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De l’ancienne Alliance à la nouvelle Alliance

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 Image La venue de Jésus-Christ inaugure le passage de l’ancienne Alliance à la nouvelle Alliance. Profitons de la préparation de Noël pour approfondir la notion d’alliance dans la Bible. Pourquoi Dieu a-t-il eu besoin de faire alliance avec les humains ? La doctrine de l’Alliance traverse tout l’Ancien testament, de Noé à Moïse, en passant par Abraham, et l’Alliance est nouvelle avec la venue de Jésus-Christ.

À quoi sert le déluge ?

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Image A quoi sert le déluge ? Comment comprendre cet évènement qui dépasse toute réalité? Y a t-il un but au déluge ? Est-ce une action arbitraire de Dieu ? Qu’est-ce qui motive sa décision ?
Ces questions vont nous faire cheminer au travers du texte de Noé, pour comprendre un peu mieux ce que l’histoire du déluge révèle dans l’histoire des humains avec Dieu.

 

                      

Babel, éloge de la différence ?

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Le récit de la tour de Babel à lire en Gen 11 : 1 à 9, est souvent compris comme un récit moralisateur.

Est-ce la seule lecture possible ?
 

Un texte « différent » …
Le récit de la tour de Babel à lire en Gen 11 : 1 à 9, est souvent compris comme un récit moralisateur. Il illustre alors la réaction d’un jaloux, Dieu, prêt à tout pour défendre ses prérogatives divines, face aux prétentieux que sont les hommes, qui de leur côté, veulent « se faire un nom »… Est-ce la seule lecture possible ? Nous vous en proposons une autre, plus positive : le récit de Babel comme une éloge de la différence.

Notre réflexion est soutenue par la traduction de [J.N. Darby] Et toute la terre avait une seule langue* et les mêmes paroles.

2 Et il arriva que lorsqu’ils partirent de* l’orient, ils trouvèrent une plaine dans le pays de Shinhar ; et ils y habitèrent.
3 Et ils se dirent l’un à l’autre : Allons, faisons des briques, et cuisons-les au feu. Et ils avaient la brique pour pierre, et ils avaient le bitume pour mortier.
4 Et ils dirent : Allons, bâtissons-nous une ville, et une tour dont le sommet [atteigne] jusqu’aux cieux ; et faisons-nous un nom, de peur que nous ne soyons dispersés sur la face de toute la terre.
5 Et l’Éternel descendit pour voir la ville et la tour que bâtissaient les fils des hommes.
6 Et l’Éternel dit : Voici, c’est un seul peuple, et ils n’ont, eux tous, qu’un seul langage*, et ils ont commencé à faire ceci ; et maintenant ils ne seront empêchés en rien de ce qu’ils pensent faire.
7 Allons, descendons, et confondons là leur langage, afin qu’ils n’entendent pas le langage l’un de l’autre.
8 Et l’Éternel les dispersa de là sur la face de toute la terre ; et ils cessèrent de bâtir la ville.
9 C’est pourquoi on appela son nom Babel*, car là l’Éternel confondit le langage** de toute la terre ; et de là l’Éternel les dispersa sur la face de toute la terre.
– v. 1, 6, 9** : litt.: lèvre. — v. 2 : ou : vers. — v. 9* : confusion.
{/yootooltip}. Ce français plus rêche est proche du texte hébreu de la Biblia Hebraïca Stuttgartensia. Il est exempt des ponctuations, certes expressives mais ajoutées, de la traduction « Parole de vie » en français fondamental, souvent utilisée avec les enfants.

La première « différence » qui se présente est celle du texte en lui-même : il est écrit dans un passé lointain, pour un public autre, dans un contexte particulier, et nous devons aujourd’hui faire l’effort de l’accepter tel qu’il est ! Faire fi des interprétations déjà entendues, mettre de côté les symbolismes qui lui ont été accolés.
Nous devons relire le texte avec un regard d’explorateur, de découvreur et nous laisser interpeller par cette première particularité : celle des mots anciens.

Mais qu’est-ce qu’il fait là ?

 

Image  Mais qu’est-ce qu’il fait là, ce texte ?
L’histoire est autonome. Elle semble ne dépendre ni de ce qui précède, ni de ce qui suit… Mais elle coupe, comme une erreur de copier/coller, les générations des fils de Noé (Gn 10 et 11 : 10 à 32) jusqu’à Abram !
Est-on devant une gaffe de copiste ?!?
 

{tip Colette Briffard::Colette BRIFFARD, professeur de lettres, formatrice en lecture- écriture, assure des formations dans le domaine biblique, notamment auprès d´enseignants de l´éducation nationale en France. Article « Sem, une clé de lecture pour Babel » Etudes Théologiques et Religieuses Tome 75, année 2000/3.} met en avant, au contraire, la subtilité d’avoir placé ce récit précisément à cet endroit. Suivons son raisonnement…

Relisons Gn 10 : les générations des fils de Noé ont fait « la répartition des îles des nations… » v5, chacune selon sa langue, dans leurs familles, dans leurs pays, dans leurs nations. On est ici, avant Babel, dans la situation opposée au v1 de Gn 11. Sont cités, dans l’ordre : Japheth, Cham, puis Sem. Or Sem est l’aîné des fils de Noé, il aurait dû, nous signale C. Briffard, être placé en premier dans la liste !

Encore une gaffe de notre copiste ?!?

Le nom du fils de Noé, en lettres hébraïques, est « Shem ». En hébreu, le mot « Shem », écrit exactement de la même façon, signifie aussi «nom, renom, réputation ». C’est le même mot utilisé en Gn 11 v4 : « … faisons-nous un nom… ». Ce même mot « Shem », se retrouve juste après le récit de Babel, en Gn11 :10, pour la continuation des généalogies de Sem… Et pour Abram, en Gn12 :2 : « Je rendrai ton nom célèbre ».

La géographie des textes peut donc se laisser explorer avec la « boussole du nom ». Ce curieux enchâssement du récit de Babel dans les généalogies des descendants de Noé, jusqu’à Abram, peut être lu comme un apport pédagogique de Dieu, dans la problématique de l’identité : garder son nom dans et après un déluge, se faire un nom soi-même comme les hommes de Babel, ou recevoir un nouveau nom de Dieu, comme Abram ?

 

N’importe où, n’importe comment !

 

 En Gn 11, les hommes veulent se faire un nom.

N’importe lequel, n’importe où, n’importe comment !

v 1 : « Et toute la terre avait une seule langue et les mêmes paroles » Plus qu’une unité, c’est une uniformisation !
 V2 : « …ils trouvèrent une plaine… »   C’est un lieu trouvé, par opposition aux lieux pris et donnés par Dieu, lors du déluge et à Abram.
V3 : « Allons, faisons des briques… »  La construction réduit l’altérité du lieu : il devient ce qu’on en fait, il est modelé.
 V4 : « …et une tour dont le sommet atteigne jusqu’aux cieux… »  Envahir le lieu de Dieu (les cieux), non pour aller à sa rencontre et voir qui est l’autre, mais pour se faire un nom, ne pas être dispersés… Et pouvoir imposer qui ils sont
 V7 : « Allons, descendons, et confondons là leur langage… »  Dieu met le doigt sur le problème originel et agit sur cet aspect, et uniquement sur cet aspect…

Lisons les v. 5 à 9 dans la traduction proche du texte hébreu, en laissant de côté les idées reçues. Dans ces mots, il n’y a pas de jalousie de Dieu, pas de punition, pas de destruction ! Dieu constate « un seul peuple, … eux tous, qu’un seul langage,… ils ne seront empêchés en rien de ce qu’ils pensent faire ».

C’est contraire à Sa Création ! Celle-ci passe par la séparation, la différenciation, l’altérité. Les hommes, à Babel, s’engagent dans un processus de dé-création.
Dieu se fait {tip Analyste::analyser : délier, rendre fluide ce qui est figé}Analyste{/tip}. Loin de sévir, en bon pédagogue, Il rétablit l’altérité de langage, avec pour conséquence, le rétablissement de l’altérité de lieu (v8 et v9). Les hommes renoncent à se faire un nom, Dieu s’en occupera au chapitre suivant, ils renoncent aussi, par la force des choses, à la peur de la dispersion…

 

Pour aujourd’hui, uniformisation ou Création ?

 

Le récit de Babel peut se lire comme l’éloge de la différence.
Ceux qui travaillent avec des jeunes (et moins jeunes) adolescents connaissent cette question de la construction de l’identité. Chacun veut être unique, mais redoute la dispersion. Alors on suit la mode, on écoute tous la même chanson, on regarde tous le même feuilleton…

Quels bâtisseurs serons-nous pour aujourd’hui et pour demain ? Construirons-nous un monde uniforme, qui s’enroule sur lui-même jusqu’à l’étouffement ? Avec une seule langue imposée à tous ? Un monde construit, avec brique pour pierre et bitume pour mortier, modelé à notre souhait, sans aucune place pour la nature et les autres créatures ? Un monde de peureux qui craignent la dispersion, et angoissent face à la différence ? Un monde sans Dieu, où nos tours économiques et consommatrices occupent tout espace laissé libre ? Un monde sans place pour l’altérité allant jusqu’au Tout Autre ?

Aujourd’hui encore, à travers ce vieux récit, Dieu notre bon berger descend voir nos villes, et nous met en garde : il n’y a rien de bon dans l’uniformisation. Elle est contraire à la Création.
Nous globalisons, nous mondialisons… Où Dieu va-t-Il pointer son doigt de pédagogue ? 
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 Michel Quoist nous invite à méditer…

 

 

 

Lecture du psaume 8

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De l’émerveillement à notre responsabilité envers la terre : lecture du psaume 8:
Se retrouver, la nuit, sous l’immensité du ciel étoilé. En contempler la splendeur, et être saisi d’admiration. Qui n’a jamais fait cette expérience ? Et qui ne s’est pas demandé alors : dans cet univers si grand, quelle est la place de l’être humain ?
Dans le Premier Testament, un psaume témoigne de cet émerveillement, et recherche notre juste place dans la Création.  

Chavouôt et fêtes de Pentecôte

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Image La Pentecôte que nous fêtons, dans toute la chrétienté, tire ses origines de la Pentecôte juive, la fête de Chavouôt’. Connaître ces origines et les expliquer aux enfants nous semble enrichissant et utile pour la préparation d’une leçon, d’un jeu, ou tout simplement, la préparation de la fête ! 

