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Lazare, ressuscité ?

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Prédication narrative pour les jeunes Evantile de Jean 11, 1- 45

 

Il y a bien longtemps, en 68 de notre ère pour être plus précis, dans une petite ville des environs d’Ephèse, une femme d’environs 65 ans se dirige vers la maison où son Église se réunit. En chemin, elle pense aux événements qui agitent tous les esprits. Un messager en provenance de Jérusalem est arrivé hier chez Jean. Les nouvelles ne sont pas bonnes. Certes, les frères et sœurs ont quitté la ville, mais la guerre qui fait rage attriste tout le monde. Non seulement les Romains assiègent la ville, mais à l’intérieur, les différentes factions se battent entre elles. Jésus avait bien raison : la violence ne mène qu’à la violence.
Marthe, puisque c’est elle, a accepté d’enseigner les enfants pendant que les adultes discutent de la guerre et prient pour les Juifs prisonniers de la ville et prisonniers de la violence.

Les enfants qu’elle va rencontrer, elle les connait bien. Tous, ils l’appellent grand-mère, que ce soit ses arrières petits enfants ou leurs amis. C’est bien ainsi, se dit-elle, puisque tous nous formons une grande famille, grâce au Seigneur Jésus Christ. Pour ceux qui sont nés dans l’Église, c’est tout naturel. Pour les autres, c’est une vraie découverte. En particulier pour le petit Rufus  qui ne dit jamais rien: ses parents  sont morts de la fièvre l’hiver dernier juste après avoir rejoint l’Église et Rufus  a été recueilli par Myriam, la nièce de Jean.

De quoi parler aujourd’hui ? Comment leur parler ? Elle qui a rencontré le Seigneur ressuscité, elle qui parcouru l’empire jusqu’à Rome en compagnie de son mari Barnabas avant de s’installer à Éphèse avec Jean et ses proches, elle trouve toujours bien plus difficile de s’adresse aux enfants qu’aux adultes. Et puis, il y a le petit Rufus.

Lorsque, devant la maison de Jean, Marthe a fini d’embrasser tous ces petits, les demandes fusent : « Alors grand-mère, tu nous parles de quoi aujourd’hui ? Raconte la fois où Jésus a guéri un aveugle ! Non, la fois où il est entré à Jérusalem sur un ânon ! C’est vrai que les Romains vont tuer tout le monde à Jérusalem ?

Et puis, il y a Rufus, qui ne dit rien.

Alors Marthe se décide. Est-ce que je vous ai déjà parlé de la fois où mon frère Lazare est mort ?

Grand-Père Lazare ! Mais il n’est pas mort, il est en train de discuter là-dedans avec les autres !

Eh bien si, Lazare est mort, il y a bien longtemps, et c’est le Seigneur Jésus qui l’a ramené à la vie.

C’était l’année où le Seigneur a été crucifié, pas très longtemps avant qu’il n’entre à Jérusalem monté sur l’âne. Nous habitions Béthanie, pas loin de Jérusalem, avec Marie notre sœur qui est morte il y a bien longtemps maintenant. Jésus et ses disciples les plus proches étaient en Galilée, ils se cachaient des chefs religieux qui voulaient la mort de Jésus. Lazare est tombé gravement malade. Marie et moi avons tout de suite envoyé un message à Jésus. Nous savions qu’il pourrait le guérir. Mais l’état de Lazare a empiré et il est mort.
–  Pourquoi Jésus n’est pas venu ? demande la petite Salomé.
– C’est Nathanaël qui m’a raconté. Jésus n’a pas bougé quand il a entendu notre message. Pourtant, il aimait Lazare comme un frère. Il a attendu que Lazare soit mort pour venir à Béthanie. Ses disciples ne voulaient pas, c’était trop dangereux. Mais Jésus a insisté qu’il fallait qu’il y aille pour aider ses disciples.

– Tu veux dire aider Lazare, non ?

