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Les questions d’Elias

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Noël… A quoi pensez-vous en entendant ce mot ? Elias, lui, ne pense qu’à l’agitation et au stress que Noël provoque dans sa famille, alors il n’aime pas Noël. Et si Noël, ce n’était pas cela ?

Noël… tout le monde a déjà entendu parler de Noël, tout le monde devrait savoir ce que c’est que Noël et pourtant, je connais un petit garçon qui s’interroge beaucoup à propos de Noël. Ce petit garçon s’appelle Elias.

Elias donc, un beau matin de décembre, réalise qu’il entend beaucoup parler de Noël ces derniers jours. Noël, Noël entend-t-il partout. Cela lui dit bien quelque chose, c’est le même cirque que l’année précédente : sa mère est stressée et ne parle que menu, cuisine, courses à faire pour être prêt à temps pour recevoir Papy, Mamy, l’oncle Arthur qui raconte toujours des blagues rigolotes et la tata Carlotta qui n’aime jamais les bons petits plats que Maman a passé des heures à cuisiner. Cette année, peut-être bien que Maman va mettre ses menaces à exécution : chaque année, en entendant tata Carlotta se plaindre du repas qui n’est jamais comme il faut, Maman menace de lui retourner son assiette avec tout son contenu sur la tête ! Bien sûr, elle ne le fait jamais, la maman d’Elias, mais Elias sait que ça la rend triste lorsque tout le monde n’apprécie pas le mal qu’elle se donne pour faire une jolie table et un bon repas…

Donc la maman d’Elias est stressé et sera bientôt triste à cause de tata Carlotta, quant à son père, il est très occupé : cette année, comme tous les ans, il veut que la maison soit la plus belle, pour gagner le concours de la maison la mieux décorée du village. Et surtout, cette année, il veut qu’elle soit plus jolie que celle du voisin d’en face avec qui il est souvent en compétition. Alors il passe des heures à trier des ampoules, choisir les guirlandes en assortissant les couleurs et puis il faudra encore accrocher tout ça, grimper sur l’échelle ou sur le toit. Maman est stressée, papa très occupé… C’est donc ça Noël ? se demande Elias. Parce que si c’est ça, franchement, y a vraiment pas de quoi en faire tout un plat ! Il ne voit vraiment pas pourquoi tout le monde en fait un flan pareil ! Les cadeaux qu’il recevra ne le console même pas de voir ses parents dans des états pareils. En fait, il n’aime pas Noël, c’est ça, il n’aime pas Noël ! Mais peut-être que Noël n’est pas ce qu’il croit ? Si tout le monde en parle autant, c’est peut-être que Noël, c’est autre chose ? Mais alors, Noël c’est quoi ?

Alors qu’Elias  a la tête pleine de toutes ces questions, sa maman lui propose de l’emmener à Strasbourg, au marché de Noël. Chouette, se dit Elias, là-bas, je trouverais peut-être la réponse à mes questions.

Bien sûr, la maman d’Elias est pressée, elle cherche des boules rouges et dorées pour la décoration du sapin et elle veut aussi trouver du thé de Noël et du clou de girofle en poudre pour les bredele (traditionnels petits gâteaux de Noël alsaciens), alors il faut se dépêcher dans le marché de Noël au milieu des odeurs de gaufres et de vin chaud, au milieu des touristes qui ne sont pas pressés. Mais même s’il faut faire vite, Elias voit les jolies illuminations et le grand sapin de la place Kléber, et il remarque aussi qu’il y a comme un air de fête qui flotte, un air de bonnes affaires aussi pour les commerçants qui cherchent à attirer les clients. Mais alors, se demande-t-il, c’est ça, Noël un magasin géant en plein air avec une odeur de fête foraine ? Pourtant, il voit des choses qui ne cadrent pas avec l’ambiance marchande : au coin d’une rue, il y a une femme en uniforme à côté d’une espèce de marmite suspendue à un trépied, elle fait sonner une petite cloche et appelle à donner pour les plus pauvres. Et puis plus loin, il y a une chorale qui chante, il se serait bien arrêté pour écouter, mais sa maman n’a pas le temps. Il a juste le temps d’entendre que le chant parle d’espérance.

Voir le marché de Noël n’a pas aidé Elias à répondre à ses questions, ni à aimer Noël. Alors, puisque son papa et sa maman sont trop occupés, il va voir son papy : son papy, il a le temps et d’habitude, il répond toujours bien à ses questions. Alors Elias lui raconte ce qu’il a vu à Strasbourg, les lumières, le sapin, les marchands, la dame avec sa cloche et sa marmite, la chorale.