En grec, on a appelé {tip Pentecôte::Pentecôte : du grec pentékosté, cinquantième.}Pentecôte{/tip} la fête juive de {tip Chavouôt::Chavouôt’ : nom hébreu de la Pentecôte juive, deuxième fête de pèlerinage.}Chavouôt{/tip}, commémorant le don de la {tip Torah::Enseignement, Loi.}Torah{/tip}, le don de la Loi, à Moïse, au mont Horeb. Pentecôte, car ce sont 50 jours qui séparent la Pâque, {tip Pessah::nom de la Pâque juive, commémoration de la libération d´Egypte. Première fête de pèlerinage}Pessah{/tip}, de Chavouôt.  La période entre les deux fêtes est appelée {tip l’Omer::Omer : périodes de 7 semaines commençant la deuxième soirée de Pessah.}l’Omer{/tip}

Chavouôt est la deuxième des trois fêtes dites « de pèlerinage » (Exode 23 : 14 à 17). Après la construction du Temple par Salomon, trois fêtes réunissaient les juifs de sexe masculin à Jérusalem : Pessah, Chavouôt’ et {tip Souccôt::Souccôt : fête des cabanes, fête des tabernacles. Commémore la vie précaire du peuple libéré d´Egypte. Troisième fête de pèlerinage.}Souccôt{/tip}. Après la destruction du Temple en 70, les pèlerins continuèrent à se rendre sur les lieux, mais pour y pleurer… Les non juifs ont alors appelé le mur occidental qui reçoit les larmes et les prières (mur de soutènement du Mont du Temple, construit sous Hérode) le « Mur des Lamentations ».
A l’heure actuelle, il n’y a plus d’obligation de pèlerinage, mais par contre, les trois fêtes sont de grands moments de réjouissance pour tous.

Il n’est pas facile pour un non juif de s’y retrouver au travers des nombreux noms donnés à la fête : Chavouôt’, Pentecôte, Fête des Semaines, Fête de la {tip Moisson::Moisson : en Israël, c’est la saison des moissons de froment. La fête célèbre aussi l´installation en Canaan et la transformation d´un peuple nomade en agriculteurs.}Moisson{/tip}, Fête du don de la Torah, Fête de la Révélation au Sinaï, Fête des {tip Prémices…::Prémices : deux pains faits avec les premiers blés moissonnés sont offerts à Dieu}Prémices…{/tip}

Centrée sur le don de la Torah, Chavouôt’ est l’anniversaire de la naissance du peuple d’Israël, peuple de Dieu.
Pas de n’importe quel dieu… Dieu qui se révèle et offre alliance. Cette alliance est une réalité historique pour le croyant : Dieu agit tout au long de l’histoire de son peuple et intervient, au travers de la Loi, dans la discrétion de la vie quotidienne comme dans l’éclat de grands événements.

Lié à la période des moissons, l’aspect agricole de la fête est probablement un emprunt très ancien aux coutumes de Canaan. Ce qui n’enlève rien au caractère profondément confiant des réjouissances : les premiers fruits, les premières récoltes sont les promesses d’un avenir. Le croyant peut placer sa confiance en Dieu qui libère à Pessah, qui guide à Chavouôt’, et qui pourvoit à Souccôt’.

 

Quelques traditions:

Image  Traditionnellement, le livre de Ruth est lu pendant les festivités, dans les synagogues décorées de fleurs et de plantes vertes. Pourquoi lire le livre de Ruth ? Chavouôt’ est l’anniversaire de la naissance et de la mort du roi David, dont Ruth est l’arrière-grand-mère… L’histoire se situe au début de la moisson des orges… On y voit l’application de la Loi, étendue, à travers Ruth, aux nations païennes… Ruth, première prosélyte (Ruth 1 :16), choisit de se « mettre sous les ailes du Seigneur », c’est l’une des premières conversions, prémices, l’un des premiers fruits …
 

 Autres traditions : la dégustation de pâtisseries faites de lait et de miel (à six heures de distance d’un repas de viande !), car pour le croyant, la Torah est douce comme ces deux ingrédients…

Les blintzes au fromage (gvinah) quand à eux, rappellent que, alors que les grandes montagnes aux cimes nombreuses (gavnounîm) se disputaient le privilège de porter la promulgation de la Loi, elles furent rejetées à cause de leur prétention, et le Sinaï fut choisi pour son humilité…

La Pentecôte chrétienne.

 

Il est donc normal de voir, en Actes 2 :1, les croyants réunis pour Pentecôte !
Sont-ils venus, encore tout secoués par les événements des derniers jours ? Ou peut-être déjà joyeux et gais, habités par la force de Jésus ressuscité ? Sont-ils venus dans la perspective du pèlerinage et de la fête, se gaver de gâteaux au lait et au miel, retrouver des amis, embrasser un vieil oncle, … comme chaque année ?
Peuvent-ils s’attendre aux bouleversements qui vont suivre ? 

La fête est interrompue. Un bruit vient du ciel | Arrêt sur image | Le bruit remplit toute la maison où ils sont assis. La fête est-elle finie ?
Tous sont remplis de l’Esprit Saint, et se mettent à parler d’autres langues.
« C’est l’Esprit qui leur donne de faire cela » (Actes 2 : 4). Don.

En cette circonstance, Pierre annonce en citant Joël (3 : 1 à 5) et les psaumes, qu’en relevant Jésus d’entre les morts, Dieu a ouvert un temps nouveau pour tous : « ce Jésus que vous avez cloué sur une croix, Dieu l’a fait Seigneur et Christ. » (Actes 2 : 14 à 36)
Chavouôt’ nous replace dans l’action passée, présente et à venir de Dieu dans nos vies… Pentecôte, par le don du Saint-Esprit, nous projette dans le temps de {tip l’eschatologie::Eschatologie: tout ce qui concerne la fin de l´homme (au sens individuel), de l´humanité ou du monde. Divers courants théologiques apportent des éclairages différents sur la question… Doctrine de l´Eciture au sujet des fins dernières, fin et renouvellement du monde, temps du Salut nouveau et éternel…}l’eschatologie{/tip}. Temps lointain et inaccessible, peut-être, mais dont les prémices nous sont annoncés chaque jour par les Evangiles.

Lève-toi ! Prends ton grabat et marche !

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Image La parole de Jésus attire les foules, mais dans ce récit de l’Évangile, cette foule a quelque chose d’un peu étouffant. Jésus se trouve au centre de l’intérêt de ces gens, certes, mais aussi comme enfermé là au milieu. Personne d’autre ne peut plus s’approcher de lui. C’est en tous cas l’expérience que font le paralysé et ses amis. Ils voudraient bien rencontrer et entendre Jésus. Mais ils se heurtent à cette barrière qui semble infranchissable. Comment parviendront-ils jusqu’à Jésus ?
 

  Le texte de l’Evangile Marc 2, 1-12

1 Et il entra de nouveau dans Capharnaüm, quelques jours après, et on apprit qu’il était à la maison.
2 Et beaucoup de gens s’y assemblèrent, de sorte qu’il n’y avait plus de place, même près de la porte ;  et il leur annonçait la parole.
3 Et des gens viennent, lui amenant un paralytique porté par quatre personnes.
4 Et ne pouvant s’approcher de lui, à cause de la foule, ils ôtèrent le toit [du lieu] où il était ;  et l’ayant percé, ils descendent le brancard où le paralytique était couché.
5 Et Jésus, voyant leur foi, dit au paralytique : « [Mon] enfant, tes péchés sont pardonnés. »
6 Et il y avait là quelques-uns des scribes, assis et raisonnant dans leurs cœurs :
7 « Pourquoi celui-ci parle-t-il ainsi ? Il blasphème. Qui peut pardonner les péchés, sinon un [seul], Dieu ? »
8 Et aussitôt Jésus, connaissant dans son esprit qu’ils raisonnaient ainsi en eux-mêmes, leur dit : « Pourquoi raisonnez-vous dans vos cœurs ?
9 Lequel est le plus facile, de dire au paralytique : « [Tes] péchés te sont pardonnés ou de dire : «  Lève-toi, prends ton brancard, et marche ? »
10 Pour que vous sachiez que le fils de l’homme a l’autorité sur la terre de pardonner les péchés, il dit au paralytique :
11 « À toi, je [te] dis, lève-toi, prends ton brancard, et va dans ta maison. »
12 Et il se leva aussitôt, et ayant pris son brancard, il sortit en présence de tous ;  de sorte qu’ils en furent tous étonnés et qu’ils glorifiaient Dieu, disant : « Nous n’avons jamais rien vu de pareil. »

Espace temps

Situer Capharnaüm sur une carte
Capharnaüm , en hébreu Kfar Nahum, le village de Nahum, est une ville de l’ancienne Galilée, sur la rive nord-ouest du lac de Tibériade au nord de l’État d’Israël. Son nom vient de l’hébreu Kfar (village) et Nahum (prophète).
C’est dans le N.T. que l’on trouve trace de Capharnaüm pour la première fois. Cette ville est abondamment citée dans les récits de l’évangile où elle est désignée comme le lieu où vécut Jésus de Nazareth (Mt 4/13, 8/5, 11/23, 17/24 ; Mc 1/21, 2/1, 9/33 et //) durant une grande partie de sa vie publique en Galilée. C’est notamment là qu’il enseigne, qu’il a guéri de nombreux malades et qu’il exorcise plusieurs personnes possédées par des démons. Lorsqu’il y guérit un paralytique, la foule se presse tant que pour faire passer le paralytique, ses amis ont percé un trou dans le toit.
Les apôtres Simon (appelé Pierre) et son frère André, Jacques et Jean fils de Zébédée, vécurent dans cette ville. Matthieu (Lévi, fils d’Alphée) y était percepteur d’impôts.
Aujourd’hui,ce mot est aussi utilisé pour qualifier un lieu qui renferme beaucoup d’objets entassés pêle-mêle, un endroit en désordre. L’explication de l’expression française, est probablement liée à la scène de la guérison du paralytique parce que dans la maison où était Jésus et le paralytique, il y avait une foule de personne, des gravats, un trou dans le toit… !
Autres textes
Ce miracle est raconté par les trois synoptiques (Matthieu 9 /1-8 ; Luc 5 /17-26).

Des témoignages archéologiques indiquent que Capharnaüm fut créée au début de la dynastie hasmonéenne de Judée, car les monnaies les plus anciennes retrouvées sur le site datent du IIe siècle avant J.C.. Elle était située près de la frontière de la province de Galilée, sur un embranchement de la route commerciale Via Maris. À l’époque du récit de l’Évangile, Capharnaüm comprenait un poste de douane et une petite garnison romaine commandée par un centurion.

