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Psaumes interdits – Du silence à la violence de Dieu

  Les Psaumes si fréquemment priés ne sont-ils pas tous destinés à nourrir la foi ? Or, fort curieusement, il s’en trouve parmi eux quelques-uns qui ont de quoi nous embarrasser, nous faire sursauter même.
Ce sont les prières désespérées de croyants qui ont l’impression que Dieu ne répond pas. Ce sont aussi, plus choquants encore, les appels qui pressent Dieu d’exercer sa vengeance contre les ennemis. Pourquoi de telles demandes ? Et comment croire en un tel Dieu ?

Dans cet ouvrage très facilement abordable, Thomas Römer nous éclaire sur certains psaumes dérangeants, ceux que les chrétiens d’aujourd’hui s’interdisent de lire dans leurs liturgies car théologiquement ils ne sont pas acceptables. Et en effet ils nous embarrassent, ces textes chargés de violence et de haine qui appellent à la vengeance divine contre toutes sortes d’ennemis ! Ou ceux qui expriment une souffrance et un désespoir alourdis par le silence d’un Dieu qui semble sourd et silencieux face à la détresse et à la prière des humains.

Pourtant, ces psaumes sont là, dans la Bible. Alors, plutôt que de les ignorer ou de les censurer, si l’on tâchait tout simplement de les comprendre ?

Certes, ils n’en deviendront pas plus acceptables. Au moins nous permettront-ils, peut-être, de décanter nos images de Dieu et de nous décharger sur lui de toutes les violences que nous avons tant de peine à contenir.

La première partie, est consacrée aux psaumes de détresse, avec en exemple le psaume 6 où l’homme dit sa souffrance, et l’important psaume 22 où, après l’abandon, s’exprime la confiance. La présentation des complaintes collectives comprend aussi le livre des Lamentations. Deux pages enfin permettent au lecteur de faire siennes ces prières.

La seconde partie aborde les psaumes de vengeance, des textes choquants car ils réclament âprement l’extermination et la vengeance divines (Psaumes 83, 58 et 137). L’auteur montre comment la Bible assume le fait que la violence fasse partie de l’homme, puis il lit le psaume 83 (« des appels pas très corrects »), le psaume 58 (« jusqu’à l’inacceptable ») et le psaume 137 (  « peut-on justifier des images si cruelles ? »).

Un ultime chapitre invite à « essayer de comprendre » ces textes aujourd’hui.

Il faut donc selon Thomas Römer, continuer à lire les psaumes, tous les psaumes, même et surtout ceux qui nous déconcertent. Ce sont des porte-parole grâce auxquels nous pouvons porter devant Dieu tout ce qui bouillonne en nous. Inévitablement, le chemin vers la confiance passe par l’énonciation de tout ce qui fait obstacle à cette confiance, car pour avancer vers la louange et la paix avec Dieu et avec les autres, il est nécessaire de surmonter la détresse et les sentiments de violence. Et les psaumes nous accompagnent sur ce chemin.

Un petit livre précieux, éclairant, sans aucune concession. De quoi réconcilier notre foi avec la morsure des réalités quotidiennes.

  À lire, puis à prêter largement.

Thomas Römer Psaumes interdits – Du silence à la violence de Dieu. Éditions du moulin, 2007, 94 p.