une petite fille de ton pays, arrachée à l’affection de ses parents, emmenée de force en Syrie… ce qu’une petite servante garde dans son cœur comme le plus précieux des trésors. Roi d’Israël cette lettre n’est pas le fruit d’une machination du roi de Syrie, même si les rois de Damas en Syrie sont de dangereux ennemis pour toi roi d’Israël. Non ! Cette lettre est l’expression d’une lueur d’espoir. Le roi païen espère que le prophète du Dieu Vivant, que tu dis adorer, guérira son grand général, le délivrera de la lèpre  (v 3, 6 et 7).
Et toi, tu es désemparé, tu déchires tes vêtements, en signe de détresse tu ne sais plus, tu oublies qu’il existe un homme de Dieu : Élisée qui réside pourtant dans la même ville que toi !
… Heureusement, dans ton palais quelqu’un va vite rapporter ton attitude à Élisée…
Lorsqu’Élisée, homme de Dieu, apprend que le roi d’Israël a déchiré ses vêtements, il lui envoie un messager qui part en courant. Essoufflé, il arrive au palais et rapporte au roi les paroles d’Élisée : « Pourquoi es-tu si bouleversé, pourquoi as-tu déchiré tes vêtements ? Laisse donc Naaman venir vers moi et qu’il sache, lui, qu’il y a un Dieu Vivant en Israël… »
Le roi d’Israël, souhaite vraiment la guérison du général, ne serait-ce que pour éviter une nouvelle confrontation armée avec son belliqueux voisin du nord. Malgré ses doutes, malgré son inquiétude, il n’hésite pas un instant pour indiquer le chemin qui conduira Naaman jusqu’à la maison d’Élisée.
Ouf ! Quel soulagement pour lui quand il voit la riche caravane s’éloigner du palais en suivant le messager d’Élisée. L’homme précède les somptueux équipages et les conduit à travers les rues étroites de la ville, jusque sur la colline couverte d’oliviers au feuillage argenté, jusqu’à la petite maison d’Élisée.

Naaman s’arrête devant la porte de la maison. Il immobilise ses chevaux et son char. Imaginez ce spectacle inhabituel que l’homme de Dieu, je le soupçonne, détaille avec curiosité… sans se faire voir…
Ce débordement de puissance, le cliquetis des armes et les chevaux contraints à l’immobilité, qui piaffent d’impatience, ne l’impressionnent pas. Élisée ne manifeste aucun empressement envers le grand personnage étranger et toute sa suite… il le fait même attendre… Devant cette démonstration de richesse Élisée ne fléchit pas.
Ne devrait-il pas se déplacer en personne ? Face à la demande de guérison, Élisée se déroberait-il ? Non ! Il tient le Syrien à distance. Pourtant, les précautions sanitaires les plus sévères n’interdisaient quand même pas de parler à un lépreux… Mais Élisée n’est pas homme à se laisser manipuler par les apparences.
Qui donc est ce prophète pour ignorer à ce point les lois sacrées de l’hospitalité, et les usages les plus élémentaires du protocole ? Pour Dieu, Élisée le sait, il n’y a pas de différence, il n’y a plus ni Juif, ni Syrien, il n’y a plus ni esclave, ni libre, il n’y a plus ni homme, ni femme ; car tous sont égaux aux yeux de Dieu. Qui donc est ce prophète qui, malgré le long voyage du dignitaire, le fait attendre devant sa porte ?

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Crédit –  Nicole VERNET- Point KT