Comme toutes les localités de ce type, elle était entourée d’un mur de pierres percé de portes. A l’intérieur les maisons étaient serrées les unes contre les autres le long de ruelles étroites. C’est ainsi qu’elles offraient le plus de protection contre les ardeurs du soleil et du vent du désert. A la différence des cités grecques et romaines, il n’y avait pas de planification dans cet urbanisme, qui eut fréquemment les traits d’un labyrinthe du fait des agrandissements et transformations continuelles. Un élément important en était le marché, à proximité de la porte (à l’intérieur ou à l’extérieur). Par ailleurs le puits où il fallait souvent puiser l’eau jusqu’à vingt mètres de profondeur, les citernes pour stocker l’eau des pluies d’hiver, faisaient partie de ce tableau, sans oublier jardins, champs, vignes …
Le village, gravement endommagé par un tremblement de terre en 746, fut reconstruit un peu plus loin au nord-est mais, par la suite, son déclin et finalement son abandon au cours du XIe siècle sont mal connus. Malgré l’importance de Capharnaüm dans la vie de Jésus, rien n’indique la moindre construction à l’époque des Croisés. Le site fut redécouvert en 1838 par Edward Robinson, un Américain spécialiste de géographie biblique. En 1866, le cartographe britannique Charles W. Wilson identifia les ruines de la synagogue et, en 1894, une partie de l’ancien site fut achetée par la Garde franciscaine de la Terre Sainte. Les principales fouilles franciscaines furent menées de 1968 à 1984. D’autres fouilles du site grec-orthodoxe voisin furent organisées de 1978 à 1982.

 

Être acteur

 1. Ce miracle est raconté par les trois synoptiques (Matthieu 9 /1-8 ; Luc 5 /17-26). Proposition : faire une lecture des autres textes et les comparer.

2. Notez où et pourquoi la foule se rassemble. Qu’avait déjà accompli Jésus à Capharnaüm ?

3. Quels faits nous montrent que Jésus était populaire ?

4. Pourquoi et comment la prédication de Jésus est-elle interrompue ? Comment réagit-il à cette interruption ?

5. À  votre avis, qu’espéraient les amis du paralytique ? Comparez avec ce que lui dit Jésus.

6. Qui réagit à cette déclaration ? De quelle manière ? Pourquoi ? Cherchez les mots « scribes » et « blasphème » dans le glossaire. Selon la loi juive, le blasphème devait être puni de mort.

7. Comment exprimeriez-vous dans vos propres mots ce que pensent les scribes ? Comment Jésus répond-il ? Quel est le but de la question de Jésus au verset 9 ? Comment lui répondriez-vous ? Pardonner les péchés ! Y a-t-il des signes visibles ?

8. Pour les scribes, Dieu seul pardonne et il n’y a pas de pardon sans sacrifice au Temple ! Jésus n’ignore pas cela alors, n’est-il pas imprudemment provocateur, dès le début de son ministère chez Marc, en ignorant même le détour par le Temple ? Pourquoi ?

9. Quel signe visible Jésus veut-il donner aux scribes en guérissant le paralytique ?

10. Comment ce dernier exprime-t-il sa foi ? Quelles sont les diverses réactions devant cette guérison ? A qui les gens l’attribuent-elle ?

 

Contexte

Jésus ne pouvait plus entrer ouvertement dans une ville. Il se tenait dehors, dans les lieux déserts, et on venait à lui de toutes parts (Mc 1/45).
La cause ? Le manque de discrétion du lépreux pourtant invité par Jésus à la fois, à la discrétion et à aller se montrer au prêtre et à offrir le sacrifice de purification prévu par la loi de Moïse (Mc 1/40-45).
Dans cet épisode, Jésus est à nouveau à Capharnaüm, « à la maison ».
Tout au long du premier chapitre, aucune opposition ne s’est manifestée du côté des hommes à l’encontre de Jésus (Mc 1/24-28). A partir de ce passage nous voyons surgir et s’amplifier la critique et l’opposition aux paroles et aux actions de Jésus de la part des scribes et des pharisiens. C’est le début des controverses galiléennes.

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Clés de lecture

 

A la maison : La foule est massée à la porte d’une maison, certains pensent à la maison de Simon et André où Jésus se trouverait en quelque sorte chez lui (Mc1/29). Elle sert de base opérationnelle à Jésus au début de son ministère. C’est la même expression en Mc 3/20, 9/28 ; 1 Co 11/34, 14/35 (chez lui) : voir aussi Mc 2/15, 6/31 ; Mt 4/13. La bible TOB précise qu’en Mc 7/17 et 9/28, le sens serait plutôt dans une maison.

La foule (Français courant) : La parole de Jésus attire les foules, mais dans ce récit de l’Evangile, cette foule a quelque chose d’un peu étouffant. Jésus se trouve au centre de l’intérêt de ces gens, certes, mais aussi comme enfermé là au milieu. Personne d’autre ne peut plus s’approcher de lui. C’est en tous cas l’expérience que font le paralysé et ses amis. Ils voudraient bien rencontrer et entendre Jésus. Mais ils se heurtent à cette barrière qui semble infranchissable. La foule d’abord obstacle, sera ensuite témoin de l’événement.

Les amis du paralytique : Les versets 3 et 4 décrivent l’expédition des quatre hommes portant leur ami. En effet, par bonheur cet homme a quatre amis, leurs noms ne nous sont pas indiqués. Quatre amis qui veulent absolument sa guérison et qui ne manquent pas d’audace (heureusement !) : au lieu de repartir ou d’essayer d’écouter de loin et d’attraper quelques miettes, ils se trouvent un chemin rien que pour eux.

Leur obstination leur permet de forcer le passage et de franchir l’obstacle. Leur solidarité fait penser à la communauté chrétienne primitive, leur geste invite à ne pas traiter les malades comme des pécheurs et à s’occuper d’eux !

Comme ils ne pouvaient pas le lui présenter en raison de la foule, ils défirent le toit au-dessus de l’endroit où il se trouvait et, ayant creusé un trou, … : Le toit de la maison : les amis inventent de passer par le toit. Ils acceptent ainsi le risque de se mettre à dos le propriétaire de la maison et d’avoir à réparer ou payer les dégâts commis : ils pratiquent en effet une ouverture dans la terrasse de torchis qui couvre la maison et font descendre leur ami jusqu’à Jésus. Il faut préciser que le climat étant doux, pendant la majeure partie de l’année, la vie quotidienne se déroulait en plein air, dans les cours ou sur les toits plats des maisons. Le type habituel de la maison palestinienne était une construction en forme de dé, abritant une seule pièce avec des ouvertures rares et petites. Les fondements étaient constitués de pierres brutes calcaires sur lesquelles étaient posées des poutres. Le tout était couvert par un toit plat formé avec les mêmes matériaux. Un toit de maison ordinaire était fait de trois couches : d’abord des poutres en bois – cyprès ou parfois cèdre – reliées par un lacis de branchages et de joncs, sorte de clayonnage rembourré de paille, que venait recouvrir un couche d’argile soigneusement compactée avec un rouleau de pierre avant et après les premières pluies d’hiver. Le toit plat était accessible par une échelle ou un escalier extérieur, il permettait quelques fois la construction d’une réserve à provisions. Passer à travers ce genre de toit n’était pas trop difficile.

… ils firent descendre le grabat sur lequel gisait le paralytique. » (Marc 2 /4 NBS) : Attention, dans les traductions TOB, NBS et Bayard, de Luc 5 /19, le malade est descendu « à travers les tuiles » – comme s’il s’agissait d’une maison grecque ou romaine. C’est une description normale pour un citadin comme Luc, présumé originaire d’Antioche – mais les toits en tuiles étaient plutôt rares dans les villages au temps de Jésus.

Le grabat (version NBS) / brancard (version TOB, Bayard)/ lit (version Segond) / natte (Français courant) : Ce mot krabattos est aussi utilisé en Mc 6/55. Il désigne soit un lit de repos, soit un mauvais lit ;  il ne comporte pas nécessairement la nuance misérabiliste que suggère le mot français « grabat ». Dans l’évangile de Marc, il se distingue du mot klinè = lit,  utilisé en Mc 4/21, 7/30, et désigne une couche servant à transporter un malade, soit un brancard. Matthieu (Mt 9/2) et Luc (Lc 5/18) utilisent dans le texte parallèle le mot klinè, lit, et  klinidion, civière (Lc 5/19, 24).

 
Jésus, voyant leur foi : C’est le seul « épisode de l’évangile où la foi des autres est explicitement reconnue comme étant au bénéfice de quelqu’un. » (E. Cuvillier, L’évangile de Marc p. 53 cf. aussi de façon implicite Mc 7/24-30 et 9/14-29) C’est aussi la seule occasion où les évangiles nous disent que Jésus voit la foi. La foi – cette affaire privée et intérieure, nous a-t-on dit, est une chose qui se voit ! Ici, elle consiste à trouer le toit. La foi que Jésus reconnaît, n’est pas la recherche constante du miracle, recherche qui au contraire fait barrage à l’évangile dont l’homme a besoin.
Jésus parle de la foi du paralytique et de celle de ses quatre porteurs, car il s’exprime au pluriel. Le paralytique la manifeste en leur demandant ou en acceptant d’être conduit auprès de Jésus, et ses porteurs, en acceptant de le faire, allant jusqu’à découvrir le toit pour le descendre avec une corde. Ils auraient pu revenir le lendemain, eh bien non ! C’est une foi particulièrement ferme et persévérante, qui rend imaginatif et endurant. Ils n’ont pas dit un mot – du moins Matthieu, Marc et Luc n’en rapportent rien – et pourtant Jésus a vu leur foi – une foi qui n’a donc pas besoin de mots pour se faire connaître, mais qui s’est exprimée par un geste et un risque, une foi qui a montré clairement à quel point elle répondait à l’offre de Jésus. Ils ne disent rien, mais tout leur comportement est éloquent.
P. Bonnard écrit : « La foi n’est pas stricte acceptation ;  elle met en mouvement les hommes vers celui qui est d’abord venu vers eux » (L’Evangile selon Saint Matthieu, 1963, p. 124).