– Ce n’est pas ce que Nathanaël a raconté. En tous cas, Thomas, qui n’a jamais eu peur de rien, a encouragé tout le monde à suivre Jésus, même s’ils risquaient tous la mort et ils sont partis pour Béthanie.

Pendant ce temps, nous avions mis Lazare dans un tombeau et nous pleurions, Marie et moi. Les voisins, des amis de Jérusalem étaient venus nous entourer.
Et voilà qu’un garçon est venu me prévenir discrètement que Jésus arrivait. Alors je me suis précipitée sur le chemin et quand je l’ai vu, je me suis effondrée. Si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort, tu aurais pu le guérir, lui ai-je dit.
Vous savez, Jésus avait une manière bien particulière et bien curieuse de répondre quand on lui parlait. Il fallait souvent réfléchir longtemps avant de comprendre ses paroles. Là, il m’a dit « Ton frère vivra ». Je ne comprenais plus rien. Jésus me disait la même chose que tous ces gens venus pour me consoler. Mais cela ne me consolait pas du tout. Je lui ai répondu ce qu’on m’avait appris : je sais que Lazare revivra à la fin des temps, quand tout le monde ressuscitera. Entre nous, je ne comprenais pas bien ce que cela pouvait signifier.

Alors Jésus m’a répondu : « C’est moi qui suis la résurrection et la vie. Celui qui met sa foi en moi, même s’il meurt, vivra ; et quiconque vit et met sa foi en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela ? »

Je l’ai regardé, et c’était comme si je le voyais pour la première fois. C’était toujours le même Jésus, celui qui venait dîner à la maison, qui nous racontait des histoires du Royaume de Dieu, qui nous parlait de l’amour de Dieu pour tous les humains. Mais c’était aussi quelqu’un d’autre. Je ne comprenais pas jusque-là pourquoi les disciples disaient qu’il était le Messie, le Fils de Dieu, mais là, j’ai compris. J’ai compris qu’il était vraiment celui que tout le monde attendait, celui que Dieu avait envoyé dans le monde. J’ai cru en ses paroles. C’est comme si un poids avait été enlevé de mon cœur, comme si quelqu’un d’autre habitait dans mon cœur avec moi.

– Mais ton frère, Lazare, celui qui était mort ?

Ah Lazare ! Oui, il était toujours mort, mais les paroles de Jésus me consolaient non pas de son absence, mais pour lui. Lui aussi avait connu Jésus et cru en lui.

Je ne me souviens plus bien du reste. J’étais toute étourdie par cette découverte soudaine sur Jésus, comme si je ne l’avais jamais vu ni entendu avant. Il était à la fois toujours le même et différent, imposant. Tout à coup, nous étions devant le tombeau ouvert de Lazare et Jésus était en larmes. Je ne me souvenais plus de l’y avoir suivi. Il y avait Marie et les voisins. Tous disaient la même chose : Jésus aurait pu guérir Lazare. C’était comme si j’étais la seule à me rendre compte qu’il était différent. Enfin, la seule, sans doute pas. Ses disciples proches, Thomas, Philippe et les autres l’avaient compris depuis longtemps déjà.
Alors Jésus a levé les yeux au ciel et demandé à Dieu de l’exaucer à cause de nous. Il a alors crié : « Lazare, sors ! » Et mon frère est  sorti, tout empêtré dans ses bandelettes. Jésus a alors demandé qu’on l’aide à s’en démêler et il est reparti vers la maison, comme si rien ne s’était produit.
Je peux vous dire que Lazare ne comprenait rien, que les voisins et amis étaient bouleversés. Nous pensions tous que seul Dieu était capable de faire revivre les morts, et voilà que Jésus en avait le pouvoir ! Beaucoup ont alors cru qu’il était vraiment le Messie, celui que Dieu avait choisi pour libérer le peuple. Moi, j’avais compris qu’il était bien plus que cela. Je suis la résurrection et la vie avait-il dit.

