Point KT

Une petite esclave se souvient !

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D’après II Rois 5/1 à 19a
Il y a très très longtemps, une petite fille, dont nous ne connaissons pas le nom, habitait avec ses parents le pays d’Israël, ce beau pays où poussent la vigne et l’olivier, ce pays où coulent le lait et le miel. Elle avait appris à aimer Dieu, à l’honorer, à lui faire confiance en toutes circonstances.

Elle était très heureuse comme peuvent l’être tous les enfants du monde dans une famille aimante.

Or un jour, le roi de Syrie envoie sa puissante armée vers le pays d’Israël. A sa tête, il place son général en chef Naaman qui a déjà remporté de nombreuses victoires.

Entrés dans le pays les soldats avancent, rasant les maisons, brûlant les villages. Après des batailles acharnées, les syriens font de nombreux prisonniers. Ils choisissent les hommes forts et les jolies femmes et même des enfants, pour emmener les captifs dans leur pays !

Les soldats victorieux ne choisissent que les gens en bonne santé : la route sera longue jusqu’à Damas, la capitale.

Enfin, après la lente marche sur les routes poussiéreuses et sous le soleil brûlant l’armée entre en triomphe dans la ville. Les prisonniers harassés de fatigue, le regard vide, sont assemblés sur la grand place, enchaînés les uns aux autres… Ils attendent, dans un vacarme étourdissant, d’être donnés aux soldats en récompense ou d’être vendus comme esclaves. Triste spectacle ! Triste commerce !

Devinez qui se trouve parmi ces prisonniers, tout à fait perdue, abandonnée, loin de sa maison, loin de ses parents et de ses amis, seule dans un pays étranger, tremblante de peur.

Qui ? La petite fille dont nous ne connaissons pas le nom, oui, malgré son état misérable, c’est bien elle ! Que va-t-elle devenir maintenant ? Qui viendra à son secours ?

Brusquement, le brouhaha de la foule s’arrête… Silence… Naaman le magnifique général arrive sur la place du marché. Il arrête son char pour examiner les prisonniers. Il remarque la petite fille dans cette grande foule déguenillée, il voit ses joues pâles, ses yeux effrayés et il a pitié d’elle.

Il s’approche et lui sourit avec bonté.

« Qu’il est beau ce général avec son casque rutilant, sa grande cape rouge… qu’il est beau quand il sourit, pense la petite fille… pourtant il a tout détruit dans mon pays, sous ses ordres, son armée a tout pillé, ses soldats  m’ont arrachée à mes parents. »

Soudain, Naaman appelle un de ses hommes :

« Prends cette enfant et amène la chez moi, ordonne-t-il, elle sera pour ma femme une gentille petite servante. »

Et c’est ainsi que notre petite fille entre au service dans la maison du grand général syrien. Ici, tout est différent rien à voir avec la modeste maison de ses parents. L’épouse de Naaman est aimable et douce avec sa petite servante, elle est aussi très belle, toujours vêtue de soieries aux couleurs chatoyantes et coiffée avec soin. Privée des siens, notre petite exilée se met à l’aimer, sans oublier ses parents restés dans son pays.

Naaman et sa femme possèdent tout ce qu’on peut désirer tout ce dont on rêve. Ils ont tout pour être heureux…

Et pourtant, à plusieurs reprises, la petite fille a constaté que sa maîtresse reste assise silencieuse et triste. Parfois même elle se cache pour pleurer.

Pourquoi ? Même fort et courageux, apprécié au plus haut point par le roi de Syrie qui le comble de mille faveurs à cause des nombreuses victoires qu’il a remportées avec l’armée syrienne… en apparence invincible… Naaman est lépreux. Au début, il n’y avait qu’une petite tache blanche mais maintenant cette tache s’est étendue elle gagne du terrain. En silence, la lèpre commence à ronger son corps  vigoureux et dans un proche avenir va le mutiler.

Lentement un voile sombre descend sur la maison. La femme de Naaman a le cœur meurtri.

Qu’arrivera-t-il quand la maladie s’aggravera ? Que faire ? Qu’adviendra-t-il du grand général ? Pour éviter la contagion, va-t-il devoir lui aussi quitter sa famille, sa maison, ses amis pour aller vivre seul, dans le désert… Finis les accueils glorieux de la population en liesse, finis les grands banquets assis à la droite du roi, pour célébrer les victoires, finis tous les honneurs, même pour lui, le grand général.

Un témoignage courageux

Notre petite fille sait que les syriens ne servent pas le Dieu vivant, elle sait qu’ils adorent une grande statue, une idole, le faux dieu Rimmon. Elle a vu ses maîtres s’incliner devant elle et lui adresser des prières. Ont-ils les yeux bouchés, ont-ils leur intelligence endormie, paralysée, ces hommes si sûrs de leur supériorité sur les champs de bataille ? Perdent-ils leur bon sens lorsqu’ils sont devant leur idole, ne savent-ils pas qu’elle est fabriquée par des hommes ?

–    Rimmon a bien une bouche, mais elle ne parle pas !

–    Rimmon a bien des yeux mais ils ne voient rien !

–    Des oreilles mais elles n’entendent rien !

–    Un nez mais il ne sent rien !

–    Des mains et ne touchent pas !

–    Des pieds et ne marchent pas !

La petite servante juive réfléchit longuement. Sa foi au Dieu d’Israël est restée intacte. Ses parents, ses grands parents lui ont raconté les hauts faits du Dieu vivant, lorsqu’il a fait sortir son peuple de la servitude…

Elle sait que son Seigneur peut faire du bien même aux étrangers, même à ceux qui oppriment son peuple, même à celui qui la retient esclave et prisonnière ! Le Seigneur de grâce, elle le connaît, elle, tout en restant esclave !

Alors, attristée, émue  par la souffrance de ses maîtres, avec l’élan de sa foi, son amour désintéressé la pousse à faire du bien à son ennemi. Elle suggère à sa maitresse avec courage :

« Ah ! si seulement mon maître se présentait au prophète qui est à Samarie. Celui-ci le guérirait tout de suite de sa lèpre. »

Sa maîtresse reste interloquée :

« Mon mari a vu les meilleurs docteurs du pays !… »

Mais la petite captive poursuit imperturbable :

« Le prophète Élisée est un homme de Dieu, il a guéri des gens, il a même rendu la vie à un petit garçon mort d’insolation… »

 Ce soir là, quand Naaman rentre à la maison, la petite fille juive doit recommencer toute son histoire. Elle le fait à la fois avec tant de simplicité et de conviction qu’une lueur d’espoir  se lève dans le cœur de Naaman et de son épouse…

Elle parle ! Et sur son dire, un roi vainqueur va écrire à un roi vaincu pour lui demander son aide, un brillant général va se mettre en route vers le pays qu’il a dévasté pour trouver la guérison, un prophète d’Israël va intervenir au nom du Dieu vivant !…
crédit Nicole VERNET – Point kt