Jésus dit au paralytique : « Mon enfant, tes péchés sont pardonnés » : Chaque miracle de Jésus concerne l’homme total et s’attaque à la totalité du drame qu’il vit, comme malade et comme pécheur. C’est le pardon qui est d’abord annoncé. Jésus, qui lit dans les cœurs, sait de quoi ce malade a besoin. Le paralysé, est l’image du pauvre et de l’exclu, celui que beaucoup considéraient peut-être comme puni par Dieu à cause de son péché. On connaît en effet le lien étroit, de cause à effet, que le judaïsme de ce temps établissait entre le malheur, par exemple la maladie, et le péché commis. Cette conviction s’étalait déjà dans le discours des amis de Job, et les disciples de Jésus la partageaient – preuve en soit la question totalement stupide qu’ils ont posée un autre jour à Jésus à propos d’un aveugle de naissance : « Qui a péché, pour qu’il soit né aveugle ? Est-ce lui ou ses parents ? » (Jn 9 /2). Aujourd’hui encore beaucoup de gens croient à ce Dieu qui punit les fautes.

Le paralytique se retrouve maintenant au centre avec Jésus, dans une relation de cœur à cœur. La simple confiance d’un humain qui ne peut ignorer son handicap et ses limites, la simple confiance d’amis qui l’ont porté dans une solidarité active.
Les gens ne voyaient que sa maladie ; Jésus, lui, voyait la repentance et le désir de pardon de cet homme. Il lui annonce donc le pardon.
Et voici cet homme mis en présence de l’extraordinaire accueil de Jésus. De ces confiances partagées surgit alors une parole libératrice, qui enlève le poids de la culpabilité et du jugement, qui apaise et qui recrée, au-delà, au travers des blessures et des paralysies, un avenir possible.
C’est un peu fou. Et peut-être même un peu trop facile. De quels mérites peut-il se prévaloir pour une telle indulgence ? Oui, comment Jésus peut-il ainsi dire le pardon de Dieu sans condition, sans garantie ?

Et il y avait là quelques-uns, des scribes, assis et raisonnant dans leurs cœurs : Les scribes étaient des spécialistes de l’étude de la Loi et étaient chargés non seulement d’établir des copies conformes de la Loi, mais surtout d’en être les interprètes autorisés, conformément à la tradition des anciens (Mt 23/2), pour en appliquer les prescriptions aux multiples situations de la vie courante (Mc 2/6 ; 3/22 ; Mt 2/4 ; 17/10). La lecture de la Torah étant le fondement du judaïsme post-exilique, on comprend qu’ils aient joui dès cette époque d’un important prestige. Issus de toutes les couches de la société, prêtres et plus encore laïcs, Ils jouissaient d’un grand prestige auprès du peuple, et aimaient à se faire appeler Maître ou Rabbi (= litt. «mon maître»), d’où rabbin en français (Mt 23/7-8). Les scribes constituaient des corporations bien organisées, souvent d’obédience pharisienne. Leurs disciples se formaient aux côtés d’un rabbi plus âgé dont ils partageaient la vie avant d’être ordonnés ; la jeunesse accourait du monde entier à Jérusalem pour s’asseoir au pied des maîtres – ainsi Paul auprès de Gamaliel (Ac 22/3 ; cf. 5/34). A côté de leurs fonctions théologiques, les scribes pratiquaient tous un métier manuel.
Dans les évangiles, l’opposition des scribes à Jésus était inéluctable puisqu’il n’a pas, selon eux, acquis le savoir livresque nécessaire. Jésus ne reçut sans doute pas une formation de scribe, même si ses disciples l’appelèrent souvent Rabbi (Mt 26/25, 49 ; Mc 9/5 ; 10/51 ; 11/21 ; 14/45 ; Jn 1/38, 49 ; 3/2 ; 4/31 ; 6/25 ; 9/2 ; 18/8 ; 20/16). Pourtant, il enseignait en homme qui a autorité et non pas comme les scribes (Mc 1/22.27 ; cf. Mt 7/29). Son succès auprès des foules suscita l’hostilité des scribes (Mc 2/16 ; 3/22 ; Lc 5/21) qui cherchèrent par tous les moyens à le faire mourir (Mc 14/1, 55 ; 15/1, 31 ; Lc 19/47 ; 22/2). C’est surtout l’évangile de Marc qui met en avant leur hostilité.

Leur protestation est ici silencieuse, elle n’est pas exprimée publiquement, mais reste dans leurs cœurs. Cette parole de Jésus qui accorde le pardon est blasphématoire aux yeux des scribes. Il s’arroge une autorité qu’eux réservent à Dieu, dans la ligne de textes scripturaires qui lui attribuent ce pouvoir (Ex. 34/17 ; Es. 43/25, 44/22). L’accusation est grave, puisque le blasphème servira de motif lors de la Passion pour juger Jésus « passible de mort » (Mc 14/64). Elle est cependant tempérée par le fait qu‘elle n’est pas rendue publique.
 
 » Pourquoi celui-ci parle-t-il ainsi ? Il blasphème : Les juifs contemporains de Jésus considéraient comme blasphème toute parole jugée insultante pour l’honneur de Dieu. En s’appuyant sur l’ Ancien Testament (Lv 24, 11-16), ils réclamaient la peine de mort contre le blasphémateur. Jésus a été accusé de blasphémer et condamné à mort  pour cela (Mc 14, 62-64). »
 
 
Qui peut pardonner les péchés, sinon  [seul], Dieu ?  » : Alors un tournant se produit au milieu du récit : parmi les témoins et les auditeurs de Jésus, tous en effet ne sont pas disposés à entendre la parole du monde nouveau de Dieu. En contestant à Jésus le droit de prononcer lui-même une parole de pardon, les scribes présents montrent qu’ils ne sont pas encore prêts eux-mêmes à « changer de mentalité », comme Jésus y invitait ses auditeurs dès ses premières interventions en public. Ces gens prétendent détenir une sorte de monopole religieux et rejettent tout ce qui n’entre pas strictement dans le cadre de leur tradition. Selon eux, quand Jésus prend sur lui de déclarer le pardon, il usurpe ce qui n’appartient qu’à Dieu, il fait donc injure à Dieu. Telle est la réflexion de ces gens, convaincus d’avoir à défendre l’honneur de Dieu – comme si Dieu n’était pas capable de défendre lui-même son honneur et sa vérité !

« Il blasphème » disent ces docteurs de la loi, comme les appelle Luc peut-être venus des localités de la Galilée, de la Judée et de Jérusalem. On parlait en effet de lui jusqu’à Jérusalem. Son activité s’ébruitait et inquiétait l’élite religieuse. Possible qu’on ait envoyé une délégation à Capharnaüm pour aller voir et écouter, pour épier ce prédicateur que la foule acclamait comme un grand prophète, voire comme le Messie.
Les élites religieuses ont probablement perçu la puissance réformatrice de la Parole de Jésus, mais en même temps elles ont eu peur de ce que cette parole pouvait signifier pour leur théologie et leur pouvoir !
Remarque : Nous ne savons pas exactement la raison de leur présence dans la maison mais Marc précise leur position assise, une posture de notables !

Et aussitôt Jésus connaissant dans son esprit qu’ils raisonnaient ainsi en eux-mêmes, leur dit :  Pourquoi raisonnez-vous dans vos cœurs ? Lequel est le plus facile, de dire au paralytique  : ‘[Tes] péchés te sont pardonnés ou de dire :  Lève-toi, prends ton brancard, et marche ? La formule en son esprit signifie sans doute intérieurement, sans qu’il faille penser ici à l’Esprit Saint. Elle caractérise une connaissance spirituelle que Jésus partage comme prophète de Dieu, celui-ci étant présenté dans l’Ancien Testament comme celui qui connaît les cœurs. Notons que, de la même manière, que Jésus voit la foi des porteurs, il entend ce que les scribes cachent dans leur cœur

Jésus, contrairement à ce qu’enseignaient les scribes, veut dire que le pardon des péchés n’est pas la chasse gardée de Dieu au ciel. C’est sur la terre aussi que ce pardon peut être prononcé et donné. Dans le Règne de Dieu ici-bas, les hommes et les femmes ont le pouvoir et la liberté de prononcer ces paroles du pardon. Et ce pardon est aussi complet, aussi vrai, aussi sérieux que celui que Dieu accorde au ciel. A ses disciples Jésus n’a-t-il pas dit un autre jour : « Tout ce que vous lierez sur la terre sera lié au ciel et tout ce que vous délierez sur la terre sera délié au ciel » (Mt 18/18) ? Nous rejoignons ici  la prière que Jésus nous a enseignée,Mt 6/14 et Lc 11/4.
Ambassadeur du Règne de Dieu Jésus est aussi le premier citoyen de ce monde nouveau.

Pour que vous sachiez que le fils de l’homme a l’autorité sur la terre de pardonner les péchés, il dit au paralytique :  À toi, je [te] dis, lève-toi, prends ton brancard, et va dans ta maison. Dans l’Ancien Testament, le fils de l’homme peut être le juge céleste de la fin des temps (Dn 7, 13). Dans les évangiles, c’est Jésus seulement qui utilise cette expression, il s’identifie au Fils de l Homme (Mc 8/38 ; Mt 24, 30). Ce titre est abondamment utilisé par Jésus dans les annonces de la Passion (Mc 8, 31-33; 9, 30-32, 10, 33-34 ss). Dans certains cas, cette expression peut être interprétée dans son sens banald’être humain par opposition à Dieu (Mc 2, 7-10), ou aux animaux (Mt 8, 20 ; en Mt 11, 18ss ) ; on peut éventuellement comprendre au sens de quelqu un.

La parole de Jésus n’est pas une parole vide, et il va le montrer en prononçant la parole la plus difficile à dire : « Lève-toi, prends ton brancard et marche. »
Pourtant, avant de faire cette déclaration, il rappelle le but qu’il vise : « Vous devez savoir, dit-il en substance, que le Fils de l’homme a le pouvoir – on pourrait aussi traduire le droit, la liberté – de pardonner les péchés sur la terre » (Marc 2 /10 ;  Luc 5 /24). 
 
 
Mais qui est ce Fils de l’Homme ?

