Point KT

Et si Joseph avait dit non?

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Marie est enceinte et pas de Joseph. Ce n’est peut-être pas facile pour elle, mais… et pour lui ? Comment ne pas se sentir blessé et trahi? Comment accepter Marie pour épouse et accueillir l’enfant comme son fils ? Et si Joseph avait dit « non »?

Il avait failli lui dire non, à Marie. Il avait failli lui dire : « Non, je ne veux pas t’épouser ! » Ce n’est pas vraiment qu’il avait changé d’avis : ils étaient fiancés, et s’ils ne vivaient pas ensemble, l’engagement qu’ils avaient pris l’un envers l’autre était presque aussi fort. Seulement, quand il avait su qu’elle était enceinte et pas de lui ! Il aurait voulu rompre les fiançailles, mais secrètement pour ne pas l’accabler.

Il ne se sentait pas capable d’accepter comme son fils l’enfant d’un autre, ce n’était pas ce qu’il avait prévu quand même ! Ce n’était pas comme cela qu’il voyait le mariage ! Et puis si elle en aimait un autre, si elle l’avait trompé, trahi, comment lui faire confiance, comment bâtir un foyer avec elle ? Il ne se sentait pas non plus capable d’affronter le regard des autres, les rumeurs, les moqueries de ceux qui allaient penser soit qu’elle l’avait bien eu, soit qu’elle et lui … enfin vous comprenez.

Alors il ne voyait pas d’autre moyen que de rompre les fiançailles. Il n’y avait que ça à faire, pour elle, comme pour lui. Cela lui semblait être la meilleure solution. Mais Dieu en a décidé autrement.

Une nuit, alors que Joseph dormait, on peut le dire, du sommeil du juste, dans son rêve, il a vu un ange. Heureux homme, pensez-vous peut-être, parce que rares sont ceux qui ont cette chance, sauf que vous ne savez pas encore ce que l’ange allait lui demander… Donc dans son sommeil, Joseph entend et il voit un ange, un envoyé de Dieu, qui lui apporte un message de son Seigneur, à lui Joseph qui n’est ni prêtre, ni prophète, mais juste Joseph, fils de Jacob, Joseph le charpentier de Nazareth. Quel honneur ! Mais quelle exigence aussi dans son message :
« Joseph, toi qui es un lointain descendant de David, toi qui es de la famille royale dépositaire de la promesse divine, n’aie pas peur d’épouser Marie. Adopte comme ton fils l’enfant qu’elle porte, car cet enfant sera celui par qui Dieu réalise ses promesses, celui en qui on pourra dire, Dieu est avec nous ! Emmanuel ! Celui en qui on pourra dire, Dieu sauve, c’est pourquoi, ce fils, tu l’appelleras Jésus. » Je dois vous dire, puisque vous ne parlez pas hébreu, que Jésus veut justement dire « Dieu sauve ».
En quelques mots, l’ange bousculait toutes ses certitudes, c’était à n’y rien comprendre : Marie ne l’avait pas trahi, elle ne l’avait pas trompé, il l’avait jugée trop vite. Celle qu’en toute logique, logique humaine bien sûr, celle qu’il allait condamner, celle-là, Marie portait le Messie. Celle qu’il allait rejeter, Dieu l’avait choisie. L’ange lui demandait de suivre l’ordre de Dieu, pas celui des hommes, la logique de Dieu, pas celle des hommes, en somme d’accepter avec confiance que Dieu soit seul maître à bord.

Mais ce n’est pas tout : Dieu qu’il croyait lointain dans sa majesté céleste toquait à la porte de notre humanité, le Messie dont on pensait qu’il serait fils de roi, serait, si Joseph acceptait, fils de charpentier. Joseph en était comme ébranlé : sa conception de Dieu et de l’humanité, lui là-haut dans son ciel, nous ici sur la terre, s’en trouvait complètement chamboulée.

Et puis Dieu lui demandait de participer à la réalisation de ses promesses, à l’avancée de son projet de salut pour son peuple : sans lui, sans son « oui » à Dieu, l’enfant à naître ne serait pas de la famille de David. Dieu avait besoin de lui. Oh, il était sûr que s’il disait non, Dieu trouverait un autre moyen, quelqu’un d’autre… Mais comment lui dire non ? Alors que cela représentait tant d’espoir pour son peuple ? Tout à coup, ses doutes, ses peurs, le regard des autres… tout cela avait bien moins d’importance.

On allait se moquer de lui, mais quelle importance ! Certains diraient que Marie est allée voir ailleurs, et lui conseilleraient de la répudier, mais ils ne savent pas ce que lui, il sait ! D’autres diraient qu’elle et lui n’avaient pas su attendre et riraient dans leur dos. Ils n’avaient qu’à rire, lui, il se réjouissait ! Il y aurait des moqueries et des sourires entendus, des critiques et des conseils pas forcément bienveillants. Tant pis ! Il y avait bien plus important : le projet de salut de Dieu pour son peuple et ce projet, il lui demandait d’y prendre part. Ça lui semblait tellement, tellement plus important que tout ce qu’il pouvait craindre : il se sentait plein de courage, du courage pour faire ce que Dieu lui demanderait, même s’il fallait partir loin, même jusqu’en Egypte… Il se sentait plein de fierté aussi, fierté d’avoir été choisi pour prendre part à la réalisation de la promesse de Dieu. Et il était dans la joie car la naissance du Messie est une si grande nouvelle pour son peuple !

Alors il a dit oui, à Dieu et à Marie aussi. Ils attendent ensemble la naissance de l’enfant, de leur enfant. Il sait que ce sera un fils et qu’ils l’appelleront Jésus.

Crédit : Claire de Lattre-Duchet (UEPAL) Point KT