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De roc en Pierre – Notes bibliques 2 A et B

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Une pêche plus étonnante encore !

Seigneur

Ce titre donné à Jésus marque le changement par rapport au « maître » du v. 5. Même si ce peut être un terme de politesse devant une personne importante, il faut ici penser à plus : Seigneur, c’est le mot par lequel les Juifs appellent Dieu depuis que, par respect, ils ne prononcent plus son nom, révélé à Moïse (Exode 3/13-15). Simon prend donc conscience d’une présence de Dieu auprès de lui.

… éloigne-toi de moi car je suis un pécheur

Et le pécheur ne peut paraître devant Dieu sans mourir. Simon parle ici comme le prophète Esaïe mis en présence de Dieu dans le temple (Esaïe 6/5).

Le pêcheur de Galilée sait qu’il est bien loin d’être en règle avec les multiples prescriptions de la loi de Dieu dans l’Ancien Testament compliquées par les interprétations des scribes !

Sois sans crainte

A la crainte de l’homme étonné, émerveillé mais inquiet de la proximité de Dieu, celui-ci répond par une parole rassurante (Genèse 15/1 ; 21/27 ; 26 ; 24 ; Daniel 10/12 ; Luc 1/30 ; Marc 16,6). Luc a donc donné à cet épisode de la vie de Jésus le caractère d’une manifestation de Dieu devant quelques hommes. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Mais cela ne signifie pas que pour Simon, Jacques, et Jean, cette présence de Dieu en Jésus ait été immédiatement évidente.

… ce sont des hommes que tu auras à capturer

Jésus exprime ici la mission qu’il entend confier à Simon : à partir de son métier initial de pêcheur, devenir celui qui rassemble les hommes autour de Jésus, dans le Royaume. Le miracle de la pêche ne fait qu’illustrer cette mission et lui donner tout son sens : de même que, avec Jésus, il a pu tirer du lac menaçant et avare des quantités énormes de poisson, de même il va, avec Jésus, arracher à la mort les hommes qu’il amènera au Christ.

Laissant tout, ils le suivirent

Contrairement aux récits de vocation de Matthieu et de Marc, le récit de Luc ne contient pas expressément d’appel de Jésus à le suivre. Mais Jésus leur a offert une possibilité de vivre, alors ils abandonnent tout ce qui assurait jusqu’ici leur existence, leur famille et leur bateau, leur filet et le lac, et même le produit de cette pêche extraordinaire !

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Contrairement à Marc et Matthieu, Luc a donc choisi de présenter la rencontre décisive de Simon avec Jésus comme une théophanie, une manifestation de la présence de Dieu. Il cherche à montrer ainsi que ce qui a mis en route Simon, Jacques, Jean et les autres n’a rien à voir avec l’engouement de quelques exaltés pour un gourou quelconque. Ils quittent tout parce que la parole de Dieu est à l’œuvre, et qu’elle est prodigieusement efficace.

Dès ce moment là aussi, l’avenir de Pierre est fixé dans le plan de Dieu : il sera pêcheur d’hommes, il participera au salut de ceux qu’il pourra enserrer dans les filets de l’évangile pour les arracher au pouvoir de la mort et leur apporter la vie.

Tout cela, Luc le dit à la lumière de la résurrection de Jésus, et avec sa connaissance des événements qui vont en découler. Il tient à dire que les disciples n’ont pas suivi Jésus par hasard, mais qu’ils sont entrés dans le déroulement du plan de Dieu pour sauver les hommes.

Mais Luc ne prétend pas pour autant que Simon ait accédé du premier coup à la pleine conscience de la divinité de Jésus, ni à la plénitude de sa foi. Pour cela, le futur apôtre a encore de la route à faire. Ainsi, l’évangéliste a pris soin d’indiquer que Simon connaissait déjà Jésus. Or, les guérisons mentionnées en Luc 4/38-41 n’avaient pas entraîné Simon à suivre Jésus. Ce n’est donc pas la pêche qui le décide. Si extraordinaire soit-elle, elle ne pouvait passer que pour un coup de chance aux yeux de ceux qui n’auraient eu, pour Jésus, aucune sympathie.

En 4/16-30 Luc a présenté le rejet de Jésus à Nazareth, où ce refus de l’accueillir empêche tout miracle. Ici, c’est l’accueil de Simon qui reçoit une réponse, car malgré ses réserves, il se met à la disposition de Jésus, il prête sa barque pour faciliter l’enseignement, il accepte de faire encore un lancer de filet.

D’ailleurs, tout aurait pu s’en tenir là : en récompense de ses services, Simon aurait fait une belle pêche, et puis aurait disparu de l’histoire, comme d’autres bénéficiaires de miracles. Si les choses ont tourné autrement pour Simon, Jacques, Jean, et quelques autres c’est qu’un lien différent s’est établi entre eux et Jésus. Un lien qui tient plus de l’admiration, de la sympathie et de l’amitié que de la foi. Celle-ci, nous le verrons, met du temps à s’établir.

Pour l’instant, ces premiers disciples ont envie de tout quitter pour rester avec Jésus, et tout part de là. Et l’évangéliste ne le cache pas, même s’il veut aussi indiquer dés maintenant où cette sympathie pour Jésus va conduire ces pêcheurs de Galilée.

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