Pourquoi Jésus ne dit-il pas simplement : « J’ai le pouvoir, la liberté, le droit de pardonner les péchés sur la terre » ? Partout ailleurs dans les évangiles ce titre mystérieux, que Jésus est d’ailleurs (à une exception près, Jn 12/34) le seul à employer, le désigne lui-même, semble-t-il. Mais ici, comme en deux ou trois autres passages de nos évangiles, on peut se demander si cette étrange expression empruntée au Premier Testament ne désigne pas aussi tout individu de cette humanité nouvelle que Jésus est venu susciter en proclamant l’avènement du monde nouveau de Dieu et en invitant à y entrer par un changement complet de mentalité.
Jésus, Fils de l’Homme par excellence. Il a donc au premier chef ce pouvoir, cette liberté, ce droit de prononcer la parole du pardon. Et il en use.
Et puisque ce droit lui est contesté, il va donc faire la preuve de ce qu’il dit : il va prononcer la parole difficile, montrant que « Qui peut le plus peut le moins ! » Cette fois-ci le paralysé reçoit l’ordre de se lever, de prendre son brancard et de rentrer chez lui. Maintenant le temps du débat est dépassé, on passe au concret, aux choses de la vie.

Jésus devina leurs pensées et leur dit : « Pourquoi avez vous de telles pensées ? Est-il plus facile de dire  : « Tes péchés te sont pardonnés » ou de dire : « Lève-toi et marche » ? Mais je veux que vous le sachiez : le Fils de l’homme a le pouvoir sur la terre de pardonner les péchés. » Alors il adressa ces mots au paralysé : « Je te le dis, lève-toi, prends ta civière et rentre chez toi ! » Tout le monde peut voir si le paralysé marche, mais personne ne peut savoir si ses péchés sont vraiment pardonnés. Cette question doit favoriser le discernement. Son sérieux et sa gravité sont évidents si on se réfère à Dt 18/21-22 qui propose l’accomplissement de la parole prononcée comme critère pour distinguer le vrai du faux prophète. D’autant plus que le prophète qui prononce une parole non ordonnée par Dieu doit mourir (Dt 18/20)

 « Prends ton lit et marche ! » Cela nous paraît encore plus difficile à dire, car cette parole-là ne peut rester en l’air. Elle doit être suivie d’effets concrets, visibles de toutes et de tous. Mais Jésus semble considérer que c’est encore plus difficile d’affirmer le pardon, de le communiquer vraiment et de le recevoir. En effet, que de résistances ce pardon doit franchir avant d’atteindre le fond de l’être, avant de remettre debout en nous et en l’autre ce qui est blessé, brisé, paralysé par la souffrance, par la violence, par l’injustice ou l’incompréhension ou encore par les conflits non résolus parfois hérités des générations qui nous ont précédés. Que de chemin à parcourir pour que la peur soit vaincue par la confiance, pour que le soupçon soit remplacé par des relations constructives.
« Prends ton lit et marche ! » Si Jésus a pu se risquer à cette parole, c’est probablement qu’il a vu dans le regard du paralysé que sa parole de pardon l’avait atteint au cœur et que dès lors, ce qui se redresse en lui peut être signifié pour la communauté rassemblée par la guérison de son corps.

Aussitôt, l’homme se leva devant tout le monde, prit sa civière sur laquelle il avait été couché et s’en alla chez lui en louant Dieu. Tous furent frappés d’étonnement. Ils louaient Dieu, remplis de crainte, et se disaient : « Nous avons vu aujourd’hui des choses extraordinaires ! »

Et voilà le paralytique qui se remet en marche et que le cercle s’ouvre pour le laisser passer. Il rentre chez lui plein de reconnaissance. Toutes celles et tous ceux qui sont là sont aussi touchés par le pardon attesté par cet homme debout, en marche. La suspicion et le jugement ont été désamorcés. C’est peut-être le plus grand miracle de cette histoire et c’est cela qui leur fait dire : « Nous avons vu aujourd’hui des choses merveilleuses ».

 

Aujourd’hui

Que représente pour nous la paralysie ? Qui est paralysé ?

Cette histoire devait déjà parler aux premiers destinataires de l’Evangile. En particulier à celles et à ceux qui n’étaient pas d’origine juive et qui découvraient le message de Jésus. Ils pouvaient se reconnaître dans ce paralysé et ses amis empêchés de s’approcher de Jésus par cette foule formée en partie de gardiens de la loi et de défenseurs de la vérité qui les considéraient comme des païens. Eux aussi ont dû faire preuve d’audace face à ceux qui voulaient qu’ils deviennent comme eux, se fassent circoncire et se soumettent ainsi d’abord à une loi qui leur était étrangère.

Le chemin qu’ils ont osé prendre, c’est celui de la foi : croire qu’ils pouvaient compter sur la seule grâce de Dieu et que Jésus les accueillait vraiment sans condition. Cette conviction a entraîné les apôtres et les premières communautés chrétiennes à faire des découvertes nouvelles sur la portée du message de Jésus.

Avons-nous bien compris : Mon enfant, tes péchés sont pardonnés ?

II jette nos péchés loin de lui, au fond de la mer (Michée 7 /19), et les oublie entièrement, pour ne plus jamais nous les imputer (Esaïe 43 /25). Ils sont aussi loin du pécheur que l’Est de l’Ouest (Psaume 103 /11.12). Mon enfant, tes péchés sont pardonnés – on pourrait traduire aussi : tes péchés sont écartés, ou évacués ou remis. Désormais ils ne comptent plus, on en a fini avec eux, on n’en parle plus, on tourne la page.
C’est là le plus grand don que Dieu puisse faire aux hommes. Tes manquements, tes fautes particulières, tout cela est écarté, privé désormais du pouvoir de te nuire. As-tu bien compris ? On n’en parle plus ! Dieu écarte tout cela d’un revers de main et ne permettra plus qu’on t’en fasse le reproche. Tes péchés du passé sont jetés à la poubelle. Maintenant c’est le Règne de Dieu qui est là pour toi. Tu peux y entrer sur tes deux jambes et y commencer une vie toute nouvelle.

Une parole libre pour un peuple en marche !

Pour le paralysé, c’est une vie nouvelle qui commence. La page est vraiment tournée. Celui dont Jésus libère ainsi le corps en même temps que le cœur se trouve à présent devant une page blanche, où il va pouvoir écrire une vie neuve et libre. En se levant, comme Jésus le lui demande, le paralysé commence cette vie nouvelle tout de suite. Son premier pas le fait entrer sans plus attendre dans le monde nouveau de Dieu. La parole de Jésus a pour effet de remettre l’homme debout.

…lève-toi, prends ton brancard, et va dans ta maison.  Et il se leva aussitôt, et ayant pris son brancard, il sortit en présence de tous

Qu’évoque pour nous l’image de cet homme qui roule son brancard et repart avec ? Il ne renie pas son passé, mais il se le met sous le bras, et il peut ainsi repartir, vers une vie nouvelle, d’un bon pas. Il n’a rien abandonné, mais il fait en sorte que cela ne l’encombre pas ! Peut-être sommes-nous parfois un peu, les uns ou les autres, ensemble ou séparément, comme ce paralytique, avant le trou dans le toit ! Peut-être sommes nous courbés, couchés, écrasés par nos soucis, nos incertitudes, nos impuissances ! Cela ne nous empêche pas d’avoir la foi, mais peut-être ce sont les porteurs qui nous manquent  pour nous donner les ailes nécessaires pour accéder à la guérison ! (Extrait d’une prédication de Marie-Odile Miquel).
Le miracle n’est pas seulement de pouvoir marcher, mais de pouvoir retourner indépendant, portant et non plus porté! Notre homme est guérit, debout, il prend sa vie en main. Voilà ce que Dieu peut faire pour chacun. Voilà aussi ce que des amis peuvent faire : ouvrir une brèche dans le mur de nos impossibilités !

Jésus voyant leur foi

Jésus reconnaît cette foi, en voyant ce grabat qui descend du toit, vers lui ! Il ne s’agit pas d’abord, de la foi du malade, il ne s’agit pas de la foi de tel ou tel porteur. Il nous est dit : « voyant leur foi ». C’est bien la foi de ce groupe-là, en tant que groupe justement, en tant que « mini Eglise », qui impressionne Jésus. Cinq hommes : quatre porteurs et un paralytique ! Dans l’Eglise, tout accablement aussi paralysant soit-il peut-être balayé par l’action conjointe de la foi de quelques-uns et de la réponse bénissante, libératrice et guérissante de Jésus !
Si nous choisissons ce modèle d’Eglise, qui correspond à nos forces limitées, il ne nous reste plus qu’à nous lever, à charger notre grabat, à escalader le toit s’il le faut, ou à faire preuve de toute autre audace insufflée par le désir d’avancer, et par la conviction que la réussite est au bout ! Pour la seule gloire de Dieu ! Alors, ne paralysons pas notre énergie par un étouffement sous le poids des regrets et des nostalgies du passé ! Mais allons de l’avant avec la foi qui soulève ou qui transperce, qui déplace ou qui transporte ! Cette foi qui, si nous le voulons peut faire toute chose nouvelle ! (Extrait d’une prédication de Marie-Odile Miquel).
 
Image 
     Evangéliaire d’Echternach (vers 1050) – enluminures : miracles et guérisons
Guérison d’un paralytique ( Lc 5,17-26) et guérison de la belle-mère de Simon ( Lc 4, 38-41)

 

 

 
Nicole Vernet
 Deux animations possibles pour les 8 – 12 ans 
    1. Un bricolage : Le paralysé porté par quatre amis

  1.  Animation tiré du dossier SED « Jésus en question »

Après avoir raconté le récit de Marc 2, 1-12 :

  • Fabriquer une maison palestinienne de 30 à 40 cm de côté et autant de hauteur.
  • Chacun dessine un brancard sur un papier d’environ 5 cm sur 10 cm et y inscrit quelque chose qui lui fait peur, qui lui pèse, qui le bloque et le paralyse.
  • La maison est posée par terre, les enfants et catéchètes sont assis en cercle tout autour, chacun a son « brancard » à la main. On peut poser la maison sur la table ou le tabouret qui tient lieu d’autel et s’asseoir en demi-cercle, si on a l’habitude de vivre ainsi un temps liturgique. Une bougie allumée peut-être posée à côté de la maison.
  • Puis, on ouvre le toit : il ne faut pas avoir peur de l’abîmer, les amis du paralysé l’ont bien fait…
  • Un enfant sur deux se lève, et pendant que tous chantent (exemple : Cherchez d’abord le Royaume de Dieu),  les enfants qui sont debout vont chercher un enfant assis, de leur choix, pour le conduire à la maison afin qu’il jette son brancard dans la maison par le trou aménagé sur le toit.
  • Ensuite on inverse les rôles : les enfants assis sont debout…
  • Quand toutes les paralysies sont jetées dans la maison, donc déposées aux pieds de Jésus, on chante un « Alleluia » ou « Gloire à Dieu ».