Marthe se tait et regarde les enfants. Les plus grands connaissent l’histoire par cœur. Les plus jeunes sont captivés, et Rufus a l’air de penser très fort. Marthe soupire. Elle se fait vieille. Bientôt, plus personne ne pourra raconter comment elle a rencontré le Seigneur. Heureusement, Jean et d’autres avec lui sont en train d’écrire un livre pour témoigner de tout ce qui est arrivé. Les enfants de ces petits ne connaîtront plus aucun témoin direct de ces événements qui ont changé tant de choses.

Lydia demande : alors, Lazare ne va plus jamais mourir ?

– Si, bien sûr Lazare va mourir. Il n’est pas ressuscité comme le Seigneur est ressuscité.

Simon ne comprend pas : à quoi cela sert que Jésus ait fait revivre Lazare puisque tout le monde continue à mourir ?

– Tu sais, tout le monde n’a pas cru que Jésus était le fils de Dieu. Il y a beaucoup de juifs qui ne le croient toujours pas. Jésus l’avait dit, il avait dit que Dieu lui avait donné le pouvoir de faire vivre les morts. En rendant la vie à mon frère, il a montré que c’était vraiment vrai, qu’il avait ce pouvoir.
Simon insiste : mais pourquoi les croyants continuent à mourir, comme mon cousin Jacob, puisque Jésus leur a promis qu’ils ne mourraient pas ?
– Simon, Jésus a promis qu’ils vivraient, même s’ils étaient morts. Tu sais, quand on découvre que Jésus est le Seigneur, on découvre tout à coup qu’on n’est pas seul, qu’il est toujours avec nous. On ne le voit pas, c’est comme une présence à l’intérieur de nous. C’est cela la vie qui ne s’arrête jamais, la vie avec Dieu, avec Jésus.

– Comment tu peux le savoir ? C’est Lazare qui te l’a dit ?
– Non, Lazare ne parle jamais de ce qui s’est passé quand il était mort. Mais je sens aujourd’hui, maintenant, que Dieu est avec moi, je vois la vie et les choses de manière différente, comme Jésus l’avait promis. C’est le témoignage de tous les frères et sœurs. Je suis sûre que lorsque vous interrogez les autres adultes, ils vous disent la même chose. Alors, puisque cette promesse s’est réalisée dans ma vie, je fais confiance, je crois que la promesse de Jésus que cette vie avec Dieu ne s’arrêtera jamais, même quand je mourrai, est vraie aussi.

Rufus prend alors la parole : je ne vois pas ce que cela change. On est malheureux quand quelqu’un meurt.
– C’est vrai et Jésus a pleuré devant la mort de Lazare, devant notre peine. Tu sais, j’ai perdu beaucoup de personnes que j’aimais beaucoup, dans ma famille. Ma sœur Marie, mon mari Barnabas, plusieurs de mes enfants et petits-enfants. Et puis des frères et sœurs dans l’Église : Nathanaël, Salomé, Julia et tant d’autres. J’ai pleuré, nous avons tous pleuré parce qu’ils nous manquaient. Mais j’ai confiance, ils sont avec le Seigneur. Et je ne me suis jamais sentie seule dans ma peine. Le Seigneur était à mes côtés, il pleurait avec moi et il me soutenait. Et tous les frères et sœurs pleuraient avec moi, et nous nous aidions les uns les autres. Avoir une famille autour de soi quand on est triste, cela aide beaucoup. Jésus nous a donné cela aussi, une famille de frères et sœurs qui nous aiment et nous soutiennent quand notre propre famille ne peut plus le faire.
– Alors, c’est pour cela que tu dis tout le temps frère et sœur à des gens qui ne sont pas de ta famille ? dit Rufus.
– Ils sont de ma famille, vous êtes tous de ma famille puisque nous avons le même Père qui nous aime.

Lorsque les adultes sont sortis de la maison pour rentrer chez eux, tous les enfants se sont éparpillés comme des moineaux. Le petit Rufus s’est retourné et a crié : A bientôt grand-mère !

Crédit : Anne Petit (EPUdF), Point KT, Illustration Pixabay

 

Amen