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Quand il faut rendre des comptes à Dieu

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Siméon a un problème. Alors, comme à chaque fois, il va voir son grand-père qui habite la maison de retraite à côté de chez lui. Voici un conte pour évoquer le passage de Luc 14, 15-23, la parabole des invités au festin.Il le trouve dans le jardin, en train de donner à boire au rosier qui embaume l’air de cette fin d’après-midi.

– « Bonjour grand-père ! »
– « Bonjour Siméon. Alors, ça s’est bien passé à l’école ? »
– « Oui, mais, grand-père, j’ai une question à te poser :
A l’école, Siegfried m’a dit que quand on est mort, on se retrouve devant Dieu et que Dieu compte ce qu’on a fait de bien dans notre vie.
Mais, à ce qu’il paraît, il compte aussi ce qu’on a fait de mal.

Siegfried m’a dit que si on a fait plus de choses bien, on va dans un endroit super chouette qui s’appelle « paradis » et dans lequel il y a, je crois, des chocolats, des bonbons, et pleins de trucs comme ça.

Mais si on fait plus de vilaines choses, alors on va dans un endroit qui s’appelle « l’enfer », avec plein de flammes, et là pas de chocolat parce qu’il est tout fondu, et au contraire, on a une punition qui ne s’arrête jamais, jamais.

Dis, grand-père, moi il me fait peur Dieu.
C’est vrai ce qu’il a dit Siegfried ? »

Le grand-père de Siméon se met alors à rire et lui dit :
– « Oui, je comprends qu’un dieu comme ça, ça te fasse peur et que tu te poses des questions.
Mais il n’y a pas que toi qui te poses des questions.
Est-ce que tu sais qui était Luther ? »

– « Oui, c’est celui qui a inventé le protestantisme ! »
– « C’est tout à fait ça !
Et Luther a eu lui aussi peur du paradis et de l’enfer.
Alors il a relu la Bible et il s’est aperçu que le paradis et l’enfer, c’est pas tout à fait ce qu’on s’imagine.

Assieds-toi là, je vais te raconter une petite histoire. Mon histoire commence dans un pays tout gris. Un pays gris à cause de la fumée qui s’échappe des voitures, des machines et des usines. Un pays gris dans lequel les gens ne pensent qu’à gagner plus d’argent, acheter des machines et aller de plus en plus vite. Ils veulent aller plus vite, pour gagner plus d’argent et acheter des machines ! Et ils veulent acheter des machines pour aller plus vite et gagner plus d’argent ! Ils ne pensent qu’à ça et ils ne font que ça. Si bien qu’ils n’ont pas même le temps de s’arrêter pour se parler. Ils courent d’un côté et d’un autre pour gagner toujours plus d’argent, acheter des machines et aller plus vite. Et comme pour travailler et pour acheter des machines, ils sont bien obligés, quand même, de se parler, pour perdre le moins de temps possible, ils se sont tous fait greffer un téléphone avec une caméra dans la paume de la main. S’ils veulent parler à quelqu’un, même s’il est à côté d’eux, ils regardent le petit écran qui est dans leur main.C’est bien plus pratique, et ça va beaucoup plus vite ! Et c’est pourquoi toute la journée les gens de ce pays se promènent comme ça (mimer la main devant la figure) dans la rue, au travail, à la maison… Mais bien sûr, puisqu’ils ne se parlent que par téléphone, s’ils n’ont pas le numéro de quelqu’un, ils ne peuvent pas lui parler. Donc dans ce pays, les gens ne parlent pas à ceux qu’ils ne connaissent pas ! Et comme ils veulent perdre le moins de temps possible, ils inventent des tas de machines qui polluent, mais qui permettent d’aller plus vite encore :  Imagine-toi, en ville, des trottoirs qui sont, en fait, des tapis roulants qui vont à 100 Km/h. Bien sûr, pour monter sur un trottoir comme celui-là, il faut courir très vite. Ceux qui ne vont pas assez vite peuvent être éjectés et finir : infirmes, aveugles ou boiteux ! Je ne sais pas, dit le grand-père, si toi, tu aimerais vivre dans un pays comme celui-là ?
– (réponse de l’assemblée) Non ! ! !

Mais figure-toi que dans ce pays gris, il y a un roi. Un roi triste de voir son pays aussi triste. Un pays qui ressemble à un « enfer ». Le roi voudrait bien convaincre les gens de prendre un peu de temps, un peu de temps pour se parler et faire connaissance ; un peu de temps pour s’occuper de leurs enfants ; un peu de temps pour regarder autour d’eux et pour voir combien la nature est belle. Mais le roi est bien malheureux parce qu’il ne sait pas comment s’y prendre.