 

Deux récits merveilleux

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Ballade au clair de lune, Marc 6.45 à 54 

L’un des récits merveilleux les plus connu de la Bible est sans doute celui où Jésus marche sur les eaux. Voici une analyse essentiellement littéraire de cette histoire telle que l’a rapportée l’évangéliste Marc.

Deux récits formant un tout

« La ballade au clair de lune » racontée par Marc (6.45 à 52) suit « l’affaire des pains » où Jésus nourrit une grande foule (Marc 6.30 à 44). Les deux récits sont liés. En conclusion de « La ballade au clair de lune », l’évangéliste remarque : « les disciples n’avaient rien compris à l’affaire des pains. » (v. 54) Il relie ainsi les deux faits merveilleux « la multiplication des pains » (Marc 6.30 à 44) et «la marche sur les eaux » (Marc 6.45 à 54). Un bref coup d’œil chez Matthieu et Jean permet de confirmer cette intuition : « la balade au clair de lune » suit toujours « l’affaire des pains ». Les deux textes forment bien un tout. Avant l’affaire des pains, Marc raconte la mort de Jean Baptiste (Marc 6.17 à 29) puis le récit de la multiplication des pains démarre au verset 30 sans mot de liaison. Par contre, lorsque Marc entame au verset 45 l’épisode de la marche sur l’eau, il commence par le mot « aussitôt » pour bien montrer le lien entre les deux faits merveilleux.

 

1. Le passage au travers de l’eau 

L’analyse littéraire peut être « interne au texte »  comme dans notre fiche sur « La visite des mages » (Matthieu 1. 1 à 12) , mais elle peut prendre également un aspect « comparatif ». Il s’agit alors de déterminer à quel genre littéraire appartient notre texte. S’agit-il d’un discours, d’une lettre, d’un texte de loi etc. ? Ici, c’est bien entendu un récit qui s’offre à nous.  Il relève d’une scène type : le passage au travers de l’eau.

Il s’agit, sans nul doute de la scène type la plus connue à l’époque de rédaction des évangiles. En voici les éléments essentiels selon Exode 14 :
– le peuple a peur lorsqu’il voit les Egyptiens lancés à sa poursuite (v. 10) ;
– Moïse leur dit « n’ayez pas peur » (v. 13) ;
– un vent fort souffle toute la nuit ( v 21) ;
– vers la fin de la nuit les Egyptiens sont bloqués (v 24) ;
– à l’aube la mer a reprend sa place habituelle.(v27).
Selon le livre de l’ Exode, après le passage de la mer, Dieu nourrit son peuple dans le désert grâce à la manne.

Voici le texte (Marc 6.45 à 52), dans une traduction qui s’inspire de Parole de vie et de la T.O.B.
Tout de suite après, Jésus oblige ses disciples à monter dans la barque. Il veut qu’ils passent avant lui de l’autre côté du lac vers la ville de Bethsaïda. Pendant ce temps, il veut faire partir la foule. Jésus la renvoie donc, puis {yootooltip title=[il s en va dans la montagne pour prier]}Moïse va également dans la montagne pour  prier, c est là qu il recevra les tables de la loi.{/yootooltip} quand la nuit arrive, la barque est au milieu du lac, et Jésus est seul, à  terre. Il voit que ses disciples ont du mal à ramer parce que le vent souffle contre eux.
Alors, vers la fin de la nuit, Jésus vient vers eux en marchant sur l’eau et ils croient que c’est un fantôme. Ils se mettent à crier. En effet ils le voient et ils sont effrayés.
Mais Jésus leur parle tout de suite en disant : « rassurez-vous, c’est moi ! N’ayez pas peur ! ». Il monte à côté d’eux dans la barque, et le vent s’arrête de souffler.
Les disciples sont profondément étonnés. En effet ils n’ont compris ce qui s’était passé, quand Jésus a partagé les  pains. Leur cœur est fermé.

 Dans le premier testament, Dieu est souvent présenté comme celui qui permet de traverser  les eaux sans risques : Esaï.43.2 ; 63.12 ; Hab3.15 ; et Josué 3 et 4. 

La marche sur l’eau n’est pas le seul élément merveilleux de ce texte :
Jésus voit les disciples depuis la montagne en pleine nuit !
Les disciples croient aux fantômes.
Le vent s’arrête de souffler dès que Jésus entre dans la barque.

 

2. L’affaire des pains

Voici le texte où Jésus nourrit une grande foule (Marc 6.30 à 44)

En débarquant Jésus vit une grande foule. Il fut pris de pitié pour eux parce qu’ils étaient comme des brebis qui n’ont pas de berger, et  il se mit à leur enseigner beaucoup de choses. Moïse voit également que le peuple était comme des brebis qui n’ont pas de berger (Nombres 27.17)
 Puis comme il était déjà tard, ses disciples s’approchèrent de lui pour lui dire « l’endroit est désert et il est déjà tard. Renvoie les ; qu’ils aillent dans les hameaux et les villages des environs pour s’acheter de quoi manger. Après le passage de la mer, le peuple fut pendant quarante ans dans le désert.
  Mais il leur dit « donnez leur vous-même à manger. » Ils lui dirent : «  faut-il aller acheter pour deux cents pièces d’argent de pain et leur donner à manger ? » Il leur dit « combien avez vous de pain ? Allez voir ! »  Ayant vérifié, ils dirent « cinq, et deux poissons ». Marc met en valeur l’importance de la participation des apôtres. Ils symbolisent la communauté chrétienne
 Et il leur demanda d’installer tout le monde par groupes sur l’herbe verte. Ils s’étendirent par rangées de cent et de cinquante. Rappel de l’organisation du peuple d’Israël dans le désert (Exode 18.21 et 25 ; Deutéronome 1.15)
 Jésus pris les cinq pains et les deux poissons, et levant son regard vers le ciel, il prononça la bénédiction, rompit les pains et il les donnait aux disciples pour qu’ils les offrent aux gens. Il partagea aussi les deux poissons entre tous. Sans doute rappel de la prière des chrétiens avant la fraction du pain.
  Ils mangèrent tous et furent rassasiés. Comme dans le désert où Dieu donnait la manne au peuple pour le nourrir. Chacun en avait suffisamment (Exode 16. 18)
 Et l’on emporta les morceaux, qui remplissaient douze paniers, et aussi ce qui restait de poisson. Ceux qui avaient mangé les pains étaient cinq mille hommes Symbole des douze tribus d’Israël

 

 

3. Les récits merveilleux dans la Bible

La Bible utilise le merveilleux comme un moyen de communiquer l’évangile. Selon l’écriture, l’annonce de la bonne nouvelle peut se faire en utilisant la fantaisie et l’imagination. Mais elle l’emploie dans un cadre connu de ses lecteurs. Elle ne met pas en avant les faits extraordinaires pour rendre impressionnante la force de Jésus. Le côté magique est d’ailleurs totalement absent dans la mesure où la description du phénomène est réduit à sa plus simple expression : pas de baguette magique, pas d’étincelles ni de formule ! Nous ne sommes pas dans un spectacle fantastique.

La Bible utilise donc le merveilleux mais sans excès. Le fantastique un bon moyen pour annoncer l’évangile mais avec modération. L’abus d’extraordinaire donne le tournis !

 

 © Claude DEMISSY, Eglises Protestantes d’Alsace et de Lorraine, 2006.

 

Sur le chemin d’Emmaüs

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L’histoire des deux disciples prend place entre le récit du tombeau vide où Jésus n’est plus, et le récit de l’apparition aux disciples, où Jésus est là. Dans l’épisode d’Emmaüs, Jésus est présent mais on ne le reconnaît pas ; puis quand il est reconnu, il n’est plus là ! Luc joue avec cette présence dans l’absence et cette absence dans la présence, parce que cette ambivalence décrit bien la réalité de la foi et la tension dans laquelle vivent les croyants.

Luc 24/ 13-35

Cette fiche biblique « Sur le chemin d’Emmaüs » fait partie des douze textes du dossier « Avec et sans Frontières« . Ce livre de catéchèse présente douze textes et approfondit douze situations de frontières différentes. Un calendrier, une cassette audio et un livret de chants accompagnent ce matériel et sont  disponibles aux éditions Olivétan (BP 4464, 69241 Lyon Cedex 04).
Ici, la frontière est plutôt une barrière qui se dresse entre réalisme, aveuglements, déception et interprétation du cœur, regard du dedans, confiance. Cette barrière, les disciples vont la franchir pour rencontrer cet inconnu qui chemine avec eux.
Nous ne pouvons reproduire intégralement les notes bibliques, théologiques et pédagogiques, faute de place. Juste de quoi vous mettre en appétit…
Quelques indications bibliques
L’histoire des deux disciples prend place entre le récit du tombeau vide où Jésus n’est plus, et le récit de l’apparition aux disciples, où Jésus est là ; dans l’épisode d’Emmaüs, Jésus est présent mais on ne le reconnaît pas ; puis quand il est reconnu, il n’est plus là ! Luc joue avec cette présence dans l’absence et cette absence dans la présence, parce que cette ambivalence décrit bien la réalité de la foi et la tension dans laquelle vivent les croyants.
 
  • v.13 Les deux disciples ne font pas partie des douze, mais sont deux parmi d’autres, c’est à dire les proches, les amis. L’un a un nom, Cléopas, l’autre totalement inconnu n’en a pas.
  • v.15 Ce voyage géographique n’est peut-être pas l’essentiel. Ce qui compte c’est le sens que Luc donne à ce voyage, à ce cheminement, de Jérusalem à Emmaüs : c’est le chemin de la tristesse à la joie,  de la mort à la vie ! Pour Luc, l’Évangile est une puissance qui met en route, qui met en mouvement ceux qui le reçoivent. Pour Luc, l’Évangile est une puissance qui met en route, qui met en mouvement ceux qui le reçoivent.
  • v.16 Le chagrin aveugle les deux hommes, ils ne voient rien d’autre que le poids de leur tristesse… et le bout de leurs sandales !
  • v.21 II y a bien trois jours entre la mort de Jésus et sa résurrection. Mais cette indication n’est pas seulement une notation de temps. Le troisième jour, dans la Bible, c’est le jour où Dieu, après un temps de silence, reprend les choses en mains, décide d’intervenir (cf. par exemple Jonas 2/1 et 11 ; Matthieu 12/38-40).
  • v.27 L’enseignement des rabbins juifs consiste à décrire le plan de Dieu à travers tout l’Ancien Testament : le présent s’explique par le passé.
  • Dans les Écritures, les disciples avaient tout ce qu’il faut pour comprendre les événements du vendredi saint et de Pâques ; mais … ils ne comprennent pas ! La parole ne suffit pas, il faudra le geste.
  • v.30 La parole sans le geste, mais aussi le geste sans la parole restent incompréhensibles. Enfin leurs yeux s’ouvrent, c’est à dire leur intelligence, leur entendement.
  • v.31 La lumière s’est fait dans leur intelligence, mais aussi dans leur cœur (siège de la volonté, pour la Bible, plus que des sentiments).
  • v.32 La découverte est tellement extraordinaire qu’elle les remet en route, en sens inverse !
 
