Point KT

Favoriser la croissance spirituelle des enfants

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Grandir, c’est une affaire de tous les instants. Grandir, ça dure toute la vie. On a toujours à apprendre, même quand on est grand

 Dès que l’enfant s’éveille à la vie !

Le temps de l’enfance est une période de croissance physique et intellectuelle. Une force interne pousse l’enfant à grandir, le projette en avant : la toise marque les centimètres en plus ; les vêtements et les chaussures deviennent trop petits. Et il y a toutes les nouvelles acquisitions comme la propreté, la marche, le langage …

A travers les réactions de ceux qui l’entourent, l’enfant découvre l’importance de chaque nouvelle étape. La joie, les regards fiers, les paroles encourageantes, les applaudissements exprimés stimulent l’enfant. Grandir pour un enfant, c’est tout un programme. Aider l’enfant à grandir pour être auteur et acteur de sa vie, c’est essayer de ne pas de ne pas faire à la place de l’enfant, mais susciter, encourager, accompagner leur processus de croissance.

Si certaines acquisitions sont visibles, d’autres le sont moins : l’éveil au sens du beau, du bien, voir l’éveil spirituel.

Toutefois dès que l’enfant s’éveille à la vie, il peut aussi s’éveiller à la foi. Pour que l’enfant puisse accéder à son potentiel spirituel, il doit pouvoir grandir dans un espace signifiant, des lieux où la foi s’exprime ou se vit, qui lui permette d’interagir avec la Bible, de jouer, d’apprendre, d’avoir du plaisir, d’être immergé dans une atmosphère aimante, sécurisante, de prière, de spiritualité.

Quelques repères pour ceux qui accompagnent les enfants

Pour favoriser une rencontre entre l’enfant et le message biblique, entre l’enfant et Dieu, il nous incombe de mettre en place les conditions qui pourront permettre l’apprentissage, les questionnements existentiels, l’expérimentation, la confrontation et qui stimuleront l’enfant à découvrir son intériorité.

Le tout petit est réceptif à la spiritualité dès le ventre maternel. Seulement comme il ne peut pas nous dire ce qu’il ressent, nous ne pouvons aussi facilement constater ou prouver comment il vit et intègre les pratiques de spiritualité auquel il assiste. Être aimé de Dieu est associé à être dans les bras de maman ou papa, embrassé, regardé avec tendresse, aux paroles valorisantes qu’il entend, aux gestes, à l’atmosphère dans son environnement de vie. Les prières et les chants, les bénédictions prononcées sur lui, les célébrations avec leur atmosphère, lumières, musique, parfums … s’impriment en lui laissant des traces cachées indélébiles. S’éveiller à la vie rimera naturellement avec s’éveiller à la foi.

Jacqueline et Claude Lagarde ont contribué à nous aider à comprendre mieux le rythme d’évolution et de maturation intellectuelle au cours de leur croissance spirituelle. Ils s’inspirent pour cela des travaux de Piaget et les transposent à l’apprentissage des langages de la foi.

L’enfant de  4/5 ans : Les Lagarde attirent notre attention sur le fait que l’enfant dès 4/5 ans vit au niveau de l’anecdote. Il ne se lasse pas d’écouter des histoires. Il est capable d’en mémoriser les étapes, d’en retenir les images. C’est l’âge où il engrange, où il est fasciné par le merveilleux, où l’imaginaire n’a pas de limites.

C’est l’âge d’or pour narrer des histoires bibliques qui rejoignent son vécu, ses intérêts, ses expériences de vie. La tâche du catéchète est de raconter le récit en utilisant des mots compréhensibles aux enfants, mais avec fidélité au texte biblique en restituant soigneusement les surprises du récit, ses effets inattendus, ses invraisemblances, les écarts de conduite des personnages, ceci sans moralité sur ce que le texte veut dire pour nous aujourd’hui … Apprendre à narrer, à faire vivre le récit, à en déployer les images pour que les jeunes auditeurs « voient et ressentent » ce qui se déroule dans l’histoire, tel est le défi pour le/la catéchète. En deuxième temps de la rencontre les enfants seront invités à s’exprimer au travers d’une activité créatrice qui leur donnera de redire l’histoire avec leurs mots, d’en parler, de se l’approprier (par exemple : dessin, peinture, jeu collectif, marionnettes, théâtre d’ombres etc.).