Lorsqu’un matin, tout à coup, il a une idée : – « Je sais ce que je vais faire, dit le roi, pour rendre les gens heureux ! Je vais organiser une grande fête qui va durer toute une journée et je vais inviter tout le monde. Comme ça, ils seront obligés de s’arrêter de courir partout. Et pour qu’ils puissent se parler et faire connaissance, je vais demander à tous les invités de mettre des gants de soirée. »

Les premiers que le roi invite à sa grande fête, ce sont bien sûr les chefs, ceux qui disent à tout le monde : – « Il faut gagner plus d’argent, il faut construire des machines, il faut aller plus vite ! ».

Les serviteurs du roi les invitent à la fête en prenant soin d’ajouter : « Venez maintenant, car tout est prêt ».

Mais voilà : ça ne se passe pas comme le roi l’avait prévu.

Un chef répond : « Une fête, oh, j’aurais bien voulu venir. Mais je ne peux pas, aujourd’hui j’ai une banque à racheter ! »

Un autre dit : « Merci bien, mais je viens de m’acheter une très grosse voiture, une 10 bœufs, qui va super vite et je dois aller l’essayer ! ».

Un autre répond : « Une fête ? Pourquoi faire ? Quelle perte de temps ! Et qui va gagner plus d’argent pendant que je ferai la fête ? Non, quelle drôle d’idée ! ».

Aucun chef ne veut venir à la fête préparée par le roi !

Alors, le roi est très déçu.

Il se tourne vers ses serviteurs et leur dit :

– « Allez sur les places et dans les rues, et amenez à ma fête tous ceux que vous rencontrerez, à commencer par : les pauvres, les infirmes, les aveugles et les boiteux. Allez par les routes et les parkings, et obligez les à entrer. »

Alors les serviteurs vont sur les places et dans les rues ; par les routes et les parkings, pour inviter tout le monde à la fête du roi. Ils téléphonent à tout le monde pour leur dire : « Venez maintenant, car tout est prêt ».
Les gens entendent cet appel. Ils sont très étonnés ! Mais, un peu obligés, un peu intrigués, ils arrivent très nombreux devant le palais (mimer la main devant la figure). A l’entrée, chacun, chacune reçoit des gants de soirée. Et comme le palais n’est pas assez grand, la fête se déroule dans le jardin. Là, dans le jardin, devant les buffets qui ont été préparés pour eux, avec beaucoup de bonbons et de chocolats,
les invités sont bien obligés de s’arrêter de courir, et à cause des gants, ils sont bien obligés de se regarder pour se parler (mimer la main qui descend en révélant le visage). Certains prennent même le temps de regarder le jardin pour voir comme la nature est belle !

« Sais-tu, Siméon, ce que veut dire le mot paradis ? »

– (Assemblée) « Non ! »

– « Paradis, ça veut dire jardin ! »
–  « Dis, comment tu sais tout ça grand-père ? ».

– « Je le sais tout simplement parce que c’est écrit dans la Bible. Par exemple, dans l’évangile de Luc, au chapitre 14, Jésus raconte une histoire qui ressemble bcp à celle que je viens de te raconter :
« 15 ¶  Quelqu’un dit à Jésus : « Il est heureux, celui qui prendra son repas dans le Royaume de Dieu ! (donc dans le paradis)»
16  Jésus lui répond par cette histoire (lui aussi, il aime bien raconter des histoires) : « Un homme prépare un grand repas et il invite beaucoup de monde.
17  À l’heure du repas, il envoie son serviteur dire aux invités : “Venez maintenant, car tout est prêt !”
18  Mais tous les invités, l’un après l’autre, se mettent à s’excuser. Le premier dit au serviteur : “Je viens d’acheter un champ et je dois aller le voir. Je t’en prie, excuse–moi.”
19  Un autre dit : “Je viens d’acheter cinq paires de bœufs et je vais les essayer. Je t’en prie, excuse–moi.”
20  Un autre dit : “Je viens de me marier, c’est pourquoi je ne peux pas venir.”
21  Le serviteur revient chez son maître et il lui raconte tout cela. Alors le maître de maison se met en colère et il dit à son serviteur : “Va vite sur les places et dans les rues de la ville, et amène ici les pauvres, les infirmes, les aveugles et les boiteux.”
22  Après un moment, le serviteur vient dire : “Maître, on a fait ce que tu as commandé, et il y a encore de la place.”
23  Le maître dit au serviteur : “Va sur les chemins et près des champs. Ceux que tu rencontreras, oblige–les à entrer chez moi. Ainsi, ma maison sera pleine. »

–  «  Alors tu vois, Siméon, quand demain tu retrouveras Siegfried, tu pourras le rassurer lui aussi : le paradis et l’enfer, c’est pas tellement après la mort que ça se passe.
C’est surtout ici et maintenant ! »

– « Oui, j’ai compris grand-père : l’enfer, c’est quand on marche dans la rue sans voir les autres.
Et le paradis, c’est de venir te voir, dans ce jardin ! »
Amen !