A l’occasion de la Pentecôte 2023, le pasteur Eric George (EPUdF) a proposé une liturgie d’anamnèse du baptême et de profession de foi, afin d’éviter l’utilisation du mot « confirmation » qui prête à confusion. Dans cet article, publié initialement sur son blog, il explique les raisons de son choix. Vous trouverez en-dessous la liturgie qu’il a construite.
Pourquoi ne pas parler de confirmation ?
Parce que le baptême est important, parce que les mots ont un sens, je reste réticent à l’emplois du terme « confirmation ». Une explication…
Lors de la Pentecôte 1985 (?), avec quelques copains, nous recevions une gifle de l’évêque de Nancy pour notre confirmation (pour mes lectrices et lecteurs qui l’ignoreraient, j’ai grandi et découvert Jésus Christ dans l’Eglise catholique). On nous avait parlé lors de la préparation d’un « Sacrement de l’Esprit ». Je n’y avais rien compris. Mais je savais que malgré mon milliard de questions et de refus, je croyais et que cette foi était importante pour moi.
Une douzaine d’années plus tard, je suis pasteur de l’Eglise réformée de France. Ma confirmation a été une étape positive de ce chemin mais je suis toujours un peu embarrassé pour expliquer, pour parler de ce temps aux jeunes. Pourquoi ce mot ? Qu’est-ce qu’on confirme au juste ? Et, au cours d’une discussion, un prêtre me dit qu’à la base, la confirmation, c’est la confirmation par l’évêque du baptême célébré par les prêtres, ses auxiliaires. Et enfin, la confirmation prend tout son sens. Dans l’Eglise catholique romaine. Mais moi, pasteur de l’Eglise réformée de France (à l’époque), je bascule du malaise à l’opposition franche au terme de confirmation.
D’abord au nom de l’importance que j’attache au baptême. Le baptême d’un enfant ou d’un adulte est proclamation que l’amour de Dieu nous précède toujours. « Quoi que tu fasses, quoi que tu aies, quelle que soit ton histoire, tu es aimé de Dieu ». Cette affirmation n’a pas besoin d’être confirmée. En baptisant, l’Eglise obéit à un ordre qui la dépasse. Je ne vois pas très bien quel besoin elle aurait de confirmer, de renforcer ce geste. Mon principal reproche envers ce terme de confirmation c’est qu’en sous-entendant que le baptême doit être confirmé, il en amoindrit la puissance.
On me rétorque parfois qu’à la confirmation, on confirme les engagements pris lors du baptême… Mais d’une part, je rends grâce chaque jour que l’amour de Dieu pour moi ne dépende pas de la tenue de mes engagements… Et puis, dans nos liturgies, on demande aux parents de s’engager à prier pour leur enfant, à lui parler de son baptême. Je n’ai jamais entendu demander à un confirmand si ses parents ou son Eglise avaient bien fait le boulot…
On me reprochera de pinailler sur les termes. C’est sans doute là mon moindre défaut, mais je trouve dangereux et dommage d’utiliser un terme, juste parce que c’est ce mot-là qu’on a toujours employé, sans réfléchir à ce qu’il induit. Dangereux parce qu’aujourd’hui, l’absence de confirmation vaut généralement annulation. Sans confirmation de la SNCF, je peux légitimement me demander si mon train partira… Sans confirmation, mon baptême reste-t-il valide ? Et je trouve dommage de nourrir, chez les jeunes, l’idée que les mots de l’Eglise ne veulent rien dire.
Bien sûr, je crois important de marquer une étape d’un parcours de foi, de signifier publiquement aux jeunes qu’à la fin d’un parcours de caté, ils prennent une place différente dans l’Eglise et de les encourager à témoigner devant elle de leur foi, de leur espérance, de leur questionnement. Mais quitte à puiser dans un vocabulaire partagé avec l’Eglise catholique, je préférerais qu’on prenne une expression qui a un sens et que l’on parle de profession de foi.
J’ai bien conscience qu’avec cet article, je m’élance contre un moulin à vent. Mais la posture de Don Quichote n’est pas pour me déplaire. Et ces derniers temps, ce moulin à vent m’a paru prendre un peu plus d’importance.
Post scriptum :
Dans les discussions qui ont suivi la publication de cet article, on me fait remarquer que lors de la confirmation c’est Dieu qui confirme le chrétien dans l’alliance de son baptême.
J’entends volontiers et, en effet, il est bon de redire une parole qui a été adressée alors que le baptisé ne pouvait la comprendre.
Je persiste néanmoins à dire que le terme est mal choisi.
D’abord, ce qui se vit dans la plupart des paroisses que je connais est de l’ordre de la profession de foi : les jeunes témoignent de leur foi et de leur engagement devant l’assemblée. Et je trouve plutôt bien de leur donner la parole.