Des propositions pédagogiques :
 
Pour les 4-7 ans, l’accent sera mis sur la tristesse qui ne reste pas toujours
 
  • Demander aux enfants de mimer des attitudes de tristesse (la tête dans les bras, recroquevillé, les mains qui se frottent les yeux, marcher la tête baissée…) puis des attitudes de joie (les bras levés, les pieds qui sautillent, la bouche ouverte…) et discuter avec eux : la tristesse nous ferme à toute relation, on est bloqué et cela se voit dans notre corps. La joie nous tourne vers les autres, elle nous ouvre.
  • Raconter l’histoire du récit d’Emmaüs en présentant les disciples tristes, marchant le nez dans leurs chaussures. Préciser la raison de leur tristesse et l’endroit où ils vont, à quel moment cela se passe, laisser deviner l’identité du personnage qu’ils rencontrent.
  • Reprendre les attitudes mimées et les appliquer à ce récit.Avec des papiers de couleur découpés, réaliser une fresque qui raconte l’histoire d’Emmaüs : des silhouettes couleur grise toutes recroquevillées pour le début, un chemin en sens inverse.

 Pour les 8-12 ans, l’accent sera mis sur le fait que nous ne sommes pas seuls, d’autres nous aident à avancer.

  • Faire avec les enfants un parcours au cours duquel ils pourront s’identifier aux disciples d’Emmaüs.

Trois activités composent ce parcours : la lecture ou la narration du récit d’Emmaüs, étape par étape, la représentation de ce récit et l’évocation de situations de la vie des enfants.

  • Matériel nécessaire : un rouleau de papier (papier peint par exemple), papier noir ou gris ou brun, colle, ciseaux, peinture et pinceaux. 

 

 
Récit biblique
 

Luc 24, 13 à 19->… leur demanda-t-il ?         Luc 24, 19 b-> … devant tout le peuple   Luc 24, 20 et 21-> troisième jour 

Luc 24, 22 à 24
-> ils ne l’ont pas vu     Luc 24, 25 à 27-> le livre des prophètes   Luc 24, 28 à 31-> les Écritures   Luc 24, 32 à 35

 
Activités manuelles

Fabriquer des traces de pas et les coller sur le rouleau, selon les dessins successifs :

Dessiner des tableaux qui représentent des récits de la vie de Jésus que les enfants connaissent et aiment : ils sont comme les disciples.
 
Réflexion

Vous rentrez chez vous, tristes : vous avez eu une mauvaise note, vous vous êtes disputés, vous avez cassé ou perdu quelque chose, un projet tombe à l’eau… Comment vous sentez-vous ?Faire marcher les enfants pour montrer comment cela se passe. Vous parlez avec quelqu’un du moment avant la dispute, avant la mauvaise note… Qu’est-ce que cela vous fait ? Vous vous sentez mieux, vous oubliez le chagrin.

  
Vous vous rappelez : c’est fini, vous vous êtes disputés.

 

Quelqu’un vous dit :
« Ça va s’arranger, tu verras! » Comment réagissez-vous ?
 
 
 
 
Un parent, un copain… vous aide à réfléchir, vous explique comment d’autres ont fait…

 
 

 
 
Vous comprenez qu’il y a des solutions, vous reprenez courage…
 
 
 
 
Vous faites de nouveaux projets… Ça redémarre !
 

Pour les adolescents, mettre l’accent sur le fait que savoir n’est pas forcément comprendre. L’intelligence du cœur et de la foi permettent un regard nouveau sur ma vie, sur ceux qui m’entourent, sur le monde.

  • Lire à voix haute le texte, puis laisser le temps aux adolescents de le lire ; leur distribuer une enveloppe préparée à l’avance qui contiendra le texte, sans indication de versets. Ce texte aura, au préalable, été découpé par vos soins, phrase par phrase.
  • Demander aux adolescents de le reconstituer puis leur proposer de bien observer le texte et de repérer des parallèles possibles:

Les disciples quittent Jérusalem (v.13) //

        Les disciples rentrent à Jérusalem (v.33-35)

Ils parlent de ce qui les décourage (v.14) //

       Ils parlent de ce qui les réjouit (v.32)

Jésus se joint à eux (v.15) //

        Jésus s’éclipse (v.31 b)

Leurs yeux sont fermés (v.16) //

        Leurs yeux s’ouvrent (v.31 a)

Les disciples parlent de ce qui les terrorise et les décourage (v.17-25) //

       Jésus propose aux disciples une nouvelle communion avec lui (v.25-30)

  • Remettre une grande feuille blanche à chaque adolescent et de la peinture à doigts. Leur demander de dessiner librement sur le thème : «Comment je vois la vie quand je suis découragé et quand je retrouve une espérance».

 

 « Arcabas, Les Pèlerins d’Emmaüs, Église St Hugues de Chartreuse, 2006.

Avec l’aimable autorisation de l’auteur
 

 

 

 

Judas, un chemin qui s’arrête

Image
Image Judas est un homme qui a marché pendant environ trois ans sur le même chemin que Jésus-Christ, l’homme qui se révèle comme Parole de Vie. Comment cet homme a-t-il été emmené sur le chemin de la mort, entraînant Jésus et lui-même ? Y a-il un sens à sa destinée, à ce chemin qui s’arrête ?
Les textes bibliques (évangiles et Actes) sont très sobres sur ce personnage. Nous pouvons néanmoins en dégager quelques éléments éclairants.

 

Judas est un des douze apôtres.

Il est choisi par Jésus comme les autres. On retrouve la liste des apôtres dans Matthieu10/ 1-4, Marc 3/ 13-19 et Luc 6/ 12-16.

Sur les trois listes, il apparaît en dernier : et Judas Iscariote, celui-là même qui le livra (Matt, Marc) / ou bien : qui devint traître (Luc) : nous avons trois éléments pour décrire l’identité du personnage.

–    Le nom « Judas » est le même qu’un des fils de Jacob, dans l’Ancien Testament, qui a donné son nom à la tribu de Juda, dont le territoire se situe au sud du pays.

–    Le surnom « Ish Karioth » signifie l’homme de Karioth, un nom de lieu. Cela pourrait signifier qu’il ne vient pas de Galilée comme Jésus et d’autres disciples, mais du Sud du pays.
On a aussi rapproché le surnom d’Iscarioth au mot « sikarios » = poignard, qui est un dérivé du mot latin sicarius = porteur de poignard. Ce surnom pourrait alors faire de lui un zélote, un juif pratiquant la résistance armée pour libérer Israël. A cette époque-là, le nationalisme anti-romain et la ferveur messianique alimentaient toute forme de résistance à l’occupant.

–    Celui-là même qui le livra / qui devint traître : Judas, comme les onze disciples a reçu de Jésus le pouvoir de guérir et de transmettre son enseignement. Pourtant la mémoire ne retiendra de lui que son geste dramatique et incompréhensible pour les autres disciples et pour les lecteurs que nous sommes.

Jésus dévoile l’intention de Judas

–    Pendant son dernier repas, Jésus annonce qu’un des douze va le livrer :
Matthieu 26/ 20-25, Marc 14/17-21, Luc 22/ 14-23

L’émotion est d’autant plus forte que ce n’est pas ce que les disciples attendent. C’est sans doute un geste tellement impensable pour eux, qu’ils en arrivent chacun à se remettre en cause : est-ce moi, Seigneur ? Mettent-ils leur confiance totalement en Jésus, sachant qu’Il les connaît mieux qu’eux-mêmes ? Imaginent-ils qu’un de leur geste pourrait être fatal à Jésus  sans qu’ils s’en rendent compte ?
Quand on assiste ensuite au reniement de Pierre, on se dit que cette réaction n’est pas si absurde qu’elle le paraît dans un premier temps.
En tout cas, Judas devra assumer son geste, en sachant que Jésus sait. Est-ce que cette fausse complicité l’a enfoncé dans son erreur ?

Jésus n’a aucune parole de jugement contre Judas, mais il le plaint : malheureux l’homme par qui le Fils de l’homme est livré ! et Matthieu et Marc ajoutent : il eût mieux valu pour lui qu’il ne fût pas né, cet homme-là » !  
Jésus ne nomme pas Judas par son nom, il l’intègre à une humanité universelle et libre. Ils se sont rencontrés et côtoyés pendant plusieurs années, mais Judas ne discerne pas qu’il fait le mauvais choix. Jésus le plaint. Et pourtant, Luc soulignera la nécessité de son geste, à la lumière de la résurrection : « il le faut » (Luc 24/7).

Image –  Judas livre Jésus par un baiser (Matthieu 26/45-50, Marc 14/41-46, Luc 22/45-48)
La trahison de Judas s’exprime sans doute le mieux dans ce baiser qui est détourné de son sens affectif. C’est une mise en scène, où ni Judas ni Jésus ne sont dupes. Mais Jésus s’y est préparé par la longue nuit de prière. Il sait que cette traversée est nécessaire et il ne s’enfuit pas. Il sait aussi sans doute que le chemin de Judas ne sera que douleur. Que ce chemin s’arrêtera, alors que le sien fera une percée dans l’impossible

 

Le geste de Judas le dépasse lui-même

Matthieu et Luc rapportent la mort violente de Judas : un dans Matthieu 27/1-10 et l’autre dans les Actes (qui est la suite de l’évangile de Luc) : 1/13-26.

 Image –    C’est au travers de la mort de Judas qu’on se rend compte que son but n’a pas été atteint, même si on ne peut faire que des hypothèses quant à ce but.  