Son papy réfléchit un peu et lui répond : « Tu as raison Elias, aujourd’hui pendant le temps de l’Avent et à Noël, tout est un peu mélangé et peut-être qu’à cause de ça, on perd un peu de vue le sens de la fête. Pour les chrétiens, Noël c’est avant tout la naissance de Jésus-Christ, le Fils de Dieu et le temps de l’Avent, c’est le temps où on se prépare à cette fête, où on relit les promesses que Dieu a faites à son peuple dans l’Ancien Testament et qu’il a accomplies par la naissance de Jésus-Christ. C’est ça qui devrait nous réjouir. Le reste, les illuminations, le commerce, le sapin, les bons repas se sont ajoutés ensuite et parmi tout ça, il y a de bonnes choses comme la joie d’être réunis en famille par exemple, et puis il y a d’autres choses dont on pourrait sûrement se passer. »

Le papy d’Elias va alors chercher sa vieille bible et l’ouvre pour lire quelques passages à Elias.  (On peut lire par exemple : Michée 5/1-4a, Luc 1/26-38…)

Elias n’a pas tout compris dans ce que son grand-père lui a expliqué. Il a bien compris que Noël fête la naissance de Jésus-Christ, mais il ne voit pas très bien pourquoi il faut se réjouir de cette naissance qui a eu lieu il y a si longtemps. Même son papy n’était pas né à l’époque et pourtant Elias trouve que son papy est déjà très vieux !

Mais Elias n’a pas le temps de demander plus d’explications à son papy parce qu’il entend sa mamy l’appeler. Et comme il sait qu’elle est entrain de faire des étoiles à la cannelle, il se précipite pour y goûter. Mais les étoiles à la cannelle ne sont pas cuites, le four n’est même pas allumé, et sa mamy l’appelle pour autre chose : elle prépare un petit panier avec un thermos de café chaud et tout un assortiment de bredele, il y en a même à la noix de coco, les préférés d’Elias.

« Mets ton manteau, ton bonnet et tes gants, nous allons apporter ce panier aux deux jeunes gens qui se sont installés dans l’abri bus.
–    Il y a des gens installés dans l’abri bus ??!!, demande Elias, en pensant sans oser le dire à haute voix que décidément à cette période de l’année, tous les adultes se comportent de manière vraiment bizarre.
–    Oui, répond la mamy d’Elias, ce sont deux amoureux qui font le tour du monde à vélo. Ils se sont installés avec tout leur matériel de camping dans l’abribus pour se reposer aujourd’hui et demain, avant de repartir. Madame Trucmuche leur a proposé de dormir dans sa grange, mais ils ont répondu qu’ils ont fait le pari de faire le tour du monde par leurs propres moyens, sans l’aide de personne. Par le froid qui fait, ils ont du courage ! C’est beau d’être jeunes et amoureux… En tout cas, je me suis dit que quelques petits gâteaux et un peu de café chaud leur feraient plaisir. Et comme ce n’est pas vraiment de l’aide, ils ne perdront pas leur pari.
–    Mais Mamy, dit Elias, pourquoi tu veux leur faire plaisir, tu ne les connais même pas !
–    C’est vrai que je ne les connais pas, répondit la mamy d’Elias, mais c’est bientôt Noël !
–   Mamy, je comprends rien à ce que tu me racontes là : Papy m’a dit que Noël, c’est la naissance de Jésus. Alors quel rapport entre l’anniversaire de Jésus et apporter des petits gâteaux à des gens que tu ne connais même pas ?
–   Tu vois Elias, reprit la mamy d’Elias. Noël, ce n’est pas seulement un anniversaire, ce n’est pas seulement le rappel de quelque chose qui c’est passé il y a longtemps. Noël parle à chacun, aujourd’hui. Noël, pour moi, c’est le rappel chaque année que Dieu m’aime, qu’il m’aime tellement, moi et les autres êtres humains qu’il a envoyé son fils pour nous le dire. On devrait s’en souvenir toute l’année, mais les humains sont ainsi faits, ils s’habituent, ils oublient… Alors Noël me rappelle chaque année que Dieu m’aime comme son enfant, ça me rend heureuse et donc j’ai envie de donner aussi de la joie autour de moi.
–  C’est pour ça alors les petits gâteaux et le café…
–  Oui, c’est pour ça, conclut la mamie d’Elias, pour donner un peu de joie aux deux amoureux aventureux, là dans leur abribus. C’est aussi pour ça que j’aime décorer ma maison, y recevoir la famille autour d’un bon repas, pour fêter dignement l’amour que Dieu nous offre par la naissance de son Fils.»

Je ne peux pas vous dire ce que les deux amoureux en ont pensé, car on ne me l’a pas raconté, mais je sais qu’à cause de tout ça Elias a commencé à aimer Noël et qu’il s’est mis dans la tête de sortir son papa de ses guirlandes et sa maman de sa cuisine, pour qu’ils découvrent ou redécouvrent le bonheur d’être aimés de  Dieu, pour qu’ils vivent simplement un vrai, un joyeux Noël.

Crédit : Claire de Lattre-Duchet (UEPAL) Point KT