Ensuite, et surtout, le vocabulaire théologique offre un mot pour évoquer une mémoire active, un rappel qui rend présent : ce mot, c’est anamnèse. Oui, c’est plus jargoneux que confirmation, cela réclame plus d’explications mais au moins cela n’induit pas la notion d’un baptême qui serait à confirmer…
Proposition de liturgie
Une question de vocabulaire (glissée au début du culte, au moment de l’accueil par exemple)
Nous avons l’habitude dans notre Eglise de parler de confirmation, un mot que nous avons gardé de notre héritage catholique. Aujourd’hui, confirmer une parole, c’est la renforcer. Souvent même, tant qu’une parole n’a pas été confirmée, il vaut mieux ne pas en tenir compte… L’information n’a pas été confirmée… elle est incertaine… Vais-je aller à un rendez-vous médical s’il ne m’est pas confirmé ? Je peux mais je prends un risque… En période de grèves, puis-je compter sur mon train ou sur mon vol s’il n’a pas été confirmé ? Pas sûr… C’est à confirmer : c’est à prendre avec des pincettes…
Les baptêmes de NN… ne sont pas à confirmer, ils ne sont pas incertains. Même sans confirmation, la promesse de Dieu est sûre, elle n’est pas à prendre avec des pincettes, elle n’a même pas besoin de notre réponse.
C’est une habitude dans notre Eglise d’utiliser ce mot mais ce n’est pas une règle, il n’y a pas de décision synodale… Alors, comme je préfère utiliser des mots compliqués que d’utiliser des mots de la vie de tous les jours à contre sens, ce matin, je vais parler d’anamnèse (nous ferons vivre le souvenir du baptême, parce que nous, nous avons besoin qu’on nous redise les choses) et de profession de foi (nous entendrons NN… dire leur foi avec leurs mots), nous partagerons la cène avec eux.
Comme je l’ai dit, il n’y a pas de règle, moi je n’emploierai pas le terme de confirmation, mais vous, vous faites ce que vous voulez. Je vous demande juste de vous rappeler qu’un baptême non confirmé n’est pas moins valable qu’un baptême « confirmé ».
Anamnèse du baptême
NN… lorsque vous étiez enfants, vos parents ont demandé votre baptême. Avec le baptême, l’Église a affirmé le grand Oui que Dieu pose sur la vie de chacune et chacun d’entre vous.
Aujourd’hui, à votre demande, je vais, au nom de l’Eglise, redire ce Oui qui a été manifesté au moment de votre baptême, ce Oui que vous étiez trop petits pour comprendre, ce Oui qui précède même la demande de vos parents.
En effet si nous aimons Dieu c’est parce qu’il nous a aimé le premier.
Rappels individuels du baptême avec imposition des mains
NN, Dieu t’aime. Depuis ton enfance, il te bénit, il te garde, il fait route avec toi.
Verset personnalisé pour chacune et chacun.
Exhortation à l’assemblée
Frères et sœurs, lors de leurs baptêmes, l’Église a accueilli NN… Elle a témoigné que leurs places étaient marquées, elle a affirmé qu’ils resteraient toujours libres de s’éloigner de l’Eglise mais que, toujours, ils pourraient y revenir. Cette liberté et cette promesse nous les réaffirmons aujourd’hui ! Cette liberté, elle est aussi manifestée par NN… qui ont préféré attendre : qu’ils et elles sachent que nous nous réjouissons de la liberté qu’ils et elles manifestent, qu’ils et elles sachent également, et que nous en prenions conscience aussi, qu’ici, ils et elles ont toujours leur place.
Lors des baptêmes de NN…, l’Église a également affirmé son espérance : « Ce sera notre joie que chacun d’eux confesse un jour que Jésus Christ est le Seigneur ».
Frères et sœurs ce jour est venu. Tout à l’heure, avec leurs mots, NN… diront leur foi au Dieu de Jésus-Christ. Pour renouveler cet accueil, pour manifester votre joie, je vous invite à vous lever…
Frères et sœurs, en rappelant leurs baptêmes à NN…, en leur redisant ce Oui posé sur leur vie, nous nous rappelons notre propre baptême. Ce matin, nous accueillons joyeusement un frère et une sœur majeurs dans leur foi. Ils feront route avec nous sur ce chemin que Jésus ouvre pour nous.
Louange-Péché-Pardon (avec les textes choisis par les jeunes)
Professions de foi de chaque jeune
Confession de foi
XXX avec vos mots, vous avez dit votre foi. Vivre sa foi en Église, c’est poser ses mots à soi, c’est aussi accueillir les mots des autres. Avec l’Église rassemblée autour de vous, nous affirmons donc notre foi avec le Symbole des Apôtres
Célébration des baptêmes
Lectures biblique et prédication
Célébration de la cène
Bénédiction et envoi
Crédits : Eric George (EPUdF), PointKT, Image de Rusyena (Unsplash)