« ANNE : UNE NUIT INOUBLIABLE » est une narration écrite par Marthe Balla, formatrice AFiBi (Association des Figurines Bibliques). La narration a été écrite pour une utilisation avec des figurines bibliques… mais le conte peut aussi se vivre sans support visuel.
Anne regarde autour d’elle, non, ses frères ne l’ont pas suivie. Elle s’assied, s’adosse au muret qui borde le toit et penche doucement la cruche qu’elle a apportée sur la terrasse. Il en sort, non de l’eau ou du lait, encore moins du vin, il en sort un rouleau : c’est le secret d’Anne. Elle se rappelle : lorsque ses grands frères Mathias et Thomas, les jumeaux, ont eu 7 ans ils sont allés chez le rabbin, à l’école, et elle avait demandé :
– Est-ce que moi aussi je pourrai y aller ?
– Mais non ! tu n’es qu’une fille ! avaient répondu les jumeaux .
Et le soir, en rentrant, ils avaient refusé de lui dire ce qu’ils avaient appris. Le lendemain c’est tête basse qu’ils étaient rentrés à la maison.
– Qu’est-ce qui ne va pas ? Que s’est-il passé ?
– Je n’ai pas su reconnaître un « aleph » dit Mathias.
– Mais pourquoi doit-on le savoir ? dit Thomas, le rabbin a dit qu’on ne l’entend jamais !
Père avait entendu. Il avait cherché un rouleau dans son coffre et leur avait dit : « Vous avez déjà été à la synagogue avec votre mère ; à douze ans, pour être reconnu comme des hommes il faudra savoir tout lire dans les rouleaux de la Torah ! Regardez : voilà un « aleph » ! Anne s’était approchée, elle aussi. Elle ne put s’empêcher de dire : « Comme c’est amusant ! Il ressemble un peu à une tête de taureau ! » Mathias et Thomas ne s’étaient plus jamais trompés et à partir de ce jour ils avaient partagé avec Anne tout ce qu’ils apprenaient. Puis quand les petits frères, Simon et après Benjamin, durent apprendre à leur tour, ce fut Anne qui s’occupa d’eux. Maman était bien contente et un jour qu’elles étaient seules elle sortit une cruche de son coffre et la donna à Anne. « Anne, ma fille, je te confie mon secret, quand j’avais ton âge, le Rabbin de mon village n’avait pas beaucoup d’élèves et a accepté de m’apprendre à lire ; un jour il m’a donné ce rouleau en me demandant d’en prendre grand soin. Il est à toi maintenant ».
Sur la terrasse il fait encore assez clair pour lire. Anne caresse le rouleau et l’ouvre doucement jusqu’à l’endroit où elle s’est arrêtée la dernière fois. Anne lit : « Le peuple qui marche dans la nuit voit une grande lumière… Seigneur, Tu rends leur joie immense ! » Anne entend la voix de sa mère qui l’appelle. Elle descend du toit. Ce soir ce sont les garçons, ses frères et ses cousins qui dormiront là-haut : avec la venue d’oncle Jacob et de sa famille la maison est trop petite. Et il en est de même pour toutes les maisons de Bethléem ! De partout sont arrivés des oncles, des tantes, des frères et des sœurs, des cousins et des cousines…
C’est la nuit. Anne se réveille. Sa maman a rallumé le feu et fait chauffer de l’eau, elle ouvre le coffre où elle range les tissus. Anne sait ce que cela veut dire : quelque part, à Bethléem, un enfant va naître. Mais non, aucune des femmes n’est enceinte, à moins que… Anne se rappelle : à la tombée de la nuit une toute jeune femme et son mari sont arrivés, cherchant une place pour dormir mais toutes les maisons étaient pleines. La maman d’Anne a eu pitié de la jeune femme qui était si fatiguée et elle a dit à Père : « Les bergers sont dans les champs et la bergerie est vide, laisse-les y aller ! »
Anne se lève rapidement – elle a déjà aidé sa mère lors d’une naissance – et va la rejoindre. Sa mère lui donne des tissus et une lampe en lui disant de les porter à la bergerie. Là-bas elle s’occupe du bébé qui vient de naître, le lave et l’enveloppe d’un tissu bien propre. Puis elle le met dans les bras d’Anne « Tiens-le pendant que je m’occupe de la mère ! » Anne serre le bébé contre elle et le regarde sans bouger, longtemps.
La maman d’Anne appelle le mari : « Venez vous rendre utile maintenant ! Là, mettez de la paille dans la mangeoire, elle vous servira de berceau ! » Et quand c’est fait Anne dépose le bébé, tout doucement, sur la paille. « Viens te recoucher maintenant, Anne, la nuit n’est pas finie ». « Oui, tout de suite, je voudrais juste regarder encore un peu l’enfant, je n’ai pas sommeil maintenant, je viens bientôt ». Anne ne sait pas combien de temps elle est restée quand elle entend du bruit dehors. Elle se lève et voit s’approcher de grands hommes, munis de grands bâtons. Elle a un peu peur, mais quand ils sont tout près elle les reconnaît : ce sont les bergers. Mais que font-ils ici ? en pleine nuit ? les troupeaux ne sont pas là !
Un des bergers se penche vers elle : « Est- ce que l’enfant est là ? Pouvons-nous le voir ? »
Anne s’écarte et les laisse entrer. La jeune maman est réveillée. Elle écoute les bergers qui racontent ce qui leur est arrivé : « Nous étions avec nos moutons quand nous avons vu une grande lumière. Nous avons eu peur. Mais un ange nous a dit : « N’ayez pas peur ! Réjouissez-vous ! Aujourd’hui, dans la ville de David, il vous est né un Sauveur. Et voici à quel signe vous le reconnaîtrez : vous trouverez l’enfant emmailloté de langes, couché dans une crèche. Et voilà qu’une multitude d’anges se sont joints à lui et tous chantaient : Gloire à Dieu… »
Anne écoute, elle aussi, comme Marie, et elle sait que cette nuit est la plus belle de toutes les nuits et qu’elle ne l’oubliera jamais !
Crédit : Marthe Balla