Matthieu exprime clairement que Judas met fin à ses jours volontairement : ce geste témoigne du drame qu’il est en train de vivre. Il s’est trompé de façon dramatique et ne supporte plus de vivre avec l’idée d’avoir envoyé son maître à la mort. Son geste avait visiblement une autre intention de (au) départ. A-t-il été tenté de provoquer un événement à la hauteur de son attente messianique ? Pour un juif, le Messie ne peut pas mourir. Il doit se révéler pour libérer le peuple.
A moins que Judas ait voulu provoquer une confrontation avec les tenants du pouvoir religieux, choqués des provocations de Jésus vis-à-vis de l’obéissance à la loi. Peut-être Judas avait-il une confiance totale en Jésus et savait qu’il leur était bien supérieur ? Il ne pensait pas possible qu’il soit condamné à mort.

Sur l’intention de Judas, les évangiles ne disent rien. Mais ils disent autre chose.

–    Tous les évangiles utilisent le mot « livrer » et non pas trahir, au moment de l’arrestation. Comme si Judas n’était qu’un pont ténébreux entre ceux qui cherchent à tuer Jésus et Jésus lui-même. Pourquoi fallait-il qu’un homme se trompe à ce point ? Les chefs religieux ne pouvaient-ils pas trouver Jésus eux-mêmes en pleine nuit dans ce lieu habituel de prière ? Fallait-il que la solitude de Jésus apparaisse dans un abandon le plus total, et même dans la trahison ?

L’expression « est livré » va se retrouver à plusieurs reprises dans les évangiles, avec des sujets différents : un verbe au passif évoque le plus souvent l’action de Dieu (Marc 9/31). Jésus est livré par les juifs aux païens, et par Pilate à la mort (Marc15/15).
Les sujets différents de ce verbe dont Judas se fait l’acteur déclenchant montre bien qu’autre chose est en jeu dans ce geste de trahison. Cela entre dans un sens plus large qui va échapper à la compréhension de Judas (en tout cas dans Matthieu, les autres évangiles n’en parlent pas)
 
–    Le sens s’ancre dans les Écritures

Les textes bibliques sont écrits après coup, ils éclairent ce geste par petites touches pour l’englober dans la volonté de Dieu. Cette volonté, ce plan d’amour, s’ancre dans l’Ancien Testament dans lequel il s’annonce. Ce qui arrive n’est pas l’effet du hasard, et même si Satan est parfois cité, il y a une place pour le geste de Judas dans le plan de Dieu.

Je ne citerai qu’un seul exemple : celui de l’argent. On a souvent mis sur le compte de la cupidité l’acte de Judas. Pourtant le montant de trente deniers n’est pas vraiment attrayant pour un tel geste. C’est à peine le mois d’un petit salaire. À quoi cela correspond-il ?
Dans l’Exode (21/32), c’est la compensation donnée au maître pour la mort accidentelle d’un esclave tué par la faute d’un animal.
Mais c’est surtout dans Zacharie 11/12 qu’on trouve un parallèle possible avec Judas : la colère de Dieu se déchaîne contre les bergers d’Israël, ceux qui sont censés conduire le troupeau. Dieu veut y mettre son propre berger, mais il est rejeté et son travail est estimé à trente deniers. Cette évaluation digne du prix d’un esclave appellera la malédiction sur le peuple par Dieu.

Dans les évangiles ce sont les grands prêtres qui évaluent la somme d’argent à donner à Judas. Une somme d’argent en échange de Jésus, esclave ou berger rejeté  par Israël ?  

 Conclusion :

 

judas desespoir

 La figure de Judas a inspiré de nombreux auteurs, à commencer par les écrits apocryphes, composés en général après les textes du Nouveau Testament. Dans la littérature du XX ème siècle on trouve des auteurs comme Claudel ou Marcel Pagnol.
Judas incarne la figure de tous les traîtres, son nom est même passé dans la langue courante : un « Judas » ou « le baiser de Judas ».

Il incarne en tout cas tous les errements humains à choisir encore et toujours de désobéir au commandement de la Genèse : « tu ne prendras pas du fruit de la connaissance du bien et du mal ». Judas a voulu décider ce qui était bien, et il a malheureusement assisté aux conséquences contraires à ce qu’il attendait.

Judas a livré Jésus et Pierre a renié Jésus. L’un n’a pas supporté de vivre après son acte, l’autre a pleuré, s’est repenti et a pu revivre avec le pardon de Jésus. Judas n’a pas imaginé d’être pardonnable. Pierre a traversé l’épreuve de l’humiliation, mais a vécu pleinement en lui-même la joie de la résurrection et du pardon.

Laurence Berlot

Cette réflexion s’est inspirée du dossier théologique du CBOV (Camp Biblique Œcuménique de Vaumarcus) 1998. (www.cbov.ch)

La parabole du salaire égal

Image   Quand les ouvriers de la onzième heure révèlent la bonté du maître…

« L’important c’est de participer », formule connue mais rarement vécue. Le sport, comme la plupart des jeux, suscite la compétition, surtout lorsqu’il est fortement médiatisé. Les jeux actuels, style « loft », tendent même vers la cruauté puisqu’il s’agit d’éliminer au fur et à mesure celui qui doit quitter. La parabole de Matthieu 20. 1 à 16 décrit une vigne qui constitue un « loft » étrange où les « joueurs » sont intégrés petit à petit au lieu d’être éliminés.

Étudier une parabole, c’est entrer dans un genre littéraire très connu du judaïsme de l’époque biblique. Les paraboles de Jésus sont des {yootooltip title=[métaphores.]}Expression où un terme concret est associé à une idée abstraite. Il s’agit d’une sorte d’image : « cela se voit comme le nez au milieu de la figure. »{/yootooltip} Jésus utilise cette forme de langage de manière brève (ne jetez pas de perles aux pourceaux) ou dans des récits plus développés. Les paraboles développent une idée appelée « la pointe de la parabole ». La méthode permettant de découvrir le message central dépend du type de parabole. Certaines présentent une histoire tout à fait banale pour l’époque, elle fonctionne alors par analogie comme lorsque l’on dit « c’est gros comme une maison ». Une maison est effectivement quelque chose de « gros », l’analogie opère immédiatement. C’est le cas de {yootooltip title=[la parabole du semeur]}Matthieu 13. 1 à 9 ;  Marc 4. 1 à 9 ; Luc 8. 4 à 8. »{/yootooltip} montrant une scène ordinaire de la vie paysanne du temps de Jésus. D’autres commencent dans un cadre familier mais un élément inattendu intervient à la fin, provoquant une réaction de surprise. Les histoires drôles agissent de cette manière et la parabole de Matthieu 20. 1 à 26 également.

Chercher le sens de la parabole
Il faut distinguer le sens de la parabole elle-même de l’utilisation qu’en a faite l’évangéliste. Pour comprendre l’intention de l’évangéliste il faut examiner le contexte littéraire mais également connaître l’arrière plan historique de Matthieu. Pour voir si le récit a eu, à l’origine, un sens plus universel que ce que l’évangéliste suggère, il faut effectuer son étude littéraire.
 
L’histoire des ouvriers de la onzième heure
{yootooltip title=[Matthieu 20 versets 1 à 3, 7, 8, 13 à 16]}traduction Parole de vie{/yootooltip}

 

 

La parabole selon Matthieu

 

La bonté du maître
« Le Royaume des cieux ressemble à ceci : un propriétaire sort, le matin, de bonne heure. Il veut {yootooltip title=[embaucher]}La région subissait une grave crise économique, beaucoup de personnes essayaient de trouver du travail à la journée.{/yootooltip} des ouvriers pour sa vigne. Il décide avec les ouvriers de leur donner {yootooltip title=[une pièce d’argent]}Salaire normal d’une journée de travail d’un ouvrier{/yootooltip}.  pour la journée et il les envoie à la vigne. Dès le début du récit l’accent est mis sur le maître. (v1)
{yootooltip title=[A neuf heures du matin]}Le jour tombait à la douzième heure. Il s’agit peut être d’une allusion au jugement dernier.{/yootooltip} il sort de nouveau. (…) Le propriétaire est particulièrement aisé, il peut engager autant d’ouvrier qu’il le veut. La parabole insiste sur son initiative souveraine. Ce n’est pas le travail des ouvriers qui est mis en valeur. (v2 à 7).
Ils lui répondent : {yootooltip title=[« Parce que personne ne nous a embauchés.»]}Les pharisiens étaient en train de rénover le judaïsme, laissant de côté les juifs appartenant à d’autres courants comme, par exemple, les chrétiens.{/yootooltip}Le propriétaire leur dit : « Vous aussi, allez travailler à ma vigne. » {yootooltip title=[Quand le soir arrive]}A la onzième heure, traduction TOB »{/yootooltip}, le propriétaire de la vigne dit à son serviteur : « Appelle les ouvriers et donne à chacun son salaire. » (…)

Le servitgeur est sans doute une figure du Christ. (v8)

 

Le propriétaire répond à l’un d’eux : « Mon ami, je ne suis pas injuste avec toi. Tu étais bien d’accord avec moi pour recevoir une pièce d’argent pour la journée. Prends ton salaire et va-t-en. Je veux donner à cet ouvrier arrivé en dernier autant qu’à toi. J’ai le droit de faire ce que je veux avec mon argent, n’est-ce pas ? {yootooltip title=[Est-ce que tes pensées sont mauvaises]}Expression biblique (Proverbes) désignant la colère et la jalousie de l’homme.{/yootooltip}parce que je suis bon ? »

Encore une fois le récit insiste sur la souveraineté du maître. (v14)

Après avoir mis en valeur la souveraineté du maître, la parabole montre qu’il utilise son pouvoir pour être bon. (v15)

 Et Jésus ajoute : « Ainsi, les derniers seront les premiers, et les premiers seront les derniers. » La conclusion est ici plus sévère qu’en Matthieu 19. 30

Matthieu reprend le thème de 19. 30. Le contexte montre clairement l’intention de l’évangéliste : polémiquer contre les pharisiens qui estimaient être « les premiers ». Dans les années 80-85, date de la rédaction de l’évangile, ils cherchaient à chasser des synagogues tous ceux qu’ils considéraient comme  « de mauvais ouvriers ». (v6)

Le judaïsme était divisé en de nombreux groupes, les disciples du Christ formaient un des courants religieux juifs. En parallèle, le christianisme s’est diffusé également parmi les non juifs, mais Matthieu s’adresse surtout aux juifs.

© Claude Demissy Eglises Protestantes d’Alsace et de Lorraine