Vers 8/9 ans un réseau de significations, de liens entre histoires entendues, se construit peu à peu. L’enfant est capable de repérer des similitudes, d’opérer des classifications… Le développement de cette faculté est capital. Car il permet à l’enfant d’accéder au monde du sens en décollant de l’univers des sensations immédiates et des chaines d’épisodes anecdotiques.

Encourager à faire découvrir des récits bibliques qui se répondent par leurs thématiques. De plus, l’enfant qui est à l’aise dans la lecture aura un immense plaisir à chercher et lire les histoires dans sa Bible. La tentation pour l’adulte est de vouloir amener les enfants à faire les découvertes de sens qui s’imposent à nous. Il est vital que nous n’épargnions pas à l’enfant le laborieux cheminement de construction de sens en l’amenant par exemple à dire ce que nous voudrions l’entendre nous dire ! Nous sommes responsables de créer les conditions pour que l’enfant puisse entrer dans une production de sens et non le téléguider !

Exemple de types d’activités proposées aux enfants de cet âge : Confectionner un dessin, panneau, ou une bande dessinée comprenant 3 ou 4 récits différents avec des thématiques à comparer, exploiter, (exemple : l’eau ; la samaritaine ; un récit de puits dans l’Ancien Testament ; un récit de baptême ; Noé…).

L’âge du questionnement critique

  • A partir de 9/10 ans : En grandissant l’enfant va se poser toutes sortes de questions sur la vie. L’échec d’une prière non exaucée, la mort qui le touche de près, des situations de crises traversées vont susciter des interrogations. Cela peut survenir à tout âge, mais c’est à partir de 9/10 ans que le questionnement critique systématique voit le jour (est-ce que c’est vrai ? est-ce inventé ? c’est bizarre !). Questionner les textes bibliques, exprimer ses doutes, son étonnement constituent une étape nécessaire sur le chemin de la maturation personnelle. Sans eux, pas d’accès à une foi personnelle.

Nous devons donc compter avec des questions embarrassantes des enfants à propos de Dieu, de la crédibilité de la Bible, de l’existence de l’au-delà, de l’utilité de la prière… Ces questions ne rejoignent-elles pas aussi souvent le doute existentiel que nous portons en nous, et cela nous déstabilise ? Le rôle du catéchète sera dès lors d’accueillir et de valoriser l’étonnement et les questionnements de l’enfant. Faire du questionnement critique un moteur de recherche, en demandant à l’enfant, par exemple, de développer sa question.

Pour ce qui est des autres questions de crédibilité il faut accepter de faire apparaître en pleine lumière les divergences et les contradictions en les problématisant pour engager une recherche de sens.

Le/la catéchète ne doit pas se sentir tenu d’apporter tout de suite des réponses rassurantes. Laisser les enfants chercher, chercher ensemble. Encourager à chercher plus loin : comparer deux versions d’un même épisode et demander : pourquoi nous raconte-t-on cela ainsi ? Qu’est-ce que cela veut dire, à votre avis ?

Les enfants de cet âge sont encore souvent dans une vision très schématique du monde : vrai/faux – méchants/bons, et très radicaux dans leurs jugements. Les encourager à découvrir des nuances, un « vrai autrement ».

C’est ainsi que l’enfant pourra grandir « en stature et en sagesse » (Luc 2/40) et trouver une foi personnelle et engagée.

Rosemarie Chopart

PointKT N° 39

Août, septembre, octobre 2002