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Témoignage de Marylène : enfants de Palestine et enfants d’Israël

Voici un témoignage d’effort de paix rapporté par Marylène, 90 ans. Marylène est une femme protestante française qui a plus de 90 ans aujourd’hui. Elle vit en Palestine depuis 1967. Elle y a fait du travail social avec des enfants et des adolescents et continue à passer trois matinées par semaine à faire des jeux avec des enfants qui passent la journée dans un camp de vacances en Palestine, à rencontrer leurs parents aussi… Elle se soucie également beaucoup de l’environnement et de l’avenir de notre planète. Foncièrement non violente, elle a participé à bien des actions au cours de sa vie, et vient d’envoyer à quelques-uns de ses amis le message ci-dessous. Si vous pouvez le partager avec d’autres, ce sera tant mieux. « On fait ce qu’on peut », comme dirait Marylène, « l’important c’est d’être utile aussi longtemps que possible ».

Station-service ou oasis de paix ?

N’ayant plus de voiture, les stations-service sont pour moi inutiles. Sauf une à quelques kms au sud-ouest de Bethlehem. Je l’ai souvent visitée avec des amis et connaissances, ou seule.

En repartant quelqu’un disait : Cela fait du bien de savoir qu’il existe dans ce pays une oasis de paix.

Pour moi et beaucoup d’autres qui ont quelques fois tendance a désespérer des problèmes quotidiens, cet endroit est une station-service d’où on repart avec une lueur d’espoir et l’énergie qu’il nous faut pour ne pas baisser les bras et croire qu’un autre monde est possible. A l’entrée de cette colline est écrit en 3 langues : « Nous refusons d’être ennemis ». L’histoire de cette colline est trop longue et compliquée pour être racontée en détail. J’essayerai d’écrire l’essentiel.

Le grand-père de l’actuelle famille qui en est propriétaire avait acheté cette colline aride en 1916. La vente a été enregistrée par les autorités turques. A présent on appelle cette colline « Tent of Nations » (la tente des nations) parce que la famille a décidé que d’autres pourront profiter du bon air, de la belle vue et d’une nature encore plus ou moins intacte, ou d’un beau coucher du soleil. Pendant les vacances scolaires, des camps étaient organisés pour des enfants des villages et des camps de réfugiés des alentours. Des visiteurs et des bénévoles peuvent être logés sous tentes ou dans des grottes naturelles, qui permettent aussi à la famille de rester sur place. L’eau de pluie alimente des citernes, et grâce aux panneaux solaires ils ont l’électricité. Pour ceux qui aiment la vie simple, c’est un endroit idéal.

Malheureusement cette famille a d’autres problèmes, car quelques implantations israéliennes avoisinantes réclament cette colline. Malgré les documents valides d’achat, un procès, qui dure depuis plus de 30 ans, est toujours en cours. Mais si les autorités compétentes croient que cette famille va abandonner ses droits et quitter leur colline, elles se trompent.

Pour les faire partir « volontairement », on leur rend la vie quotidienne difficile. Ils plantent et d’autres arrachent. Il y a quelques années une plantation d’arbres fruitiers a été détruite par les bulldozers de l’armée israélienne. Le 21 mai 2021 un incendie a détruit des terrasses de la colline. Le propriétaire disait qu’il ne pouvait accuser personne puisque personne n’avait vu ceux qui avaient mis le feu.

Le 9 juin, des hommes masqués accompagnés et protégé par l’armée sont venus scier sur une terrasse une soixantaine d’arbres qui avaient survécu au désastre, et vingt-cinq sur le terrain d’un voisin. Un travail de 10 ans anéanti ! Peut-on se taire quand on sait que chaque arbre est important dans la lutte contre le changement climatique qui menace la planète et les générations futures ?

Que faire ? – Informer ceux qui sont indifférents, alerter les organisations qui se soucient de l’environnement. Demander aux politiciens d’intervenir, que sais-je ?

S’il n’y a pas de réaction quand des terrasses vertes de 42 hectares redeviennent désertiques, la désertification continuera à faire son œuvre.

Si le gouvernement élu démocratiquement protège des extrémistes et leur permet de faire des actes de ce genre, ces extrémistes devenus des terroristes continueront à agir, c’est-à-dire à harceler leurs voisins arabes pour les faire partir, abandonner leur droit légitime à vivre sur leurs terres, et pour qu’ils abandonnent aussi leur devise « Nous refusons d’être ennemis ». Malheureusement beaucoup d’Israéliens et beaucoup de ceux qui se disent amis d’Israël ne demandent pas à savoir ce qui se passe dans la Palestine occupée.

Que pouvons-nous faire sinon essayer d’informer ceux qui ne veulent pas savoir, informer aussi les groupes et des individuels qui luttent contre le changement climatique, et bien sûr ceux qui désirent que leurs enfants et petits-enfants puissent vivre dans un monde moins pollué, un monde dans lequel Paix, Shalom et Salam sera une réalité ?

Je demande à Dieu qu’Il nous donne le courage, la sagesse et les moyens de faire ce que nous croyons être notre devoir. Et qu’Il ne nous prive pas de cette lueur d’espoir dont nous avons besoin pour agir, même si nous ne savons pas si nos cris d’alarme seront entendus.

A vous tous je souhaite de connaître quelqu’un qui sera comme une station-service où trouver cette lueur d’espoir qui vous donne l’énergie d’agir selon vos moyens.

Merci pour votre amitié et merci de partager mes soucis et ma vision d’un monde différent.

Marylène, le 6 juillet 2021.

Pleurez, arbres de Palestine.

Figuiers, pins et cyprès, citronniers, grenadiers et vous oliviers centenaires,

Pleurez sur ceux qui ont travaillé la terre,

sur ceux qui vous ont plantés dans l’espoir qu’eux ou leurs enfants récolteront les fruits.

Pleurez, amandiers et vignes,

sur ceux qui n’ont plus de larmes pour pleurer leurs vergers expropriés,

leurs terres dévastées, les fruits de leur travail anéantis.

Pleurez sur ceux qui n’ont plus de paroles pour dire leur amertume,

sur ceux qui ne peuvent plus croire à la justice, à la compassion, à un avenir meilleur.

Pleurez sur les indifférents qui laissent faire et qui détournent leurs regards pour ne pas voir, ne pas savoir ce qui est fait à ce pays, à cette terre et à ceux qui y vivent.

Arbres de Palestine, réjouissez-vous de ceux qui plantent là où d’autres ont déraciné, scié, brûlé, arraché ;

réjouissez-vous de ceux qui sèment l’espoir là où germe la haine,

de ceux qui croient que la vie est plus forte que la mort et qui agissent dans ce sens.

Pleurez, arbres de Palestine, sur ces figuiers, pins, citronniers et amandiers arrachés, déracinés, brûlés.

Mais pleurez surtout sur ceux qui l’ont fait et qui continuent de le faire,

pleurez sur eux, car ils ne savent pas ce qu’ils font.

Marylène Schultz